La Russie a commencé lundi à chercher les coupables après l'échec de sa sonde martienne défectueuse Phobos-Grunt dont des fragments seraient retombés dans le Pacifique, un fiasco qui compromet les espoirs du renouveau de l'industrie spatiale russe.

Le vice-premier ministre russe Dmitri Rogozine a annoncé lundi qu'il allait «contrôler personnellement l'enquête» sur les causes de l'échec du lancement de la sonde en sommant l'agence spatiale russe Roskosmos de lui fournir les noms des «antihéros» responsables de cet échec.

«J'attends de Roskosmos le rapport promis sur les causes de l'accident, les noms des antihéros, ainsi que les perspectives de développement du secteur spatial d'ici 2030», a écrit sur son compte Twitter M. Rogozine, ancien ambassadeur de la Russie auprès de l'OTAN, récemment nommé au gouvernement.

Une réunion sur la question aura lieu le 31 janvier, a-t-il ajouté.

Phobos-Grunt, lancée le 9 novembre, devait se diriger vers un satellite de Mars, Phobos, et en ramener des échantillons, mais elle a échoué à s'affranchir de l'attraction terrestre.

Des morceaux de la sonde seraient tombés dimanche dans l'océan Pacifique vers 17H45 GMT, selon les calculs annoncés la veille par le ministère de la Défense et confirmés lundi par l'agence spatiale russe Roskosmos.

Le directeur adjoint de Roskosmos Anatoli Chilov a toutefois indiqué lundi à la télévision russe ne disposer d'«aucune preuve visuelle ni autre» de la chute des éléments de Phobos-Grunt.

«Cela aurait pu devenir notre niche dans les recherches interplanétaires, ce qui aurait permis à la Russie de redorer son blason de puissance spatiale», a déclaré à l'AFP Igor Marinine, rédacteur en chef de la revue spécialisée «Les nouvelles de l'exploration spatiale».

Il a toutefois noté qu'avant le lancement «aucun spécialiste n'était sûr du succès de ce vieux projet qu'on n'a pas réussi à remettre au point» à cause du «très mauvais financement de ces 15-20 dernières années».

Une source du secteur spatial russe a d'ores et déjà déclaré dimanche que la Russie aurait du mal à établir les causes de cet échec «faute de données télémétriques».

«Les conclusions de la commission d'enquête seront basées sur des suppositions et non sur des faits réels», a déclaré ce responsable à l'agence Interfax.

Phobos-Grunt, un appareil d'un coût de 165 millions de dollars, devait marquer le retour de la Russie dans l'exploration interplanétaire, abandonnée après l'échec en novembre 1996 de la sonde Mars 96 qui était retombée dans l'océan Pacifique.

L'industrie spatiale russe a connu une année noire en 2011, la perte de Phobos-Grunt étant l'un des cinq lancements russes à avoir échoué.

Vadim Loukachevitch, auteur de plusieurs ouvrages sur l'espace a écrit le week-end dans son blogue que l'échec de Phobos-Grunt était «une honte nationale» pour la Russie.

Ce fiasco qui couronne une série d'échecs «causés par des raisons différentes témoigne d'une grave crise globale de l'industrie spatiale russe» malgré l'augmentation du financement du secteur «qui a quadruplé par rapport à 2005», souligne-t-il.

«Si la Russie arrive à prendre des mesures complexes pour assainir le secteur spatial et lutter contre la corruption, elle pourra sauver son exploration spatiale. Dans le cas contraire, celle-ci est vouée à la mort dans les 10 ans à venir», conclut-il.