(MONTRÉAL) Avec la propagation fulgurante du variant Omicron, c’est une question que risquent de se poser plusieurs personnes qui se réveilleront un matin avec un grattement dans la gorge, un peu de fièvre et une toux agaçante : est-ce que je pourrais faire quelque chose pour stimuler mon système immunitaire et me débarrasser du virus plus rapidement ?

La réponse courte : non, à part récolter les dividendes de saines habitudes de vie qui auront été adoptées il y a belle lurette plutôt que le jour même de l’apparition des symptômes.

« Les évidences que les suppléments (offerts en pharmacie ou sur internet) peuvent stimuler le système immunitaire pour nous protéger, que ce soit du cancer ou que ce soit des infections incluant la COVID, je pense que ce n’est pas très convaincant, pour être bien honnête », a estimé le docteur André Veillette, qui est immunologue à l’Institut de recherches cliniques de Montréal.

D’autant plus, rappelle-t-il, que la réponse immunitaire n’est pas monolithique et qu’elle est plutôt constituée de plusieurs composantes. On peut donc se demander quelle phase de la réponse immunitaire, par exemple, ces suppléments se proposent de stimuler.

La professeure Caroline Richard, une spécialiste du lien entre l’alimentation et le système immunitaire à l’Université de l’Alberta, abonde dans le même sens en rappelant que « l’alimentation globale a probablement plus d’effet que des suppléments (ou seulement) un nutriment ».

« C’est sûr que ce n’est pas très sexy pour les gens qui cherchent des solutions simples », a-t-elle admis. Le système immunitaire, poursuit-elle, utilise toutes les vitamines et tous les minéraux dans notre alimentation pour être efficace.

Les nutriments dont l’effet bénéfique pour le système immunitaire est le mieux documenté dans la littérature scientifique sont les oméga-3 de source marine (donc ceux qui proviennent de poissons gras comme le saumon ou le maquereau). L’effet anti-inflammatoire des oméga-3 est bien documenté, et une réduction de l’inflammation permettrait ensuite au système immunitaire de fonctionner à pleine vapeur.

Autrement, les effets bénéfiques de suppléments de vitamines ou de minéraux seront principalement constatés chez des populations dont l’alimentation n’est pas optimale, a dit Mme Richard.

« Si les gens sont déficients en une vitamine, donc si de façon générale ils n’en consomment pas assez dans leur alimentation puis qu’on supplémente en cette vitamine-là, souvent on peut voir des effets bénéfiques, a-t-elle expliqué. Par contre, la plupart des gens, et surtout en Amérique du Nord, ne sont pas vraiment déficients en vitamines et minéraux. »

Il en va donc de la santé du système immunitaire comme il en va de la santé en général : bien manger, bien dormir, faire de l’activité physique, ne pas fumer et boire de l’alcool en modération sont autant de facteurs de succès.

Et même s’il n’est jamais trop tard pour bien faire, il est inutile (ou presque) d’adopter ces bonnes habitudes au moment où les symptômes apparaissent, prévient Mme Richard, qui dit très bien réaliser que « ce n’est pas ce que les gens veulent entendre ».

« Il faut consommer (les oméga-3) de façon chronique parce que les oméga-3 vont être incorporés dans la membrane cellulaire de toutes nos cellules, a-t-elle expliqué. Ça prend un petit peu de temps, donc ce n’est pas du jour au lendemain, si on commence à prendre des oméga-3, qu’on va observer directement les effets. »

Les nutriments hydrosolubles (comme les vitamines) peuvent avoir un effet plus instantané dans l’organisme, tandis que les nutriments liposolubles doivent être consommés tous les jours pour générer des bienfaits, a-t-elle précisé.

Si on a une alimentation équilibrée, il n’est pas évident qu’on a besoin de suppléments, « mais c’est un gros marché et ça rapporte des milliards de dollars », a dit le docteur Veillette.

« J’ai des membres de ma famille qui prennent des vitamines, je ne m’obstine pas avec eux quand ils me disent ça, mais j’ai hâte qu’ils passent à un autre sujet », a-t-il conclu en riant.