Il y a 200 ans, le 12 février 1809, naissait Charles Darwin. La Grande-Bretagne et d'autres pays rendent à cette occasion hommage au célèbre naturaliste anglais dont la théorie de l'évolution des espèces a changé profondément la pensée scientifique, même si ses travaux restent contestés par les créationnistes.

Plus de 300 manifestations sont prévues en Grande-Bretagne, où le visage de Darwin côtoie celui de la reine Elizabeth II sur les billets de dix livres sterling. Sa ville de naissance, Shrewsbury, dans le centre de l'Angleterre, organise ainsi un festival en son honneur. Et une exposition permanente recréant certaines de ses expériences les plus célèbres s'ouvre à Down House, son ancienne résidence dans la région de Londres.

De nombreux événements sont également prévus dans le monde pour marquer la naissance de Darwin, comme l'émission d'une pièce de monnaie commémorative en Australie ou encore le Second sommet mondial sur l'évolution qui se tiendra aux îles Galapagos en août.

Même les adversaires idéologiques de Darwin, qui défendent une vision «biblique» de la création des espèces, reconnaissent en Darwin un géant de la science moderne. «Il a été quelqu'un d'extrêmement important, sa pensée a changé le monde», concède Paul Taylor de «Réponses dans la Genèse», organisation qui rejette la théorie de l'évolution et prône une interprétation littérale de la Bible. «Nous sommes en désaccord avec ses conclusions, mais c'était un observateur aigu et il y a beaucoup de choses pour lesquelles on doit lui être reconnaissant.»

La publication en 1859 de «L'Origine des espèces», où il présente sa célèbre théorie, a révolutionné la pensée scientifique tout en suscitant une opposition qui persiste encore aujourd'hui.

Prudent, Darwin a attendu avant de publier son livre. D'abord pour ne pas heurter son épouse, Emma, une femme très croyante, mais aussi parce qu'il était conscient que l'idée selon laquelle l'homme descendait d'autres animaux était très controversée, explique Bob Bloomfield, du Muséum d'histoire naturelle de Londres. Le naturaliste ne voulait pas présenter une simple hypothèse, mais une véritable explication corroborée par de nombreux faits et observations.

«Il savait qu'il devait présenter un argumentaire en béton pour sa théorie», souligne M. Bloomfield. «Il a été l'un des premiers vrais scientifiques, en ce sens que tout ce qu'il était disposé à publier devait s'appuyer sur des preuves.»

Ses petits cahiers manuscrits sont exposés au Muséum d'histoire naturelle ainsi que des milliers de spécimens collectés par ses soins. Certains ont été récoltés lors de son fameux voyage de cinq ans en Amérique du Sud à bord du «Beagle». Un périple durant lequel il a visité les Galapagos et observé comment des espèces s'étaient adaptées aux conditions particulières de leur environnement.

Ce sont ces cahiers qui offrent le meilleur aperçu de la personnalité de Darwin, affirme Ruth Padel, l'un de ses 72 arrière-arrière-petits-enfants. «Il se demandait toujours, «comment ça marche?'» et cela l'a conduit à ses découvertes, explique sa descendante, une poétesse de renom.

Après son mariage, il fait appel à des membres de sa famille pour l'aider dans ses recherches. Il demande ainsi à son épouse de jouer du piano pour des vers de terre placés dans un pot à l'intérieur de l'instrument afin de voir s'ils réagissaient à la musique (il n'a constaté aucune réaction).

Selon Stephen Keynes, un arrière-petit-fils de Darwin, le naturaliste a également confié un jour à ses propres enfants la mission de jeter de la farine sur des abeilles dans le but de rendre plus visible la trajectoire de leur vol. Aucun des jeunes assistants n'a semble-t-il été piqué par les insectes. «C'était le plus merveilleux des pères», précise M. Keynes, 81 ans. «Il laissait ses enfants accéder à la pièce où il travaillait.»

Il visitait fréquemment le Zoo de Londres, où il avait «sympathisé» avec un orang-outang femelle baptisée Jenny. Il lui a donné un harmonica et lui a montré son reflet dans le miroir. Il a également remarqué que, lorsque son gardien refusait de lui donner une pomme, elle boudait comme un enfant. Ces observations l'ont aidé à développer sa théorie sur la filiation entre l'homme et les primates dans l'histoire de l'évolution.

Même affaibli par la maladie, à la fin de sa vie, il restait curieux. «Il regardait les plantes s'orienter vers la lumière passant par la fenêtre et se demandait «comment font-elles?'», raconte Mme Padel. «Il pensait sans cesse aux liens entre les choses et cela l'a conduit à comprendre le processus de sélection naturelle.» S'il était vivant aujourd'hui, il étudierait probablement l'ADN et le système immunitaire, ajoute-t-elle.