(Saint-Eustache) Il était une fois un enfant soucieux de l’environnement qui pêchait des déchets. Voici la prémisse du récit fictif que l’autrice Émilie Demers souhaitait raconter. Or, avant de coucher sur papier le fruit de son imaginaire, elle a eu une surprise en effectuant des recherches sur le web : ce jeune existe !

Son nom : Raphaël de Fages de Latour. Depuis l’âge de 9 ans, ce Parisien retire des déchets métalliques de la Seine grâce à une corde et à un aimant qu’il s’amuse à lancer dans le cours d’eau.

Dans les dernières années, l’adolescent de 13 ans a fait l’objet de nombreux reportages, principalement en France, et est depuis peu le héros d’un livre pour enfants, Le pêcheur à l’aimant.

En effet, l’autrice Émilie Demers a tellement été inspirée par l’initiative du garçon qu’elle a contacté sa famille pour avoir la permission de raconter son histoire. « Je suis allée voir toutes ses entrevues, toutes les informations à son sujet. J’ai tout lu sur la pêche à l’aimant. J’étais fascinée », se souvient-elle.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

L’autrice Émilie Demers

Raphaël de Fages de Latour admet avoir trouvé la proposition de l’autrice « cool », mais ne pensait pas que le projet prendrait cette ampleur.

Or, grâce à ce livre, il est de passage au Québec pour la première fois de sa vie.

Partie de pêche

C’est sur un pont de bois enjambant la rivière du Chêne, dans le Vieux-Saint-Eustache, que La Presse le rencontre. Pourquoi ce point de rendez-vous ? Pour une partie de pêche à l’aimant, bien entendu.

Après avoir enfilé ses gants, fixé la corde à la structure du pont, le jeune prend l’aimant et le lance dans l’eau. Le tout, sous les encouragements de Steve Dufour, amateur québécois de pêche à l’aimant qui lui prête l’équipement.

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Lancer de l’aimant

Alors qu’il remonte tranquillement cette drôle de canne à pêche, Raphaël de Fages de Latour explique à La Presse comment est née sa passion : « Je regardais YouTube et je suis tombé sur un youtubeur qui faisait de la pêche à l’aimant. Du coup, j’ai eu envie de faire pareil. À l’époque, j’ai demandé au père Noël un aimant et une corde. »

Lors de sa première pêche, il a sorti des eaux, avec l’aide de son père, Alexandre de Fages de Latour, un panier d’épicerie et des briques. Encouragé par cette récolte, il a répété l’expérience.

Tous les week-ends jusqu’à tout récemment, ils se sont rendus sur le bord de la Seine ou du canal de l’Ourcq pour extraire des objets de l’eau. « Au début, c’était surtout pour le fun. Rapidement, c’est devenu dans l’optique de dépolluer », confie celui que l’on surnomme Raf sur Seine.

Ses trouvailles au fil des années sont impressionnantes : des vélos, des trottinettes, des clous par milliers, des coffres-forts, des pièces automobiles, des lampes…

« On a pêché des revolvers, des carabines de la Seconde Guerre mondiale, une baïonnette de 1794… », énumère Alexandre de Fages de Latour, qui précise que, dans ces cas-là, ils préviennent les autorités.

Curiosité et entraide

Un jour, le duo père-fils a même extirpé des eaux une machine à laver. Pour y arriver, Raphaël et Alexandre de Fages de Latour n’étaient pas seuls. Des dizaines de passants ont mis la main à la pâte. Cette très lourde prise leur a résisté pendant quatre heures.

  • Quelques prises de la journée : un clou…

    PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

    Quelques prises de la journée : un clou…

  • … et une lame de patin.

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    … et une lame de patin.

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Sur le pont piétonnier du Vieux-Saint-Eustache, l’activité de pêche un brin insolite attire d’ailleurs l’attention des passants. Les prises de l’après-midi ne sont toutefois pas très surprenantes. On trouve dans le grand seau de Steve Dufour des clous, quelques barres de métal et une vieille lame de patin à glace. Au Québec, les hameçons et les clous sont les objets les plus souvent pêchés, précise-t-il.

Le parcours de Raphaël de Fages de Latour a déjà influencé d’autres jeunes qui, à leur tour, ont commencé à dépolluer des cours d’eau. « On se multiplie au fil du temps », se réjouit-il.

Il espère que son message résonnera davantage grâce au livre d’Émilie Demers.

« Raphaël le dit souvent : il n’y a pas d’âge pour agir », conclut son père, une lueur de fierté dans les yeux.

Le pêcheur à l’aimant

Le pêcheur à l’aimant

Éditions Alaska

Dès 4 ans

La pêche à l’aimant au Québec

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Steve Dufour à l’œuvre

Envie d’essayer la pêche à l’aimant ? En plus de s’équiper d’un bon aimant et d’une corde, il est important de porter des gants. « On manipule des objets rouillés », souligne Steve Dufour, adepte de la pêche à l’aimant. « Il y a la décontamination qui est importante aussi. […] Chaque fois que je fais de la pêche à l’aimant, je lave mon équipement. » Il est également préférable de demander l’autorisation au propriétaire du lieu avant de pêcher, croit-il. On peut trouver de nombreux autres conseils sur le groupe Facebook « Pêche à l’aimant Québec », qui compte plus de 3500 membres.