La disparition de CKAC n'est pas si tragique pour ses artisans finalement.

La plupart retrouveront leur poste à la station 98,5 sur la bande FM.

Ron Fournier sera en ondes en soirée à compter de 20h30 en semaine, Michel Villeneuve reprendra son émission de fin de journée, mais à compter de 18h30 (une heure plus tôt en région), Jean-Charles Lajoie fera équipe avec Benoit Dutrizac à l'heure du lunch tandis que les matchs du Canadien, des Alouettes, de l'Impact et des Carabins de Montréal seront retransmis exclusivement sur la chaîne FM avec les équipes habituelles.

«Finalement, on retrouve le CKAC qu'on avait avant que la station ne devienne une chaîne sportive il y a quelques années, mais au 98,5», a expliqué hier l'animateur Michel Villeneuve.

«J'avais toujours dit qu'un jour, avec la volatilité de cette industrie, ils allaient faire une super station pour faire concurrence aux autres stations, a ajouté Villeneuve. Ils vont dominer le FM.»

Les collaborateurs Bruno Heppel, Philippe Cantin, Ian Laperrière et Michel Bergeron, entre autres, déménagent sur la bande FM, mais Pierre Vercheval et Jacques Demers ne suivront pas. Les animateurs de Sports du lit, Michel Langevin et Gabriel Grégoire, perdent leur poste puisqu'il n'y avait pas de place en ondes pour cette émission matinale.

«Ce n'est pas facile pour moi aujourd'hui, a confié Michel Langevin au bout du fil hier matin. Je crois vraiment que c'est la fin de ma carrière radiophonique. Je m'y attendais un peu. Quand le patron ferme les portes et te regarde passer depuis une semaine, tu sais à quoi t'attendre. Je vais faire de la télé à TVA Sports. C'est assez pour vivre, j'ai un très bon contrat. Il y a au moins ça.»

Pas le plan initial

Le premier vice-président radio chez Cogeco, Richard Lachance, a expliqué hier que le plan initial ne prévoyait pas la fermeture de CKAC Sports.

«Le CRTC nous a demandé de déposer une licence afin d'obtenir la fréquence 690 et 940 AM pour nos stations dédiées entièrement à la circulation routière. On nous a répondu qu'on aurait notre réponse le 16 juillet dans des audiences non comparaissantes parce que personne d'autre ne s'y intéressait.

«Entre-temps, Astral est arrivée dans le portrait et a rappelé au CRTC qu'il s'agirait pour nous d'une cinquième station de radio dans le marché francophone de Montréal alors que la limite est de quatre, puis Bell s'est mise de la partie en disant que ces fréquences étaient trop puissantes pour la circulation et devraient être utilisées à d'autres fins.»

Richard Lachance dit avoir reçu une lettre du CRTC à la fin août qui tuait dans l'oeuf tout espoir de lancer une chaîne consacrée à la circulation routière francophone sur la fréquence 690.

«Ils nous ont écrit que nous avions déjà quatre stations de même langue et nous demandaient de préciser pourquoi nous croyions que le conseil devait faire une exception en nous accordant une cinquième station de langue française. Ce qui a eu pour effet de retarder le processus et de forcer le CRTC à fixer des audiences publiques au 17 octobre. Quand on a vu ce qui planait, on a retiré notre demande, d'autant plus que nous avions une entente avec le ministère des Transports pour lancer la nouvelle station. On se doutait que ça ne passerait pas. On a néanmoins laissé la demande pour le 940 (en anglais).»

Le patron de Cogeco a lancé une petite pointe à ses concurrents en conférence de presse. «Nous avons été surpris par leur opposition à ce projet parce qu'aucun de ceux-ci n'avait montré de l'intérêt envers ces fréquences depuis que Corus a cessé les activités d'Info 690 et de 940 News en janvier 2010. On a donc pris la fréquence 730 pour notre station de circulation. Mais nous ne leur en voulons pas, c'est un geste d'affaires.»

Astral se défend

Astral refuse de porter la responsabilité de la fermeture de CKAC Sports. «Nous trouvons odieux que Cogeco veuille nous faire porter le chapeau, dit Luc Tremblay, vice-président des opérations d'Astral Radio Québec.

«Cogeco savait très bien qu'en demandant au CRTC une cinquième station de radio FM francophone à Montréal pour leur station de circulation, l'entreprise contrevenait aux règles de propriété commune et entrait sur un terrain glissant. Cogeco a eu une première dérogation aux règles de propriété commune l'an dernier, l'entreprise aurait dû prévoir le temps nécessaire pour faire le débat cette fois-ci. Que les gens de Cogeco jouent aujourd'hui les gens pressés et pas capables d'attendre jusqu'au 17 octobre, quand même!»

Selon Astral, une radio sportive francophone peut être rentable à Montréal. «Oui, il y a de la place pour une radio comme ça. La station était rentable, même si à Montréal, une radio sportive dépend toujours des performances du Canadien», dit Luc Tremblay.

Astral, qui possède notamment les stations NRJ et Rouge FM, n'envisage pas de créer une radio sportive à Montréal. L'entreprise avait conclu une entente de principe pour acheter CKAC et en faire une station de sport et de radio parlée, mais le Bureau de la concurrence l'avait forcée à renoncer à CKAC en 2002.

Richard Lachance affirme que la survie d'une station entièrement consacrée aux sports sur la bande AM demeurait fragile. «Il y a seulement un club de sport majeur, le Canadien, mais beaucoup de chaînes, RDS, RDS2, RIS, TVA Sports; à CKAC, malgré tout le travail de l'intérieur, ça demeurait fragile.»