Après un Tour des Flandres épique la semaine dernière, les meilleurs cyclistes de la planète se retrouvent demain pour la 109e présentation de Paris-Roubaix. Deux Québécois seront du départ sous les couleurs de formations françaises, la recrue David Veilleux (Europcar) et Dominique Rollin (FDJ). Sauf erreur, il s'agit d'une première. Entretien avec Rollin quelques jours avant sa deuxième expérience sur les pavés de l'Enfer du Nord.

Après Milan-San Remo et le Tour des Flandres, Dominique Rollin poursuit sa tournée des monuments du cyclisme. À l'horaire demain, Paris-Roubaix, classique présentée pour la première fois en 1896.

Rollin sait très bien dans quoi il plonge. L'histoire, les pavés, la poussière ou la boue. Sous les couleurs de Cervélo, l'an dernier, il a fini 33e de l'Enfer du Nord, surnom remontant aux affres de la Première Guerre mondiale. Il colle parfaitement à la rugosité de l'épreuve, entrecoupée de 27 secteurs pavés couvrant plus de 50 des 258 kilomètres de la course.

Porter les couleurs de la FDJ, nouvelle équipe française de Rollin, ajoute au cachet. Plus tôt cette semaine, le coéquipier qui a répondu au téléphone dans la chambre d'hôtel en Belgique était Frédéric Guesdon, 39 ans, dernier Français à avoir remporté Paris-Roubaix. «Ça donne une autre vision de la course, ça lui donne une certaine importance «, a dit Rollin au sujet de la présence de son partenaire de chambre, qui avait causé la surprise en 1997.

Marc Madiot, manager de la FDJ, s'est imposé à deux reprises à Paris-Roubaix, la dernière fois en 1991. Ce 20e anniversaire devait être souligné cette semaine au sein de l'équipe. L'anticipation est donc grande à la FDJ de Madiot, en mal de réussites depuis le début de la saison. «Si jamais l'un de nous est proche d'aller faire un résultat, je pense que l'oreillette, elle va vibrer», dit Rollin.

Privée de son chef de file Yoann Offredo, blessé à un talon après une violente collision avec un photographe après l'arrivée de Gand-Wevelgem, la FDJ (ex-Française des Jeux) comptera sur Rollin, Guesdon et William Bonnet pour cette 109e présentation de Paris-Roubaix.

«Toute l'équipe est vraiment confiante, soutient Rollin. On se dit qu'on peut faire quelque chose. On n'est pas là comme observateurs.»

Le coureur de 28 ans en veut pour preuve le comportement de l'équipe à Gand-Wevelgem, où lui-même a été arrêté par un bris mécanique, et à Milan-San Remo, première grande classique de l'année, disputée il y a trois semaines. «Entre la Cipressa et le Poggio, c'est nous qui prenons l'initiative», souligne Rollin, 16e à 27 secondes du vainqueur.

Dans le même groupe que Rollin, plusieurs grands noms: Haussler, Sagan, Bennati, Sylvain Chavanel, Hincapie.

Ça laisse quand même le Québécois sur son appétit. Car il sentait qu'il avait les jambes pour suivre quand la sélection finale s'est faite dans le Poggio. Emboîté, il n'a pas eu le temps de réagir. Son coéquipier Offredo devant, il était condamné à attendre la réponse d'autres équipes, qui n'est jamais venue. «Au bout de 300 kilomètres de course, les réactions sont toujours plus lentes.»

Au Tour des Flandres, la semaine dernière, Rollin s'est illustré de nouveau, ratant encore d'un poil le train gagnant. Il a pris le 15e rang, à 1 min 24 du gagnant, encore dans un groupe sélect. Cette fois, la fatigue du dernier mois de course s'est fait sentir. Et il dit avoir payé cher un ravitaillement raté, qui l'a laissé à sec pendant une trentaine de kilomètres. Les crampes l'ont rattrapé dans le décisif mur de Grammont.

Si Rollin n'a pas encore décroché le grand résultat escompté, il n'a certainement pas déçu ses nouveaux patrons, qui l'ont embauché spécialement pour son aisance dans les classiques. Il a également bien fait au sprint en février au Tour du Qatar (quatrième de la dernière étape) et en mars aux 3 Jours des Flandres Occidentales (quatrième du général). «Cette année, j'ai la forme pour jouer avec les meilleurs», résume Rollin.

Ce ne sera pas de trop pour Paris-Roubaix, qui promet après un Tour des Flandres épique la semaine dernière. Même s'il est dans «un monde à part», Fabian Cancellera, tenant du titre et grand favori, «n'est pas imbattable», dit Rollin, rappelant la troisième place du Suisse au Ronde.

Le rapprochement de la célèbre trouée d'Arenberg de l'arrivée et l'ajout de nouveaux secteurs pavés, dont un juste après Arenberg, dynamiseront la course, espèrent les organisateurs, les mêmes que pour le Tour de France. Le temps s'annonce clément, ce qui devrait prévenir un carnage. «Il faut voir de quoi auront l'air les nouveaux secteurs, s'ils sont si redoutables qu'ils le disent, dit Rollin. Après, à nous de faire la course.»