Point. Jeu. Manche. Victoire.

Sur le terrain central, Leylah Annie Fernandez exultait. La joueuse québécoise venait d’inscrire son premier gain en carrière dans le tableau principal à Montréal, sa ville natale. Elle a célébré en soufflant de beaux bisous aux spectateurs. Jolie scène.

« Cette victoire, elle signifie tout pour moi », a-t-elle confié.

Une première victoire « à domicile », devant les amis, les proches, les anciens collègues de classe, c’est toujours un moment spécial. Et puis, il faut le reconnaître, cette victoire tombe à point.

Leylah Annie Fernandez en avait besoin.

Vraiment.

Si vous avez raté les derniers chapitres de sa carrière, sachez que la jeune Canadienne connaît une année difficile. Depuis quelques mois, elle enchaîne les performances couci-couça. « Les résultats ne sont pas là », a-t-elle convenu au début du tournoi. Conséquence : elle se retrouve dans une zone inconfortable. Entre le 50e et le 100e échelon mondial. Un peloton dans lequel le classement varie beaucoup, de semaine en semaine. Début mai, Fernandez était 50e. À la mi-juin, 95e. Cette semaine, 81e. « J’essaie de ne pas regarder le classement, pour ne pas me mettre plus de pression », nous a-t-elle expliqué mardi.

C’est mature. C’est sain. Être dans ses chaussures (griffées Federer), je n’aurais assurément pas cette discipline. Je serais plutôt du genre à rafraîchir l’écran de mon téléphone toutes les 10 secondes pour connaître en direct les résultats des autres parties, puis à sortir mon abaque pour calculer mes chances de grimper au classement.

C’est qu’au tennis professionnel, le classement a une importance capitale. Hors du top 50, tout devient plus compliqué. Prenez le tournoi de Montréal. Si Leylah Annie Fernandez n’avait pas obtenu un laissez-passer de Tennis Canada pour le tableau principal, elle aurait dû passer par les qualifications. Pas évident. Ce fut d’ailleurs le cas de celle qu’elle a battue mardi, l’Américaine Peyton Stearns, classée 53e au monde. Stearns a reconnu que la fatigue accumulée pendant le week-end a affecté son rendement face à Fernandez.

« J’ai eu une longue journée de transport vendredi. Je suis arrivée à 1 h samedi matin. Je n’ai pas eu beaucoup de temps pour récupérer, car je devais jouer en qualifications [samedi et dimanche]. »

C’est ça, la vie dans le peloton.

Lorsque Leylah Annie Fernandez était 13e au monde, l’année dernière, elle obtenait souvent un passe-droit au premier tour des tournois auxquels elle participait. Un avantage significatif. Celles qui profitent de ce privilège à Montréal, par exemple, ne disputaient leur première partie que mardi. Ça facilite la récupération. Ces joueuses sont aussi assurées de n’affronter aucune tête de série avant le troisième tour. Ça aide.

Mais maintenant qu’elle est 81e au monde, Leylah Annie Fernandez a perdu ses privilèges. La semaine dernière, à Washington, elle a dû s’inscrire aux qualifications. Ce sont deux jours de compétition de plus pour accéder au tableau principal. Ça change une routine de travail.

D’où l’importance du classement – et de retourner dans le top 50 rapidement.

Comment ?

En gagnant le plus souvent possible. Car au tennis, vous n’êtes que votre dernière année. Seules vos victoires des 52 dernières semaines comptent. Les précieux points acquis par Leylah Annie Fernandez en finale des Internationaux des États-Unis, en 2021 ? Ils sont périmés. Et puisque ses résultats cette saison ont été inconstants, elle est forcée de ramer fort, très, très fort, pour déjouer le vent de face.

La bonne nouvelle, c’est qu’elle en est capable.

Elle l’a prouvé, il y a tout juste deux ans, en battant régulièrement les meilleures au monde. Elle a déjà réussi à éliminer Aryna Sabalenka, Elina Svitolina, Naomi Osaka et Angelique Kerber dans une seule et même semaine. Même cette saison, malgré tous ses problèmes, elle a quand même gagné deux fois des manches face à Caroline Garcia, sixième joueuse mondiale.

Leylah Annie Fernandez doit maintenant rebâtir sa confiance.

Un match à la fois.

Une victoire à la fois.

En souhaitant que celle de mardi lui donne l’élan nécessaire pour rebondir.