Marie-Ève Drolet n'a pas changé. La même silhouette filiforme, le même style sur la glace, le même équipement qu'en 2002. Et toujours aussi timide avec les médias.

Drolet n'avait pas envie de partager ses états d'âme à la veille de sa première compétition d'importance depuis les Jeux olympiques de Salt Lake City, en 2002. D'un commun accord avec son entraîneur, elle a choisi de réserver ses commentaires pour la conclusion du championnat canadien ouvert de patinage de vitesse courte piste, qui se déroulera d'aujourd'hui à dimanche à l'aréna Maurice-Richard.

Après son entraînement, mercredi, Drolet a poliment décliné une demande d'entrevue de La Presse. Devant la mine étonnée du journaliste, l'athlète de 26 ans a dû expliquer qu'elle souhaitait rester dans sa bulle à deux jours du début de la compétition. «Pour ma tête», a-t-elle dit.

Décidément, elle ne fait rien comme les autres. Double championne du monde junior au début de la décennie, Drolet s'annonçait comme l'une des patineuses les plus prometteuses sur la scène internationale. Aux Jeux de Salt Lake City, elle avait fini quatrième au 1000 mètres en plus de contribuer à une médaille de bronze au relais. Une étoile était née.

Il semble que le terme de Comète, son surnom d'alors, était plus approprié. Après une sabbatique d'un an, la patineuse originaire du Saguenay avait en effet pris tout le monde par surprise en annonçant sa retraite prématurée en 2003. Elle souhaitait se consacrer totalement à ses études en psychologie.

Personne ne pensait la revoir sur un ovale de 111 mètres quand son nom a refait surface, l'été dernier. Drolet avait repris le goût du sport en initiant son chum hockeyeur aux patins à longues lames. Elle a retrouvé la forme graduellement l'hiver dernier en s'amusant sur un lac, à Thunder Bay, où elle s'était installée avec son copain.

En septembre, Drolet a officiellement repris l'entraînement au centre national de Calgary. Yves Hamelin, coordonnateur courte piste à Patinage de vitesse Canada, a été impressionné. «C'est la même Marie-Ève qu'on connaissait il y a 10 ans. Techniquement, elle n'a rien perdu ou presque», disait-il il y a deux mois.

Drolet a confirmé le sérieux de son retour en dominant une sélection nationale à Calgary à la fin novembre. Elle s'amène à Montréal avec l'ambition de se qualifier pour les deux dernières Coupes du monde de la saison et les Championnats du monde, en mars. Son objectif ultime est d'obtenir sa sélection pour les Jeux olympiques de Vancouver de 2010.

Les performances de Drolet seront évidemment scrutées à la loupe, ce week-end, à l'aréna Maurice-Richard. Tania Vicent est le seul membre de l'équipe féminine actuelle à l'avoir côtoyée. Le vétéran de 16 saisons s'est d'ailleurs beaucoup fait questionner par ses jeunes coéquipières. «Tout le monde est curieux de voir ce qu'elle va faire», a constaté Vicent, quelques minutes avant d'aller fraterniser avec Drolet.

Vicent compare le talent de Drolet à celui de Kalyna Roberge, un prodige de 22 ans qui domine la scène nationale depuis deux ans. «Mais de là à dire qu'elle battra Kalyna ici... À moins d'incident, oublie ça tout de suite, a prévenu Vicent. Kalyna est très, très en forme et elle a plus d'expérience en Coupe du monde.»

De l'avis de plusieurs, le sport a beaucoup évolué depuis 2002, en particulier du côté féminin. Les vitesses ont augmenté et les comportements tactiques ont changé. Si la technique semble à point et la forme au rendez-vous, Drolet devra s'adapter rapidement. «Une qualification n'est pas impossible, mais ses feelings de course seront déterminants, observe Yves Hamelin. Là, c'est vraiment l'inconnu.»

Drolet laissera parler ses lames.

 

Drouin, SimonUn poker entre amis

Après des mois à partager les efforts à l'entraînement et les voyages aux quatre coins de la planète, les meilleurs patineurs canadiens devront mettre amitiés et fraternité de côté le temps des championnats nationaux ouverts de patinage de vitesse courte piste, d'aujourd'hui à dimanche, à l'aréna Maurice-Richard. «Au niveau national, c'est LA compétition de l'année, résume Martin Gagné, entraîneur de l'équipe féminine. Pour les patineurs, c'est comme jouer une partie de poker entre amis. Il y en a qui vont faire de l'argent, d'autres qui vont en perdre.» À l'issue des trois jours de compétition, les meilleurs au classement cumulatif des trois distances (500, 1000 et 1500 mètres) seront choisis pour participer aux deux dernières Coupes du monde de la saison et aux championnats mondiaux. Chez les hommes, Charles Hamelin et Olivier Jean jouissent déjà d'une longueur d'avance en vertu de leurs résultats lors de la première sélection de Vancouver, en septembre. Absentes à cette compétition en raison de blessures, Kalyna Roberge et Tania Vicent effectueront un retour aux championnats canadiens, qui représentent aussi un excellent étalon de mesure avant les sélections olympiques d'août prochain, à Vancouver.