En 2008, la plongeuse Marie-Ève Marleau a fini septième aux Jeux olympiques de Pékin. Quinze ans plus tard, la Québécoise est gestionnaire des sports (plongeon et plongeon de haut vol) au sein de l’organisation World Aquatics.

Il y a bientôt deux ans, lorsque ses futurs patrons ont demandé des idées de candidatures à certaines fédérations nationales, un seul nom est sorti : Marie-Ève Marleau. « C’est tellement flatteur », s’exclame-t-elle.

En acceptant le mandat, elle savait qu’elle intégrait une organisation en pleine transition. « Si on m’avait offert de travailler à la FINA d’avant, je n’aurais sûrement pas accepté. On m’a raconté que c’était un peu malsain. Après un grand ménage, c’était le bon moment pour y travailler. »

Elle s’occupe désormais du volet compétitif élite, des comités techniques, des officiels, des règlements et de la stratégie du circuit des compétitions.

On a le mandat d’effacer les anciens circuits et de reconstruire un système avec moins d’évènements.

Marie-Ève Marleau

Auparavant, outre les Jeux olympiques tous les quatre ans et les Championnats du monde des sports aquatiques tous les deux ans, les plongeurs avaient accès aux Séries mondiales (réservées aux huit meilleurs par épreuves) et aux Grands Prix.

« Les athlètes du top 8 ne participaient plus aux Grands Prix, dit-elle. Donc, les pays hôtes avaient moins la possibilité d’annoncer que les meilleurs venaient en ville pour compétitionner, il n’y avait pas d’échanges entre la génération montante et les meilleurs, et le calendrier était très chargé. »

La pandémie a également sabré les budgets de plusieurs pays. « On avait de la difficulté à trouver des hôtes. Il fallait complètement revoir la stratégie. »

Repartir à neuf

Pour l’instant, World Aquatics organise deux arrêts de Coupe du monde qui permettent aux athlètes de se qualifier pour la Super finale, ainsi que quatre ou cinq autres évènements. Sans oublier les compétitions continentales comme les Jeux panaméricains, les Jeux olympiques et les Championnats du monde, qui sont en ce moment tenus chaque année avant de retrouver leur fréquence passée.

En parallèle, la gestionnaire participe au développement du plongeon de haut vol, bien connu ici grâce au circuit Red Bull, à l'exceptionnelle plongeuse québécoise Lysanne Richard et au centre d'entraînement du Stade olympique. « On travaille avec eux pour que nos calendriers se complémentent. »

Son organisation souhaite ajouter deux Coupes du monde par année et faire intégrer la discipline aux Jeux olympiques. « C’est super intéressant de voir comment on pousse un sport d’un point de vue politique et financier. »

PHOTO FOURNIE PAR MARIE-ÈVE MARLEAU

Marie-Ève Marleau

Marie-Ève Marleau a du pain sur la planche. Et bien des points accumulés avec son programme de fidélité de voyageuse. « Entre avril et août 2023, j’ai passé une semaine en Chine, une à Montréal, une à Berlin, une à Fort Lauderdale et trois au Japon. C’est énorme ! »

En plus de découvrir le monde, elle renoue avec l’univers du plongeon. « Ça me tellement fait du bien ! La famille du plongeon est, selon moi, la plus tissée serré des sports aquatiques. Quand je suis entrée en poste, ils m’ont accueillie à bras ouverts ! Ça a ravivé de vieux souvenirs et je me sens appartenir au groupe. »

Quand on lui fait remarquer qu’elle est la plus haut placée du groupe, elle réagit avec un rire gêné. « Je suis entourée d’experts bien meilleurs que moi, mais en ce qui concerne la fédération internationale, c’est vrai. »

Elle a donc un pouvoir décisionnel sur ceux qu’elle a côtoyés durant des années. « Au début, je sentais une pression de performer, parce que ce sont des gens qui me connaissent et à qui je veux plaire. L’idéal, c’est d’avoir un détachement émotif avec son travail, mais c’est impossible dans ce sport. »

La femme de la situation

L’olympienne était prédestinée à œuvrer dans les hautes instances du sport. Après sa retraite de la compétition en 2008, Marleau a terminé un bac en marketing, travaillé pour Plongeon Canada et agi comme bénévole pour le Comité olympique canadien durant les Jeux de Vancouver, en 2010.

Ensuite, elle a travaillé en relations publiques avec Marie-Annick L’Allier, avant de recevoir une offre du Comité olympique canadien. « Après les Jeux de Vancouver, la demande pour les commanditaires était en expansion, alors on a créé un département de marketing des athlètes. Il fallait quelqu’un qui comprend les deux mondes. J’ai fait ça de 2013 à 2019. »

En avril 2019, une présentation au Forum des Olympiens à Lausanne a attiré l’attention sur elle. « Un mois après, le Comité international olympique m’a contactée pour m’offrir un poste. J’étais prête pour un changement, je n’avais pas d’attaches à Montréal et j’ai accepté. »

Direction Lausanne pour s’occuper des évènements et des communications de l’Association mondiale des olympiens. Cinq mois après son déménagement, la pandémie a complètement bousculé son aventure professionnelle, mais elle lui a aussi permis de découvrir la Suisse et de se lier d’amitié avec des expatriés. « C’est ça, la magie du CIO : au bureau et ailleurs en ville, il y a 22 cultures autour de toi. C’est super enrichissant ! J’ai des amis suisses, russes et japonais, et la COVID nous a permis de nous rapprocher. »

Elle a aussi acheté une autocaravane pour découvrir les montagnes. « En Suisse, les gens sont toujours dehors et tout le monde est en forme. J’aime vraiment la version de qui je suis ici. »

Un état idéal pour s’investir au moins quelques années dans la refonte du sport qui l’a vue grandir.