La nageuse artistique Jacqueline Simoneau avait pris sa retraite en catimini au terme des Jeux olympiques de Tokyo. Seuls les membres de son entourage étaient au courant. Voilà qu’elle revient à la compétition, deux ans plus tard, dans le but de pouvoir enfin réaliser son plus grand rêve : gagner une médaille olympique.

La Presse est allée à la rencontre de l’athlète de 26 ans, la semaine dernière, dans les quartiers de l’Institut national du sport (INS). Si la double olympienne n’avait pas annoncé sa retraite dans les médias, en 2021, elle souhaite que son retour à l’eau soit officialisé publiquement.

« Je suis de retour dans le but de me qualifier pour les Jeux olympiques de Paris », a-t-elle assuré dès le début de l’entretien.

Pour obtenir son billet pour Paris, l’équipe canadienne devra remplir les critères d’admissibilité aux Jeux panaméricains de Santiago, cet automne, ou encore aux Championnats du monde aquatiques de Doha, en février. Toutefois, Simoneau ne pourra pas aider ses coéquipières lors du premier rendez-vous.

Selon certaines règles de l’Agence mondiale antidopage, un athlète doit attendre six mois, une fois officiellement sorti de la retraite, pour revenir dans l’action. « J’ai rempli toute la paperasse cet été, donc j’aurai le droit de compétitionner seulement en 2024 », précise la Montréalaise.

Un retour imprévu, mais attendu

Avant de tirer sa révérence, Simoneau était au sommet de sa gloire. Deux participations aux Jeux olympiques, quatre médailles d’or aux Jeux panaméricains et quatre présences en Championnats du monde. Un curriculum vitae faisant d’elle la nageuse artistique canadienne la plus prolifique de sa génération.

Elle avait décidé de prendre sa retraite en amont des Jeux olympiques de Tokyo. Elle avait même organisé une petite fête avec ses proches pour souligner sa carrière et y mettre du même coup un point final. « Je vais devoir tous les rappeler pour m’excuser », dit-elle en riant tout en circulant dans les couloirs de l’INS.

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Jacqueline Simoneau en 2014

Depuis 24 mois, Simoneau n’a pas quitté le monde de la natation artistique pour autant. Ponctuellement, elle rendait visite aux membres de la jeune équipe canadienne pour les appuyer, les épauler et les guider.

Cet été, quand je donnais mes cliniques, j’étais encore capable de faire beaucoup de choses techniques dans l’eau. J’avais la capacité de le faire.

Jacqueline Simoneau

Plus important encore, elle a toujours la flamme. Rien ne s’est éteint chez elle, même avec une absence de plusieurs mois et des études en médecine à Trois-Rivières.

« Je plongeais dans l’eau pour leur montrer des petits trucs. Donc je pense que c’est mieux d’être directement dans l’équipe pour les pousser encore plus. C’est mieux d’être à l’interne qu’à l’externe », soutient-elle.

Nouveau système

En natation artistique, comme dans une panoplie d’autres disciplines, le sort des athlètes repose entre les mains des juges. Les a priori sont tellement déterminants qu’il est difficile, une fois aux Jeux olympiques, d’espérer une médaille si l’équipe n’est pas déjà une abonnée du podium.

Toutefois, la fédération internationale a ajusté ses critères de notation. Dorénavant, l’exécution et le degré de difficulté seront davantage pris en considération. Et ce changement a certainement convaincu la Québécoise. « J’ai reçu beaucoup de messages de gens de la communauté de Natation artistique Canada. On me disait que le nouveau système était fait pour moi, on m’a incitée à revenir. Et je me suis dit : pourquoi pas ? »

D’autant plus que ses professeurs à l’Université du Québec à Trois-Rivières n’y ont vu aucune objection : « L’école sera là toute ma vie. C’est vraiment ma dernière chance de vivre des Jeux olympiques. Mon école a été compréhensive et m’encourage. »

Entre athlète et mentor

Jacqueline Simoneau a gardé la forme pendant sa courte retraite. Même si elle agissait à titre de mentore depuis les derniers Jeux, il serait surprenant de voir la nageuse accuser du retard, à l’entraînement, aux côtés de ses jeunes coéquipières.

L’envie de revenir ne l’a jamais véritablement quittée. « Quand je venais ici, j’avais un rôle de mentore. Je prodiguais des conseils et les coachs me taquinaient en disant que je devrais revenir. Dès le jour 1 de ma retraite. »

En faisant son grand retour, qui aura probablement des échos partout dans le monde de la natation artistique, Simoneau souhaite d’abord se tailler un poste au sein de l’équipe nationale. Elle ne tient rien pour acquis. Elle veut ensuite pouvoir enfin revenir avec une médaille olympique au cou. Dans tous les cas, elle souhaite par-dessus tout laisser un riche héritage au sport l’ayant formée, comblée et transformée, en mieux.

« C’est une équipe très jeune et j’aimerais lui offrir mes connaissances pour qu’elle ait du rythme en 2024 et en 2028 pour que ça continue. Ç’a été difficile dans les dernières années de passer le flambeau. Moi, à mes débuts, j’ai eu ça. Je veux pousser l’équipe le plus possible. »

Et non, le fait que Paris soit l’hôte des prochains Jeux n’a eu aucune incidence sur sa décision. Même si la ville de l’amour se distingue grâce à son charme, « les Jeux, c’est trop spécial ». « Je serais revenue même si ça avait été sur une autre planète ! »