On n'aime qu'une fois, chez les mâles Nephilengys malabarensis. Ces araignées font face à un dilemme crucial: être dévoré tout cru après l'amour, ou sacrifier leur sexe et avoir une chance de rester en vie...

Il la regarde amoureusement. Courage, se répète-t-il. Nerveux, il avance précautionneusement: un gentleman n'effarouche pas sa dulcinée, surtout lorsqu'elle fait 10 fois sa taille. Ils échangent un regard complice. Elle veut! Sans faire ni une ni deux, il escalade son abdomen et, dans un moment indicible d'exaltation, insère tendrement son bulbe reproducteur dans l'épigyne de sa compagne. La culmination de toute une vie.

Mais la relation à peine entamée, la dame y met fin en des termes on ne peut plus clairs. «Je n'avais pas terminé», pense-t-il, incrédule, pendant que sa compagne dévore ses entrailles. Alors que l'étincelle de vie vacille dans ses huit yeux, un dernier regret effleure l'esprit de l'araignée: coït interrompu.

Tragédie après tragédie, les Nephilengys malabarensis mâles une espèce d'araignée notamment présente en Afrique et en Océanie ont dû céder aux arguments et aux dents de leurs bien-aimées. La politique du coït interrompu chère à ces dames est une manière de s'assurer que plus d'un mâle féconde ses oeufs: seul le tiers du sperme d'un mâle est transféré avant que l'arachnide ne soit mangé. Une plus grande variété de matériel génétique donne de meilleures chances de survie à l'espèce.

C'était sans compter l'obsession de l'évolution et des hommes pour le sexe. Pour éviter l'interruption importune, les mâles ont trouvé la solution parfaite: l'ablation des organes génitaux pendant la copulation. Selon des chercheurs de l'Université nationale de Singapour, cités dans le plus récent numéro de la revue scientifique Nature, les Nephilengys malabarensis coupent leur bulbe copulateur dès son insertion dans l'épigyne de la femelle afin que le transfert de leur sperme se poursuive au moment où ils s'emploient à échapper aux avances charnelles de leur amoureuse.

Mais les avantages ne s'arrêtent pas là. Les Nephilengys malabarensis sont jaloux de leur femelle, et le bulbe copulateur détaché joue aussi le rôle de ceinture de chasteté. Impossible pour un autre mâle de féconder une femelle qui a un bulbe implanté dans l'épigyne. Surtout pendant que les eunuques veillent au grain et attaquent férocement tout prétendant. Leurs bijoux de famille sacrifiés, ces araignées n'hésitent pas à combattre à mort. Elles n'ont littéralement plus rien à perdre.

Architecture arachnéenne

Comment font les toiles d'araignée pour résister aux plus fortes intempéries? D'après Markus Buehler, de l'Institut de technologie du Massachusetts (MIT), le secret de la toile d'araignée réside dans la capacité de sa soie à s'adapter à différentes situations. Lorsqu'une toile est secouée par une légère brise, les brins de soie conservent leur flexibilité pour laisser l'énergie se dissiper. Mais lorsqu'un stress plus grand comme un coup de vent menace de détruire la toile, les fils de soie les plus touchés se rigidifient et se rompent pour limiter les dégâts. Il est donc plus facile de réparer la toile que de la reconstruire.

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Un oeil qui en vaut deux

Alors que la rétine humaine ne possède qu'une seule couche de cellules photosensibles, les araignées sauteuses en possèdent quatre. Elles servent à percevoir la lumière ultraviolette et la lumière verdâtre. Mais en raison de la distance qui les sépare, seule une couche peut voir une image avec netteté. Ce fait en apparence anodin a longtemps laissé les chercheurs perplexes: pourquoi avoir plusieurs rangées de cellules photosensibles si elles procurent une vision floue?

Une équipe de l'Université d'Osaka a testé les capacités des araignées d'attraper leurs proies sous différentes lumières. L'humain a besoin de ses deux yeux pour percevoir la profondeur. Mais chez l'araignée, les chercheurs ont découvert que chaque oeil arrive à percevoir la profondeur en comparant l'image floue avec l'image nette.