Les plaquettes sanguines seraient bien plus que de simples éléments sanguins sans noyau. En plus de leur incontournable rôle joué lors de la cicatrisation des plaies, elles possèderaient une richesse génétique jusqu'alors insoupçonnée.

C'est ce que soutiennent des chercheurs québécois qui viennent de mettre en évidence la présence de microARN, de minuscules séquences d'acides ribonucléiques ou copies d'ADN non codantes au sein des plaquettes sanguines humaines (voir encadré).Or, les microARN jouent un rôle crucial dans les cellules en régulant la synthèse des protéines. Et on en retrouve un très grand nombre dans les plaquettes sanguines. « Ils sont nombreux et couvrent un large spectre en terme de diversité, ce qui permet de suggérer leur implication dans la régulation des protéines indispensables à la vie», relève Patrick Provost, chercheur au département de microbiologie-infectiologie et immunologie à la faculté de médecine de l'Université Laval.

En raison de leur rôle et leur importance au sein des cellules, cette équipe de recherche soupçonne qu'ils pourraient être impliqués dans l'incidence de nombreuses maladies génétiques, dont le cancer et le retard mental, les maladies neurodégénératives et infectieuses.

La particularité des plaquettes à former des agrégats jouerait aussi un rôle central dans les maladies cardiovasculaires de nature obstructive, telles que l'infarctus du myocarde et les accidents vasculaires cérébraux (AVC).

Le nombre de ces maladies, qui sont des causes importantes de mortalité dans les pays industrialisés, pourrait un jour chuté si l'on apprend à réguler les protéines en cause dans ces phénomènes d'agrégation plaquettaire. Mais pour cela, il faudra que les chercheurs parviennent d'abord à mieux comprendre le rôle et l'importance des microARN au sein des plaquettes.

Les résultats de cette recherche ont été publiés dans un récent article de la revue scientifique Nature Structural and Molecular Biology.

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Indispensables microARN

L'expression génique et le contrôle des protéines seraient le fruit d'une machinerie plus complexe qu'on ne le soupçonnait il y a à peine 10 ans. Les gènes contenus dans le génome des mammifères sont transcrits à partir de l'ADN en ARN messagers (ARNm), qui sont eux-mêmes traduits en protéines.

Cette version simplifiée s'est cependant drôlement complexifiée avec la découverte des microARN en 2001. Agissant au niveau des ARNm, les microARN auraient pour rôle biologique de réguler la traduction des protéines, principalement en les réprimant. Cette nouvelle famille d'ARN permettrait donc la fine modulation de l'expression des gènes.

Une étude récente avait émis l'hypothèse que les microARN pourraient être impliqués dans la régulation de près de 90% des gènes chez l'humain.

En régulant cette traduction des protéines, ils pourraient ainsi contrôler l'ensemble des processus se déroulant chez l'homme : du développement de l'embryon à la formation des cellules sanguines, la sécrétion d'insuline ou encore le maintien de la fonction des principaux systèmes, dont nerveux central, cardiaque et immunitaire.