«Roulez gagnants au naturel» pouvait-on lire sur le maillot de l'équipe du Québec que portait Arnaud Papillon aux Championnats canadiens de cyclisme, le 25 juin, à Burlington, en Ontario. C'était de la fausse représentation.

Deuxième de la course sur route dans la catégorie des moins de 23 ans, Papillon carburait à l'EPO. Un échantillon d'urine prélevé après l'épreuve a révélé la présence de cette substance dopante interdite. Un autre échantillon, recueilli plus tard hors compétition, contenait aussi de l'érythropoïétine.

Le Centre canadien pour l'éthique dans le sport (CCES), l'organisme qui a mené les deux contrôles, a suspendu le cycliste pour une période de deux ans à compter du 12 août 2011. Le CCES en a fait l'annonce dans un communiqué diffusé mercredi midi.

Papillon avait devancé le CCES en annonçant lui-même avoir échoué un test antidopage dans un communiqué publié en matinée sur le site spécialisé veloptimum.net. Le cycliste de 22 ans, originaire de Longueuil, a admis ses torts et annoncé sa retraite définitive du sport.

«Je ne nie pas le geste que j'ai posé et j'en assume l'entière responsabilité, a-t-il écrit. Je reconnais avoir commis un geste inacceptable et je le regrette. Je m'excuse pour la déception que je cause à ceux qui m'ont fait confiance, notamment mes proches, mon entraîneur et les membres de mon équipe.»

«J'ai faibli»

Jeune coureur prometteur et polyvalent, Papillon est devenu champion canadien des moins de 23 ans à l'été 2010 à Edmonton. Il a ensuite été sélectionné pour les Mondiaux U23 de Melbourne, où il s'est classé 21e. Au printemps, le membre de Garneau-Club Chaussures-Norton Rose a gagné les Grands Prix de Saint-Raymond et de Charlevoix, deux courses importantes du circuit québécois. Il n'a pas couru depuis les championnats canadiens de Burlington.

«Je tiens à préciser que c'est depuis peu que le dopage a pris place dans ma vie, a affirmé Papillon dans le communiqué. Après de multiples déceptions, j'avais pratiquement tout abandonné. J'ai essayé de réorienter ma vie, mais mon amour pour ce sport était plus grand. Après de multiples confrontations éthiques avec moi-même, j'ai faibli. Je devrai vivre avec cette réalité et les apprentissages qui en résultent pour le reste de ma vie.»

La Fédération québécoise des sports cyclistes (FQSC) s'est dit «profondément indignée» par le geste de son membre, qui entache toute la communauté cycliste. «C'est inacceptable, a réagi le directeur général Louis Barbeau en entrevue téléphonique. C'est un gars qui a un certain talent, mais au lieu de continuer à travailler fort comme la très grande majorité des autres athlètes, il a décidé de prendre un raccourci.»

Aux yeux de Barbeau, Papillon ne bénéficie d'aucune circonstance atténuante, rappelant la campagne de prévention «Roulez gagnants au naturel» mise de l'avant par la fédération en 2006, dans la foulée du scandale impliquant Geneviève Jeanson, qui a admis avoir consommé de l'EPO durant la totalité de sa carrière.

«Arnaud a 22 ans, a rappelé Barbeau. C'est un gars encadré. Il y a des gens autour de lui. Il a triché délibérément. C'était un choix éclairé. Il n'a aucune excuse.»

Lors d'une conversation téléphonique avec Papillon la semaine dernière, Barbeau lui a suggéré de collaborer avec le CCES en indiquant la provenance de l'EPO et en révélant l'identité d'autres coureurs impliqués, si tel est le cas. «Il m'a dit qu'il y réfléchirait.»

Une grande déception pour Louis Garneau

Louis Garneau, propriétaire de l'équipe portant son nom, a appris le contrôle positif de la bouche de son coureur, il y a un mois et demi. L'homme d'affaires a résilié son contrat sur le champ et lui a ordonné de rapporter tout le matériel de l'équipe qu'il possédait.

«Je lui ai dit: Tu me ramènes tout, le vélo, le casque, les paires de bas...», a raconté l'homme d'affaires, pour qui cette «grosse erreur de jugement» de Papillon représente une «grande déception. «En 41 ans dans le vélo, je n'ai jamais été témoin d'une telle chose. Je suis peut-être naïf, mais après les affaires comme celle de Jeanson, je croyais que c'était fini, le doping.»

Garneau estime que le coureur doit être «puni, mais pas détruit»: «Au départ, j'ai eu le goût de me fâcher, mais en discutant avec lui, je voyais sa détresse, sa peine. Il est détruit. Je l'ai écouté. C'est terrible ce qu'il a fait, il s'est comporté en tricheur, mais je lui ai fait une leçon de vie, en bon père de famille.»

Le test positif de Papillon ne compromet pas la participation de Louis Garneau dans le cyclisme. Il a toujours l'intention de commanditer une équipe, en accentuant davantage son message antidopage. En collaboration avec le CCES, il obligera chaque coureur à se soumettre à un ou deux tests par saison.

L'Association cycliste canadienne (ACC) a annoncé que le nom de Papillon n'apparaîtrait plus dans le palmarès de la course sur route des moins de 23 ans à Burlington. «On est très déçu et très fâché de cette nouvelle, a commenté le directeur technique Jacques Landry. Ça nous perturbe énormément et ça perturbe toute la communauté cycliste canadienne. On espère que ça découragera d'autres athlètes dans le futur. De toute évidence, le système fonctionne.»

D'ailleurs, selon toute vraisemblance, le test positif de Papillon a conduit le CCES à procéder à d'autres contrôles aux championnats québécois de Saint-Agathe, à la fin août, une action inhabituelle. «Ce n'était pas une commande de la fédération», a précisé Louis Barbeau, directeur général de la FQSC.

À son souvenir, environ huit coureurs, manifestement ciblés, ont été contrôlés. «Ils n'ont pas pris systématiquement le gagnant d'une catégorie, a expliqué Barbeau. Je pense qu'ils ont ciblé un certain nombre d'athlètes en raison de ce qui s'était passé (avec Arnaud Papillon).»

Pour l'heure, cette procédure n'a mené à aucun autre contrôle positif.