Au printemps, chantait Joe Dassin, les Québécois « sortent de la terre ». À 1 degré Celsius, on range les tuques, les mitaines et les foulards. À 10 degrés, on invite tout le voisinage, on sort la télé sur le patio et on regarde les matchs de hockey sous une petite laine. De préférence, tricolore. Bleu-blanc-rouge.

Alors, sentez-vous la fièvre des séries monter en vous ?

Non ?

Une petite tiédeur, peut-être ?

Même pas ?

En toute confidence, moi non plus. C’est la fin de saison la plus plate depuis… depuis que je suis le hockey, en fait. La course aux séries ? Quelle course aux séries ? Les 13 équipes de tête sont loin devant. Les 14 retardataires sont loin derrière. Et dans le centre mou, cinq équipes luttent pour les trois dernières places. Ça m’excite autant qu’une qualification du 10 000 mètres, dans laquelle les meneurs ont pris deux tours d’avance sur les plus lents.

Où la fin de saison est-elle particulièrement lassante ? À Montréal, où le Canadien termine sa campagne dans l’indifférence. Qu’il gagne ou qu’il perde ses cinq derniers matchs, ça ne changera pas grand-chose.

Tut tut tut, monsieur le chroniqueur.

Vous oubliez le plus important.

La loteriiiiiiiiiiiie.

Ah oui, c’est vrai. La loterie. Pour bien des partisans, ce fut la raison d’être de cette saison. Désolé, mais au point où nous en sommes, le sort du Tricolore est pas mal réglé. Ou bien il finira 27e. Ou bien il finira 28e. Dans les deux cas, les probabilités de gagner la loterie sont presque identiques. Entre 7,5 % et 8,5 %.

Que le Canadien soit éliminé ne surprendra personne. Même la direction du club n’a jamais cru à une qualification en séries. L’objectif de la saison, nous avait prévenus le directeur général Kent Hughes en septembre dernier, sera le développement des jeunes talents de l’organisation.

Développement, il y a eu. Mais aujourd’hui, il n’y a plus grand-chose à observer. Cole Caufield est absent depuis janvier. Juraj Slafkovsky, aussi. Ils ne reviendront au jeu qu’en septembre. Kaiden Guhle et Arber Xhekaj seront également au repos jusqu’à la prochaine saison. Rafaël Harvey-Pinard ? Il a raté le match de samedi et l’entraînement de lundi en raison d’une blessure.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Cole Caufield

Tant qu’à être dans les mauvaises nouvelles, aussi bien arracher le diachylon d’un seul coup : Alex Belzile s’est fracturé une jambe samedi. Sa saison est terminée. Scénario semblable pour Sean Monahan, qui s’est fait opérer à l’aine. Ah oui, David Savard est lui aussi en congé forcé pour le reste de la campagne. Petite pensée pour les partisans qui ont payé le plein prix pour un des trois derniers matchs à domicile. J’espère que le spectacle sera meilleur que celui offert samedi soir face aux Hurricanes de la Caroline.

Malgré ses insuccès, le Tricolore peut quand même trouver du réconfort. Ses partisans l’ont soutenu. Ils lui ont pardonné les dégelées récentes : 9-5 contre les Panthers de la Floride, 8-4 contre l’Avalanche du Colorado, 50 tirs contre 14 face aux Hurricanes. Pourquoi les amateurs sont-ils si patients ? Si indulgents ?

Parce que le Canadien leur a bien vendu un rêve.

Celui de pouvoir repêcher Connor Bedard. Une mauvaise saison permettrait d’augmenter les chances d’acquérir ce joueur phénoménal, dont les statistiques dans le junior se comparent avantageusement à celles des plus grandes vedettes de l’histoire. C’est correct. En effet, les joueurs de sa trempe sont extrêmement rares.

S’il y a une saison où le Canadien pouvait se permettre de s’écrouler, c’est celle-ci.

Si le Canadien gagne la loterie pour la deuxième saison consécutive, toutes les défaites seront vite oubliées. Mais s’il perd le tirage et qu’il repêche au sixième, au septième ou au huitième rang, les partisans seront-ils aussi patients et indulgents la saison prochaine ? Et la suivante ? Il n’y aura pas de Connor Bedard à réclamer toutes les années.

J’ai parfois l’impression qu’il y a des partisans très excités à l’idée de participer à une grande expérience. Quelque chose comme Moneyball 2.0. Pourtant, le Canadien ne fait pas les choses différemment des autres équipes du bas du classement. Il mise sur le repêchage. Comme les Ducks d’Anaheim. Comme les Blackhawks de Chicago. Comme les Coyotes de l’Arizona. Comme les Canucks de Vancouver. Et comme, il y a 20 ans, les Penguins de Pittsburgh, les Capitals de Washington et les Hawks. La grande différence, c’est qu’au début des années 2000, les règles de la loterie étaient différentes. Et il y avait moins de mauvais clubs que maintenant.

Aujourd’hui, près d’une dizaine d’organisations sont envasées dans les bas-fonds de la LNH. Malgré d’excellentes sélections au repêchage, elles peinent à sortir de la cave.

Les Sabres de Buffalo, qui ont repêché deux fois au premier rang dans les cinq dernières années, rateront les séries pour la 12e année consécutive. Les Sénateurs d’Ottawa, qui ont visé juste avec Tim Stützle (3e) et Brady Tkachuk (4e), perdent plus souvent qu’ils ne gagnent. Pareil pour les Red Wings de Detroit, qui ont pourtant fort bien repêché récemment (Lucas Raymond, Moritz Seider, Simon Edvinsson). Ces trois clubs sont d’ailleurs tous dans la même division que le Canadien.

Souhaitons que la reconstruction du Tricolore soit plus réussie – et plus courte – que celle de ses rivaux directs. Parce que le printemps montréalais sans séries, c’est comme se faire servir du sirop de poteau à la cabane à sucre.

Il manque quelque chose.

Décès d’un gentilhomme

Il y a des gens qui, par leur implication, marquent leur communauté. C’était le cas de Luc Rivard, dont la famille a annoncé le décès lundi.

M. Rivard s’est impliqué pendant près d’un demi-siècle dans les activités sportives du Collège Stanislas, de l’arrondissement d’Outremont et de Ville Mont-Royal. Il a su transmettre sa passion pour le hockey à plus d’un millier de jeunes. Il était aussi un grand partisan de l’équipe de football des Carabins de l’Université de Montréal. La dernière fois que je l’ai croisé, c’était d’ailleurs après une partie des Bleus, l’automne dernier. Sur le chemin du retour, il s’était arrêté pour regarder une partie de baseball – une autre de ses passions.

Mes condoléances à ses proches, ainsi qu’à tous ceux qui ont eu la chance de profiter de sa bienveillance et de sa générosité.