Le mois dernier, la Fédération internationale de ski a rejeté le projet d'une descente masculine olympique au Massif. Plusieurs ont perçu cette décision comme le coup de mort du projet de Jeux olympiques à Québec en 2022. Walter Sieber, autorité canadienne dans le domaine olympique, est plus optimiste.

Walter Sieber est formel: la présentation d'une descente masculine dans la région de Québec n'est pas une condition sine qua non au succès d'une éventuelle candidature olympique pour 2022.

«Si jamais Québec veut aller de l'avant, il peut le faire sans que la descente ait lieu dans les environs», a soutenu M. Sieber lors d'une entrevue téléphonique plus tôt cette semaine. «Il y a une porte de sortie, il est très important que les gens le réalisent.»

L'article 35 de la Charte olympique permet l'organisation de certaines épreuves à l'extérieur de la ville hôte, rappelle M. Sieber. Pour les Jeux d'hiver, il est même indiqué que «lorsque, pour des raisons géographiques ou topographiques, il est impossible d'organiser certaines épreuves ou disciplines d'un sport dans le pays d'une ville hôte, le CIO peut, à titre exceptionnel, en autoriser le déroulement dans un pays limitrophe».

Ainsi, M. Sieber croit que la descente masculine pourrait être présentée à Whistler ou Lake Louise, par exemple. Il écarte cependant un emplacement comme Whiteface, dans l'État de New York, car à ses yeux les athlètes canadiens devraient avoir le privilège de s'exécuter devant leur public. «Que ce soit à 600 à 4000 kilomètres, au bout du compte, ça ne fait pas une grande différence», juge le Montréalais.

Idéalement, la descente aurait été disputée au Massif, reconnaît M. Sieber. Mais le court rapport du spécialiste de la Fédération internationale de ski (FIS), qu'il a pu lire en allemand, est formel: le parcours projeté sur le mont à Liguori, sur la partie est du Massif, ne comporte pas suffisamment de défis.

En novembre dernier, Régis Labeaume avait été catégorique: cela n'avait «aucun sens» de soumettre une candidature si l'épreuve phare des Jeux était prévue à l'extérieur de la région. Le maire de Québec jugeait qu'une telle proposition serait mal reçue au Comité international olympique (CIO).

Or M. Sieber, qui fraye dans le milieu olympique depuis une quarantaine d'années, ne croit pas qu'un tel scénario plomberait un éventuel projet Québec 2022. «Personnellement, je dis non, parce que et la FIS et le CIO gardent les portes ouvertes. La FIS a toujours dit et répété que dans l'Ouest canadien et aux États-Unis, pour eux, il n'y a pas de problème. (...) Ce n'est pas un voeu pieux, ça c'est clair. (...) Je suis 100% sûr que ce ne serait pas un handicap. Je suis persuadé qu'on donnera des directives très claires aux membres du CIO au moment du vote ou avant, pour dire que techniquement, il n'y a aucun problème.»

Le contexte actuel favoriserait une ouverture du CIO, ajoute M. Sieber. Ce dernier rappelle que seulement trois villes (Annecy, Munich et Pyeongchang) ont soumis leur candidature pour les Jeux d'hiver de 2018. À titre d'exemple, huit villes étaient sur les rangs pour l'organisation des Jeux de 2010. Ce rétrécissement s'explique entre autres par la difficulté de dénicher le terrain pour tenir une descente masculine, dit le membre du conseil d'administration du Comité olympique canadien. «C'est pour ça que je dis que l'ouverture est là. Il va évidemment falloir que le CIO soit conséquent avec ce qu'il dit.»

Par ailleurs, M. Sieber s'interroge sur l'héritage potentiel d'une piste olympique de descente. À part l'organisation ponctuelle de championnats du monde, il n'y en pratiquement pas, souligne-t-il.

Dans le même sens, Québec pourrait s'épargner la construction d'une piste de bobsleigh-luge-skeleton, l'un des équipements les plus chers des Jeux (celle de Whistler a coûté 100 millions) et les plus difficiles à rentabiliser par la suite. Compte tenu de la très faible popularité de ces sports dans la province, pourquoi ne pas tenir ces épreuves dans l'Ouest? demande M. Sieber. «Il y a presque 90 épreuves aux Jeux d'hiver. Qu'il y en ait cinq ou six à l'extérieur, moi, personnellement, je ne vois pas que ça puisse diminuer l'intérêt des Jeux.»

Si Québec choisit de se lancer, il faudra ensuite s'interroger sur les coûts des infrastructures, qui dépasseront le milliard de dollars, selon l'évaluation sommaire de M. Sieber. Les gouvernements fédéral et provincial accepteront-ils de se partager la facture, comme ce fut le cas pour Calgary et Vancouver?

«C'est un dossier chaud, conclut M. Sieber, qui juge que 2022 est une cible un peu hâtive. Il y a beaucoup d'argent dans un tel projet, il faut savoir si oui ou non le politique veut suivre. Et les décisions ne sont pas faciles à prendre. Il faut bien y réfléchir.»

Équipe Québec, chargée par le gouvernement Charest d'évaluer le potentiel olympique de la capitale, doit déposer son rapport dans la première moitié du mois de janvier.

Photo: PC

Walter Sieber