Puisque les stimulants cérébraux sont prescrits illégalement aux bien-portants, autant le faire dans les règles de l'art. C'est en substance ce que recommandent des experts anglo-saxons qui plaident pour le droit à les utiliser, tout en insistant sur la nécessité d'approfondir les recherches et de contrôler les risques.

Pour travailler, les étudiants prennent des traitements stimulants de façon illégale, notamment de la Ritaline, un traitement dont la demande est en train d'augmenter, soulignent ces spécialistes dans un éditorial publié sur le site en ligne de la revue «Science».

«Nous devrions accueillir favorablement l'arrivée de nouvelles méthodes de stimulation cérébrale», et ce type de pilules n'est pas un traitement moralement plus répréhensible que de bien manger ou de bien dormir, ajoutent-ils.

Alors que de plus en plus de pilules stimulantes pour le cerveau apparaissent, la demande augmente elle aussi fortement, notamment parmi les personnes d'une cinquantaine d'années qui veulent conserver la jeunesse de leur mémoire et les travailleurs polyvalents. «Presque tout le monde va vouloir les utiliser», observe Martha Farah, neuro-scientifique à l'université de Pennsylvanie.

«Je voudrais être le premier sur la liste, si des médicaments efficaces et sans danger étaient mis au point, qui détrônent la caféine», confie pour sa part un autre auteur de l'éditorial, Michael Gazzaniga, de l'Université de Californie.

Parmi les sept auteurs, originaires des États-Unis et de Grande-Bretagne, figurent des experts en éthique, le rédacteur en chef de Nature et des scientifiques. Ils ont présenté leurs travaux lors d'un séminaire soutenu par la revue et l'université Rockefeller de New York.

Quelques experts sanitaires s'accordent à dire que la question mérite attention. Pas Leigh Turner, du centre de bioéthique du Minnesota, qui y voit «un bon plaidoyer pour la vente de médicaments à des gens qui ne souffrent d'aucune maladie».

L'éditorial cite une étude datant de 2001 menée sur 11 000 étudiants américains. Elle fait apparaître que 4% d'entre eux ont déjà bénéficié d'une prescription illégale de stimulants dans l'année qui a précédé. Un pourcentage qui atteignait 25% dans certains cas. «C'est un crime, mais c'est ce qui est pratiqué», selon Martha Farah.

Les stimulants Adderall et Ritaline sont le plus souvent prescrits pour ceux qui souffrent d'un déficit de l'attention/hyperactivité, mais ils peuvent très bien en aider d'autres à fixer leur attention et à retenir les informations, soulignent les experts dans leur commentaire.

Un autre médicament, le Provigil, a reçu l'autorisation de mise sur le marché (AMM) pour les troubles du sommeil, mais est aussi prescrit pour les personnes en bonne santé qui doivent rester en forme en dépit du manque de sommeil, ajoute l'éditorial. Des études menées en laboratoire montrent que ce médicament peut aussi stimuler les cerveaux de gens bien reposés. Et certaines molécules dédiées à la maladie d'Alzheimer fournissent une légère stimulation de la mémoire.

En parallèle à leur désir de voir les bien-portants prendre des stimulants cérébraux, les auteurs soulignent la nécessité de conduire une recherche sur le rapport bénéfice/risques de ces médicaments. On sait peu de choses à leur sujet, notamment sur le risque de dépendance qu'ils peuvent entraîner. Selon la FDA, Adderall, par exemple, est une amphétamine qui peut provoquer une mort subite, un infarctus ou un accident vasculaire cérébral, en particulier chez les personnes présentant des troubles cardiaques.