La petite vie, Piment fort, Passe-partout… Toutes des émissions ayant connu de nouvelles moutures pour combler les nostalgiques ou pour faire connaître à de nouvelles cohortes des classiques d’autrefois. Pour le meilleur et pour le pire.

Dans le contexte, et en soulignant le 15e anniversaire de la mort de 110 %, impossible de ne pas évoquer, ou du moins de ne pas imaginer, à quoi pourrait ressembler une version mise à jour en 2024.

Une relecture de 110 % pourrait-elle être viable dans le contexte télévisuel et social actuel ?

« 110 % s’appellerait peut-être 80 % », note Rivard.

Si elle avait à revenir, l’émission serait plus douce, pense l’animateur. « À cause des conglomérats. Est-ce que tu le ferais à Noovo ? Non, parce que c’est le jumeau de RDS en raison de Bell. À TVA ? Ils ont les droits du Canadien. Alors le prochain 110 %, ce sera une émission balado, avec n’importe qui qui n’aura aucune attache et qui ne se verra jamais donner l’accès à la galerie de presse. »

Même son de cloche pour Bergeron. La tyrannie de l’unanimité et de la gentillesse absolue, en ondes, tuerait le produit. « Parfois, ça avait l’air de discussions de taverne, mais maintenant, on empêche ça. Dans des émissions où il y a quatre ou cinq intervenants, on ne veut pas que les esprits s’échauffent. »

Mais si on revenait dans les mêmes paramètres et avec la même liberté ? « Je pense que ça marcherait encore. »

Pour François Gagnon, tout dépendrait des intervenants choisis. « Ça fonctionnerait, juste si les personnages sont aussi efficaces. Ce n’est pas juste la tribune comme telle. C’est ceux qui sont là. »

La rivalité et l’historique entre les débatteurs faisaient à son avis partie intégrante du succès de l’émission. Pour un retour réussi, il faudrait trouver des analystes aussi passionnés, dévoués, mais surtout, prêts à déplaire.

« Au début, Michel Villeneuve, je me levais pour le haïr, ajoute Gagnon. Quand je savais que j’allais le voir le soir, je préparais ça comme si je me préparais à aller à un combat de boxe. C’est la même chose avec [Enrico] Ciccone et la même chose avec Bergy. Il y avait des conflits sur nos idées, mais aussi des rivalités personnelles. Montrer à Villeneuve qu’il avait tort et que j’avais raison, c’était quelque chose d’important pour moi. »

Plus encore, sans chercher à cliver, les débatteurs devaient être conscients des répercussions de leurs propos. Aujourd’hui, ces montées à l’emporte-pièce parfois très sévères autrefois appréciées des téléspectateurs pourraient être un frein à une nouvelle mouture, selon Gagnon.

« L’auditoire d’aujourd’hui, avec ce qu’il est devenu, avec la sensibilité – entre guillemets – excessive, empêcherait 110 % de prendre l’ampleur que ça a prise. Parce que ça prend des débordements un peu là-dedans. Il faut que les personnalités puissent être représentées dans un débat comme ça. C’est ça, la nature de ces émissions-là. Quand tu réussis à te faire écouter par ceux qui te haïssent et qui te contestent, tu es assuré du succès. L’indifférence tue. Que ce soit dans les sports, dans les arts, en politique. »