Des chercheurs montréalais ont réussi à raviver l'acuité du cerveau de patients atteints de signes précurseurs de la maladie d'Alzheimer. Dix séances d'entraînement de la mémoire ont suffi pour cet exploit, qui pourrait retarder de deux ou trois ans l'apparition des symptômes.

«C'est un progrès considérable», explique Sylvie Belleville, chercheuse en neuropsychologie à l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal et auteure principale de l'étude, parue dans la revue Brain. «Leurs performances ont augmenté de 20 à 30% pour devenir semblables à celles des gens normaux. On pourrait espérer gagner deux ou trois ans dans la progression de la maladie.» Les médicaments contre l'Alzheimer permettent déjà de retarder de trois ou quatre ans cette progression.

L'intervention a consisté à deux semaines de rencontres quotidiennes, à raison de deux heures à la fois, sur des stratégies d'optimisation de la mémoire. «On suggérait par exemple d'avoir recours à des images, à des associations sémantiques. Pour vous souvenir de mon nom, par exemple, vous pourriez penser à la «belle ville» de Montréal. L'objectif est d'encourager le cerveau à utiliser des secteurs qui ne sont pas encore endommagés par la maladie.»

Trois séances d'imagerie médicale, avant et après l'intervention auprès des 30 participants à l'étude, ont permis de confirmer que l'intervention permet de stimuler d'autres zones du cerveau. «Nous allons maintenant voir si l'amélioration se maintient ou s'il faut refaire des formations une ou deux fois par an», dit Mme Belleville, qui enseigne à l'Université de Montréal.

L'approche découle de deux avancées dans la compréhension de la maladie: des tests cognitifs qui permettent de détecter les personnes les plus à risque et les travaux sur des patients qui n'avaient aucun symptôme d'Alzheimer avant leur mort mais dont le cerveau est tout de même endommagé par la maladie. «Souvent, ce sont des gens très intellectuels et très actifs au plan cognitif, dit Mme Belleville. Leur cerveau est capable de trouver des stratégies pour compenser les dommages causés par l'Alzheimer.»

Les tests de dépistage précoce ratissent pour le moment trop large - environ la moitié des cas à risque ont un diagnostic d'Alzheimer dans les trois années qui suivant le test, et ce taux plafonnera probablement à 70% à 80%, selon Mme Belleville. Mais comme l'intervention n'est pas invasive, le jeu en vaut la chandelle.