De Tadoussac aux plaines d’Abraham, sous la pluie, la neige et même la grêle, Mathieu Gélinas a couru sept marathons en sept jours, la semaine dernière. À la mémoire d’Henriette et pour tous ceux qui vivent avec la sclérose en plaques.

Henriette, c’est la grand-maman de Mathieu Gélinas. Enfant, il arrivait au jeune homme de l’aider à manger. Il ne l’a d’ailleurs jamais vraiment vue marcher. Elle était atteinte de la sclérose en plaques, une maladie auto-immune qui s’attaque au système nerveux central.

« J’étais très près de ma grand-mère. Elle n’avait pas la chance d’avoir la médication qu’il y a aujourd’hui et qui ralentit la progression de la maladie. […] J’ai vraiment vu les pires côtés de la maladie », raconte-t-il à La Presse lors d’un appel téléphonique, mardi matin.

À l’époque, le jeune Mathieu ne comprenait pas totalement ce que sa grand-mère traversait. « Qu’est-ce qu’il se passe avec mamie ? », demandait-il à son père, qui lui répondait comme il pouvait. « En grandissant, j’ai commencé à comprendre c’était quoi en m’informant un peu plus sur cette maladie-là et j’ai vite compris que c’était, dans son cas à elle à l’époque, une fatalité malheureusement. »

Sa grand-mère s’est éteinte après avoir contracté la COVID-19 en 2020, au début de la première vague. Son grand-père est mort huit jours plus tard. « Les raisons qui font que je la trouve exceptionnelle, je n’ai pas vraiment pu les lui répéter à la fin », laisse tomber l’homme de 28 ans.

Il a donc trouvé une autre manière de lui rendre hommage.

À l’automne 2021, Mathieu Gélinas réalisait sa première collecte de fonds pour la Société canadienne de la sclérose en plaques dans le cadre de sa participation, avec son frère, à l’Ultra-Trail Harricana. Dans les mois qui ont suivi, l’idée de mettre sur pied son propre évènement au profit de la Société canadienne de la sclérose en plaques, sans être associé à une course organisée, a germé dans sa tête.

Et c’est ce qu’il a fait. Il s’est entouré d’un préparateur physique réputé — Charles Castonguay, ancien préparateur du fondeur Alex Harvey — et d’une physiothérapeute. Sous leurs conseils, il s’est entraîné pendant 10 mois. Il s’est aussi trouvé de nombreux partenaires pour financer son projet. Projet qu’il a intitulé « Crinqué contre la SP ».

« Un feeling incroyable »

Accompagnée de sa conjointe, qui avait pris congé pour la semaine, Mathieu Gélinas a pris le départ de Tadoussac pour ses 42 premiers kilomètres, le 17 octobre. De jour en jour, il a couru de Tadoussac à Sagard, puis de Sagard à Grand-Fonds. Il s’est ensuite rendu jusqu’aux Éboulements, puis au Massif de Charlevoix, à Saint-Tite-des-Caps et à Sainte-Brigitte-de-Laval.

PHOTO FOURNIE PAR MATHIEU GÉLINAS

Mathieu Gélinas

C’est sûr que je me suis préparé pour ça, mais ça s’est vraiment bien passé !

Mathieu Gélinas

Comme dans toute aventure de ce genre, l’homme de 28 ans a eu à composer avec des petits bobos, mais rien de majeur. « C’est le genre de blessures qui se soignaient avec un taping et deux Advil », dit-il. Comme sa grand-mère, il ne s’est pas plaint dans la douleur. « Elle était toujours souriante, toujours positive, toujours en train de dire qu’elle était donc chanceuse en faisant référence à la famille et à l’amour autour de nous. »

Quant aux moments difficiles mentalement, ils ont été éphémères.

« C’est dans ces moments-là que tu dois te rappeler les raisons pour lesquelles tu le fais. Ce n’est pas trop long que tu te relèves, parce que c’est aussi une chance incroyable que j’ai de pouvoir faire ça, de me déplacer sur mes pattes et de courir longtemps. Il y a des centaines de milliers de personnes qui aimeraient faire ça. »

Au fil des jours, la température est passée d’un extrême à l’autre. Il a goûté à la forte pluie, à la neige et à la grêle. Mais par un beau hasard, le ciel était dégagé à son arrivée sur les plaines d’Abraham, le 24 octobre. Il a ainsi célébré son exploit sous le soleil, à 18 degrés, entouré de la vingtaine de coureurs qui se sont joints à lui en cours de route et des nombreuses personnes venues le féliciter.

PHOTO FOURNIE PAR MATHIEU GÉLINAS

Mathieu Gélinas

« Encore aujourd’hui, je ne comprends pas trop. C’est un feeling incroyable. Je n’en reviens pas de l’engouement qu’il y a eu autour de ça, de la quantité de monde qui m’attendait, de l’amour que j’ai reçu. »

Évidemment, il y a de la fierté, mais il y a aussi beaucoup d’émotions parce que tu te rappelles pourquoi tu le fais. Tu te dis : sûrement qu’il y en a une en haut qui est bien fière de son petit monsieur.

Mathieu Gélinas

À ce jour, Mathieu Gélinas a amassé 20 300 $ pour la Société canadienne de la sclérose en plaques. La collecte de fonds restera active pour les prochains mois, au moins jusqu’à ce qu’il lance le documentaire qu’il a tourné dans le cadre de son projet.

« Je voulais rencontrer des gens qui vivent avec la maladie et qui pratiquent encore des sports. Parce que je veux que ce documentaire-là raconte des histoires positives. Je veux un peu réécrire l’histoire de ma grand-mère. »