Le rêve olympique du cycliste David Veilleux a du plomb dans l'aile. Le Canada sera en effet limité à un seul partant pour la course sur route masculine des Jeux de Londres, le 28 juillet.

Veilleux n'en fait pas un drame, mais il admet avoir été déçu en prenant connaissance de la répartition des quotas olympiques, telle que publiée lundi par l'Union cycliste internationale (UCI).

«Les Jeux olympiques sont un objectif important pour moi, a convenu le coureur de 23 ans, joint au téléphone hier. Ma saison 2012 devait être en partie basée là-dessus. Je vais tout faire pour essayer d'être sélectionné, mais il faut quand même rester réaliste.»

À l'heure où les cyclistes canadiens n'ont jamais été aussi présents dans le peloton européen -, Veilleux évolue pour l'équipe française Europcar, qui cogne à la porte de la première division - cela ne se traduit pas par une représentation équivalente dans les grands événements internationaux. Aux derniers Jeux de Pékin, en 2008, trois Canadiens ont pris le départ. Même chose à Athènes, quatre ans plus tôt.

Une diminution «épouvantable», selon Pierre Hutsebaut, entraîneur personnel de Veilleux et directeur général de l'Association cycliste canadienne (ACC) jusqu'en 2004. «Je ne trouve pas ça normal. On méritait d'avoir trois coureurs», a-t-il tranché, invité à commenter la situation.

L'UCI alloue les 145 places de la course sur route à partir de divers classements, dont celui des pays dans le WorldTour et les Tours continentaux. Six nations, dont les Britanniques de Mark Cavendish, bénéficient du maximum de cinq représentants.

En théorie, le cinquième rang du Canada au America Tour aurait dû lui permettre d'aligner deux partants. Mais un coureur dont la nation ne faisait pas partie des six premières, mais qui pointait parmi les 40 meilleurs au classement individuel, a obtenu un carton d'invitation pour son pays... au détriment d'un autre.

La direction de l'ACC connaissait les règles du jeu. «Quelque part, on prenait un risque», a admis le directeur de haute performance, Jacques Landry, qui espérait néanmoins décrocher deux places.

Quelques facteurs expliquent la position olympique du Canada, nullement un reflet de la santé du cyclisme sur route masculin au pays, insiste Landry.

D'abord, la prestation moins éclatante de Ryder Hesjedal au Tour de France 2011. Par comparaison, son coup de force de 2010 aurait pu permettre au Canada de décrocher «jusqu'à quatre places», calcule le directeur.

Ensuite, la faible présence canadienne dans les courses de l'America Tour disputées en Amérique centrale, en Amérique du Sud et dans les Caraïbes. En 2008, c'est là que la défunte équipe canadienne Symmetrics avait accumulé un grand nombre de points. SpiderTech a joué ce rôle l'an dernier, avant de concentrer son attention sur l'Europe et les Grands prix de Québec et Montréal (World Tour) en 2011.

«Le Canada aurait pu envoyer une équipe nationale pour aller chercher des points», estime Hutsebaut.

«Sur le plan sportif, ce n'est pas là qu'on apprend à courir. On évite d'y aller, comme les Américains d'ailleurs», rétorque Jacques Landry. Plus largement, l'ACC privilégie le développement de ses coureurs U23 en Europe. «On ne peut pas courir tous les lièvres à la fois.»

Landry rappelle aussi être tributaire du financement octroyé par «À nous le podium» (95% du budget haute performance de l'ACC). Pour le cycle olympique de Londres, la course sur route masculine ne fait pas partie des épreuves prioritaires: «C'est dommage et décevant (de n'avoir qu'une place aux Jeux), d'autant que je suis moi-même issu de la route. Mais le développement du cyclisme masculin en est un de longue haleine. On devrait être en meilleure posture en 2016 et en 2020.»

Le représentant canadien à la course sur route sera choisi par un comité au début mai. Ce comité devra auparavant déterminer quelle épreuve de la course sur route ou du contre-la-montre (une place aussi pour le Canada) sera priorisée. Car un règlement oblige un partant à l'épreuve chronométrée à s'aligner aussi sur route, trois jours plus tôt. En clair, cela signifie que si le comité calcule, disons, que Svein Tuft, ancien vice-champion mondial du chrono, représente la meilleure chance de podium, il n'aura pas le choix de le sélectionner aussi pour la route.

Rien d'encourageant pour Dominique Rollin, Martin Gilbert, Guillaume Boivin, Keven Lacombe ou David Veilleux, 19e et meilleur Canadien aux Mondiaux de Copenhague, en septembre. Ce dernier se fait philosophe et rappelle qu'il sera tout aussi difficile pour un coureur français de décrocher l'une des quatre places tricolores disponibles. «Je comprends que mes chances sont minces en partant, constate-t-il. Si j'y vais, je serai très heureux. Sinon, je ne serai pas par terre non plus.»