Cela fait à peine deux mois et déjà, vos bonnes résolutions se sont envolées en fumée ? Cessez de vous autoflageller. Place, plutôt, à l’autocompassion. Explications de ce concept clé en santé mentale, en six temps.

Définition

« L’autocompassion, résume Martine Vaillancourt, cofondatrice d’Autocompassion Montréal, c’est se traiter comme on traiterait son meilleur ami. » L’ergothérapeute et psychothérapeute a étudié l’autocompassion avec Kristin Neff, professeure à l’Université du Texas à Austin, pionnière dans le domaine. « La recherche nous dit que quand on s’autoflagelle, ça n’aide pas. On s’envoie en fait une deuxième flèche. » Mieux vaut au contraire se traiter avec « la meilleure des gentillesses ». Une proposition beaucoup plus facile à dire qu’à faire. À preuve : « 78 % des gens ont plus de compassion pour les autres que pour eux-mêmes », dit-elle, notamment les femmes, à 84 % (72 % pour les hommes). À noter que Kristin Neff a consacré un livre complet à ce sujet : Fierce Self-Compassion (L'autocompassion sans compromis - les clés pour s'affirmer, s'imposer et s'épanouir, soit comment les femmes peuvent maîtriser la gentillesse pour prendre la parole, revendiquer leur force et briller).

L'autocompassion sans compromis - les clés pour s'affirmer, s'imposer et s'épanouir

Autocompassion et pleine conscience

Pour se traiter avec gentillesse, encore faut-il comprendre qu’il y a enjeu. Reconnaître qu’on souffre. Et c’est ici qu’entre en jeu la pleine conscience. Vous fumez en cachette, vous avez échoué votre défi sans alcool et vous vous trouvez minable ? « Wo ! Qu’est-ce qui se passe avec moi ? illustre Martine Vaillancourt. Il faut accueillir ce qui est là. Parce que si j’accueille, je pourrai ensuite prendre de meilleures décisions. »

Une humanité partagée

Toujours dans cette idée de reconnaître l’enjeu et la souffrance, il n’est pas fou de réaliser qu’on n’est sans doute pas seul dans cette galère. C’est ce que Martine Vaillancourt, en paraphrasant Kristin Neff (Self-Compassion, The Proven Power of Being Kind to Yourself, en français, S'aimer: se réconcilier avec soi-même, soit le pouvoir démontré d’être gentil avec soi), qui s’inspire à son tour de la philosophie bouddhiste, appelle l’« humanité partagée ». À cet effet, et si cela peut vous consoler, un sondage de Forbes révèle que la majorité des résolutions s’envolent en deux à quatre mois. Au bout d’un an, seule 1 résolution sur 100 est toujours d’actualité.

Consultez le sondage de Forbes (en anglais)

Autocompassion et estime de soi

Cela tombe sous le sens : qui dit autoflagellation dit jugement, critique, évaluation, bref, attaques variées et de toute part à l’estime de soi. Le tout conditionné par les différents succès et échecs, ou hauts et bas de la vie. Inversement : « L’autocompassion n’est pas une évaluation, souligne Martine Vaillancourt. On se soutient quand on a une période difficile. On se soutient quand on vient d’échouer. » À noter qu’à nouveau, tout cela est nettement plus facile à dire qu’à faire. « Ça s’apprend », insiste celle qui offre une formation d’une trentaine d’heures sur le sujet. Il n’y a pas de trucs, encore moins de secrets : « Ce n’est pas de la psychopop ! », précise-t-elle.

Autocompassion et honte

Intimement lié ici : le sentiment de honte. « C’est une des émotions qui font le plus peur aux gens et elle n’est souvent pas tant abordée en psychothérapie », déplore Martine Vaillancourt. « Or, tous les humains vivent cette émotion », dit-elle, quoiqu’à différents degrés. Si vous avez été élevés dans une famille aimante (ou caring, en bon français), sans doute serez-vous moins vulnérable. « Mais si vous avez vécu avec des gens tough qui exigeaient une performance, quand vous ne vous sentirez pas à la hauteur, la honte sera plus présente. » Une bonne dose d’autocompassion vous aidera à « accueillir » l’échec, pour mieux rebondir. « Si je m’aime, je vais être capable de me donner la main. »

Autocompassion et liberté

L’autoflagellation est un cercle vicieux : on se juge, on trouve qu’on est nul, puis on a honte, et ainsi de suite. Inversement, avec l’autocompassion, on est plus « doux » avec soi-même, on se traite comme on traitrait son enfant, ou un meilleur ami, on l’a dit, avec toutes ses failles et imperfections. Or, qui dit imperfections dit aussi authenticité. « Et quand on est authentique, on s’apprécie comme on est, conclut Martine Vaillancourt. Et c’est là qu’on se sent beaucoup plus libre ! » Que demander de mieux ?

Lisez « Éloge du vice »