Certaines personnes ne pouvant ni bouger ni parler après un accident seraient en mesure de réfléchir et de communiquer par la pensée. Les résultats d'une étude parue mercredi dans le New England Journal of Medicine pourraient ainsi changer la donne dans le débat sur l'euthanasie.

Selon l'étude menée au Royaume-Uni et en Belgique, cinq patients qui se trouvaient dans un état végétatif à la suite d'un traumatisme crânien ont manifesté des signes de conscience, en réponse à des indications vocales. De plus, un homme de 29 ans dans cet état depuis cinq ans a réussi à répondre correctement à des questions, en faisant des tâches mentales. Le tout a été détecté au moyen de l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle.

 

La découverte de cette «voix intérieure» pourrait remettre en question le sort de milliers de patients qui sont dans un état végétatif. «Pour la première fois en cinq ans, on donne à un des ces patients la possibilité de communiquer avec le monde extérieur», a affirmé Adrian Owen, un des coauteurs de l'étude, en entrevue au Daily Telegraph.

En tout, 23 des 54 sujets de l'étude étaient dans un état d'éveil inconscient. Ils ne pouvaient absolument pas parler ni bouger. On a utilisé l'imagerie afin de visualiser leur activité cérébrale, pendant qu'on leur demandait de faire deux tâches mentales. Celles-ci activent deux régions distinctes du cerveau.

Les auteurs de l'étude, issus de l'Université de Cambridge et de l'Université de Liège, entrevoient la mise au point d'un moyen de communication qui améliorerait la vie du patient.

«Savoir ce qui se passe dans le cerveau de ces patients, c'est quelque chose qu'on essaie de faire depuis longtemps. Est est-ce que ces gens-là vont s'améliorer? Est-ce que ça vaut la peine de continuer à les traiter? On s'attend bien sûr à ce que cette découverte rouvre le débat éthique sur la question», a précisé au téléphone la Dre Jeanne Teitelbaum, neurologue à l'Institut neurologique de Montréal de l'Université McGill.

Les limites de l'étude

Celle-ci émet toutefois des réserves sur la portée de l'étude. «Savoir qu'un cerveau endommagé d'une personne dans cet état est capable de visualisation, c'est une découverte très importante. Mais de là à dire que ces gens sont en mesure de répondre à des questions qui permettent de prendre des décisions éthiques, de vie ou de mort, c'est autre chose. Il reste beaucoup de travail à faire.» La neurologue souligne également que la recherche ne concerne que les traumatismes crâniens.

«C'est une découverte excitante, affirme quant à lui le Dr Serge Dulude, directeur adjoint à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Si vraiment on peut valider que ces patients ont une pensée structurée, ce serait un outil qui pourrait servir aux médecins, dans la prise de décision qui se fait avec la famille du patient. On pourrait tenir compte de l'avis de la personne. Mais en même temps, il ne faut pas alimenter de faux espoirs chez les membres de la famille avec des résultats comme ceux-là.»