Pendant tout l’hiver, les partisans du Canadien ont montré un soutien inconditionnel envers leur équipe. Sept défaites consécutives en décembre ? Pas grave. On vous aime. Sept autres revers de suite en mars ? Continuez comme ça. Vous êtes sur la bonne voie.

Pourquoi ?

Parce que plus le Tricolore s’enfonçait, meilleures étaient ses chances de repêcher un joueur de concession. Et puis, c’était la saison pour perdre. Le repêchage de cette année s’annonçait particulièrement riche en attaquants surdoués, ce dont le Canadien a grandement besoin.

Les partisans ont d’abord rêvé à Connor Bedard.

Sauf que le CH n’a pas remporté la loterie.

Les amateurs se sont retournés vers d’autres attaquants susceptibles d’être disponibles au cinquième rang. Matvei Michkov, brillant dans la KHL et dominant dans les tournois internationaux. Ryan Leonard, 94 points avec l’équipe junior américaine. Au pire, Zach Benson, troisième marqueur de la Ligue de l’Ouest.

Imaginez si, en plus, le Canadien ajoutait Pierre-Luc Dubois. Oh là là. Appelez les travaux publics : il faut accélérer le chantier dans la rue Sainte-Catherine pour que tous les nids-de-poule soient bouchés avant le défilé de 2027 !

Alors, ce repêchage ?

Bof.

Le Canadien a choisi David Reinbacher et acquis Alex Newhook, que personne ne confondra avec Michkov et Dubois.

Reinbacher, un défenseur droitier né en Autriche, vient de connaître une belle saison dans la Ligue nationale suisse. Bien qu’il soit un bon relayeur de rondelle en sortie de zone, il n’a pas le profil classique d’un quart-arrière offensif. C’est plutôt un généraliste. Sa courbe de progression devrait donc être plus longue que celle des jeunes attaquants boudés par le CH. Ça le placera dans une situation ingrate face aux Michkov (repêché 7e), Leonard (8e) et Benson (13e), avec qui les comparaisons seront inévitables au cours des cinq prochaines années.

Reinbacher arrivera aussi à Montréal dans un contexte particulier. Le Canadien a déjà beaucoup de jeunes défenseurs dans sa cour. Guhle, Jordan Harris, Arber Xhekaj et Lane Hutson à gauche. Justin Barron, Logan Mailloux et maintenant Reinbacher à droite. Plus les vétérans. Neuf d’entre eux ont un contrat de la LNH en vue de la prochaine saison. Même à moyen terme, il y aura plus d’assiettes que de chaises autour de la table.

On n’a jamais trop de défenseurs, plaidait l’ancien directeur général du Canadien, Marc Bergevin. Soit. Sauf que pendant que le Canadien accumule les défenseurs de qualité, il se prive de talent brut à l’avant.

Le Canadien avait une occasion en or, mercredi, de se renforcer au centre ou sur les ailes. Il a préféré une autre option. Or, comme on l’a constaté ces derniers jours dans le dossier de Pierre-Luc Dubois, c’est difficile d’acquérir un jeune marqueur sur le marché des transactions – même quand on possède une armada de jeunes défenseurs.

Qui jouera sur les deux premiers trios du Canadien, dans trois ans ? Nick Suzuki. Cole Caufield. Kirby Dach. Juraj Slafkovsky ? Ce sera nécessaire. Après ? C’est flou. Peut-être Josh Anderson, qui aura 31 ans. Peut-être Rafaël Harvey-Pinard. Peut-être Sean Farrell. Peut-être bien des joueurs, mais il y a peu de certitudes.

Alex Newhook ? Lui aussi reste un projet. Acquis de l’Avalanche du Colorado, mardi, c’est un petit attaquant qui a terrorisé les gardiens dans la ligue junior de la Colombie-Britannique et dans la NCAA. Une machine à points. Sauf que depuis son arrivée dans la LNH, c’est plus difficile. À 22 ans, il cherchait encore sa place à Denver. En séries, il ne jouait presque pas. Moins de 10 minutes par match. Il n’a compté qu’un seul but dans ses 32 dernières parties. Et comme bien des jeunes centres, il en arrache au cercle des mises en jeu (41 % cette saison, 39 % en carrière). Sa confiance est à rebâtir.

Ajustez vos attentes envers lui.

Ajustez-les aussi envers l’équipe.

Pour sortir de sa reconstruction, le Canadien devra trouver plus d’attaquants d’élite.

Ça passera par le repêchage.

Une prochaine fois.