«On commence à "puncher" hein?» Marie-Pier Boudreau-Gagnon arrivait fraîchement du Brésil avec ses coéquipières de l'équipe canadienne de nage synchronisée. Elles ont à peine eu le temps de poser leurs valises, qui contenaient trois médailles d'or, qu'elles arrivaient au complexe aquatique de l'île Sainte-Hélène, hier midi.

Les 12 filles bronzées rejoignaient leurs collègues de la natation, du plongeon et du water-polo pour une rencontre de presse en prévision des Championnats du monde FINA, qui s'ouvriront à Shanghai dans un mois et demi.

Ces Mondiaux représentent la dernière grand-messe avant les Jeux olympiques de Londres, qui s'annoncent très aquatiques pour le sport québécois. L'occasion est belle pour prendre la mesure de l'eau en quatre questions.

Q: Y a-t-il une vie après Alexandre Despatie et Émilie Heymans?

R: Oui, répondent en choeur Roseline Filion, Meaghan Benfeito et Jennifer Abel. Cette dernière pourrait enlever la toute première médaille canadienne à Shanghai, le 16 juillet, à l'épreuve de 3 mètres synchronisé qu'elle disputera avec Heymans. Abel, 19 ans, sera aussi candidate au podium aux 1 m et 3 m individuels.

Filion et Benfeito viseront la même chose à la plateforme de 10 mètres. Quatrième à la Coupe du monde de 2010, Benfeito fait cependant la sourde oreille quand on lui rappelle ces attentes. «La pression ne me dérange pas, mais j'aime mieux me concentrer sur le travail que j'ai à faire là-bas. Si je plonge vraiment bien et que je finis quatrième, je ne serai pas déçue», affirme la plongeuse de 21 ans.

Heymans, en compétition en Italie, et Despatie, blessé, brillaient par leur absence hier. Aux prises avec une tendinite, ce dernier espérait reprendre la compétition en Allemagne à la fin mai, mais il a dû déclarer forfait. Il s'est plutôt rendu en Italie pour consulter un spécialiste du genou. Il n'a pas repris les sauts sur le tremplin.

Le processus de guérison est plus lent qu'espéré pour le double médaillé des derniers Mondiaux de Rome. «Il reçoit en ce moment des traitements très puissants et il fait tout en son possible pour revenir, a précisé Scott Cranham, directeur de la haute performance à Plongeon Canada. Ça reste une blessure dont le temps de guérison est très dur à prédire.»

Q: La relance de la natation canadienne est-elle bel et bien réelle?

R: Une médaille aux Jeux olympiques de Pékin, deux aux Mondiaux de Rome, trois aux JO de Londres? C'est l'objectif fixé par Pierre Lafontaine, chef de Natation Canada. Pour y parvenir, il vise de 12 à 18 finales à Shanghai, avec 5 ou 6 nageurs qui se glissent dans le top 5. «Si on veut être dans le coup à Londres, il faut cogner à la porte avant», dit-il.

Pour l'heure, les candidats au podium ont pour nom Brent Hayden, Ryan Cochrane, Annamay Pierse. La nageuse de papillon Audrey Lacroix aimerait s'ajouter au groupe. Après une année marquée par un changement d'entraîneur et la modification de son style, elle espère se rapprocher du chrono l'ayant menée au cinquième rang à Melbourne, en 2007. «J'aimerais me retrouver dans la même position à Shanghai, mais une finale me donnerait aussi beaucoup de confiance en vue des Jeux olympiques», dit-elle.

Q: L'équipe féminine de water-polo s'est-elle remise de son exclusion-surprise des Jeux de Pékin?

R: Oui, jure l'entraîneur-chef Pat Oaten, qui dirige un groupe plus expérimenté. Les vice-championnes mondiales ne tiennent cependant rien pour acquis: la qualification pour le tournoi olympique sera encore une fois très ardue. Les poloïstes canadiennes devront vaincre leurs éternelles rivales américaines aux Jeux panaméricains de Guadalajara, au Mexique, en octobre. Oaten prévoit donc cacher une partie de son livre de jeux à Shanghai. «Honnêtement, si on gagne l'or et qu'on ne réussit pas à se qualifier pour Londres, ça ne vaudra rien pour nous», rappelle-t-il.

Foi de la capitaine Krystina Alogbo, les joueuses vont cependant tout faire pour venger leur défaite controversée contre les Américaines à Rome. «On est très confiantes», dit-elle.

Q: Faut-il croire l'entraîneuse Julie Sauvé quand elle affirme que les juges internationaux s'extasient devant les prouesses de son équipe?

R: «Si Julie ne pense pas quelque chose, elle ne le dit pas», répond fermement Élise Marcotte. «Elle ne mettrait pas sa réputation en jeu», renchérit Boudreau-Gagnon. Doubles médaillées à Rome en 2009, les nageuses canadiennes visent mieux pour Shanghai. Elles ont bien hâte de se frotter aux Espagnoles, qu'elles n'ont pas vues la saison dernière. «Elles ont peut-être eu peur de nous», suggère Boudreau-Gagnon. À l'instar du water-polo, les nageuses synchronisées focalisent cependant leurs énergies sur les Jeux panaméricains, où elles voudront assurer leur qualification pour Londres.