Les ébats sexuels des ancêtres de l'homme moderne avec les Néandertaliens et les Dénisoviens, des cousins anciens aujourd'hui éteints, ont permis aux humains d'hériter de gènes qui ont dopé leur système immunitaire, selon une recherche publiée jeudi aux États-Unis.

Ce groupe de gènes, appelés HLA, joue un rôle essentiel pour que notre organisme reconnaisse et détruise des pathogènes, explique Laurent Abi-Rached, un chercheur français à la faculté de médecine de l'Université Stanford, principal auteur de ces travaux parus dans la version en ligne de la revue Science.

Ces gènes comptent parmi les plus variables et adaptables dans notre génome car l'évolution rapide des virus nécessite une capacité de réaction et d'adaption rapide, explique-t-il.

Les homos sapiens, les Dénisoviens et les Neandertaliens se sont séparés il y a 400 000 ans environ. Dénisoviens et Néandertaliens ont émigré hors du continent africain, les premiers en Europe et dans l'ouest de l'Asie tandis que les seconds se sont dirigés vers l'Asie de l'Est.

Quant aux ancêtres de l'homme d'aujourd'hui, ils sont sortis d'Afrique il y a seulement 65 000 ans pour aller en Eurasie où ils ont rencontré leurs cousins Dénisoviens et Néandertaliens avec qui ils ont eu des rapports amoureux pour le plus grand bien de l'humanité.

«Ces croisements n'ont pas été que des événements fortuits sans conséquence, ils ont apporté quelque chose d'utile au patrimoine génétique de l'homme moderne», commente Peter Parham, professeur de biologie à l'Université Stanford, qui a dirigé la recherche.

En comparant les gènes HLA de l'homme moderne et de ces deux cousins disparus, les chercheurs ont pu déterminer que des variantes venaient probablement de croisements avec des Dénisoviens.

On sait peu de choses de ces cousins mis au jour à Denisova en Russie en 2010, puisque l'os d'un doigt et une dent en sont les seuls fossiles connus. Mais le séquençage du génome fait à partir de l'ADN extrait de l'os a permis de déterminer quand des croisements se sont produits avec les humains.

Le transfert de gènes des Dénisoviens aux hommes modernes a laissé la plus forte fréquence d'une variante des gènes HLA (HLA-B) dans les populations d'Asie occidentale, l'endroit le plus probable où des accouplements occasionnels entre humains et Dénisoviens se sont produits.

D'autres variantes du groupe de gènes HLA (HLA-A) représentent jusqu'à 64% de ces gènes dans les populations d'Asie de l'Est et d'Océanie, avec la plus forte fréquence en Papouasie Nouvelle-Guinée.

Un scénario similaire avec certains autres types du gène HLA ont été trouvés dans le génome de l'homme de Neandertal dont l'ADN, extrait d'ossements anciens, a également été séquencé.

Ces variantes sont très fréquentes chez les Européens et les Asiatiques mais rares chez les Africains, relèvent les chercheurs. Selon eux, la moitié de ces variantes du gène HLA ont été héritées des croisements avec les Néandertaliens et les Dénisoviens. Pour les Asiatiques cette proportion atteint 80% et 95% chez les Papouasiens.

«Le système de gènes HLA avec sa diversité de variantes est un peu comme une loupe» car il fournit beaucoup plus de détails sur l'histoire des populations que les familles typiques de gènes, souligne Laurent Abi-Rached.

Le séquençage partiel du génome du Neandertalien montre que certains humains modernes ont hérité jusqu'à 4% des gènes de ce cousin disparu il y a un peu plus de 30 000 ans. Pour le Dénisovien, cette proportion héritée atteint 7%, selon les résultats du séquençage de l'ADN terminée en décembre dernier.