(Québec) Derek Gee avait à peine 13 ans lorsqu’il a assisté au tout premier Grand Prix cycliste de Montréal, le 12 septembre 2010.

Avec son père, le cycliste d’Ottawa s’était joint aux West Quebec Wheelers, un club local, pour pédaler jusqu’à la métropole la veille du départ. Le lendemain, il s’était offert un tour du circuit en matinée.

Après la victoire du Néerlandais Robert Gesink, l’adolescent avait obtenu un autographe de Thomas Voeckler, qui avait gagné deux jours plus tôt à Québec. Le champion français lui avait donné ses gants faits sur mesure aux couleurs bleu-blanc-rouge.

« C’était vraiment fantastique parce que c’était la première fois que je voyais de véritables pros dans la vraie vie », a souri Gee lors d’un point de presse avec Hugo Houle et Guillaume Boivin, jeudi après-midi, à Québec.

Je connais l’impact que ça a eu sur moi : rencontrer les pros, les voir courir en personne, Voeckler qui me donne ses gants… Ça m’est vraiment resté et ça m’a motivé à vouloir devenir un pro. C’était cool de voir l’envers du décor, en quelque sorte.

Derek Gee

Après une attente plus longue que prévu en raison des deux annulations dues à la pandémie, Derek Gee ne tient plus en place à l’idée de participer aux courses qui l’ont fait rêver.

Aux côtés de ses compatriotes Houle, Boivin et Michael Woods, il sera ce « véritable pro » qui enfourchera son vélo pour défendre les couleurs de l’équipe Israel-Premier Tech (IPT) au 12Grand Prix cycliste de Québec, vendredi.

PHOTO JAMES STARTT, FOURNIE PAR GPCQM

Guillaume Boivin, Hugo Houle et Derek Gee

Gee n’a pas volé sa sélection à ces classiques auxquelles il ne devait originalement pas prendre part. Ce n’est qu’en accumulant les exploits au dernier Giro, en mai, qu’il a osé solliciter cette faveur aux dirigeants d’IPT.

« Aussitôt que j’ai commencé à obtenir des résultats, j’ai demandé : “Eille, est-ce que je peux faire Québec-Montréal ?” »

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« Inconnu » au départ de son premier grand tour, qu’il souhaitait simplement terminer, le Canadien de 26 ans a été la révélation du 106Tour d’Italie, à l’issue duquel il a été élu coureur le plus combatif.

Quatre fois deuxième et deux fois quatrième, la seule chose qu’il n’a pas réussi à accomplir est de remporter une étape.

« L’an prochain, le grand objectif sera d’obtenir une victoire au Giro ou dans un grand tour. Ce n’est pas un but que je me serais fixé auparavant, mais après être passé si près, si souvent, j’en veux vraiment une ! »

Gee, qui a décroché une prolongation de contrat inédite jusqu’en 2028, ne fait pas une obsession du Tour de France, à tout le moins pas pour l’an prochain, même s’il s’y voit évidemment un jour.

Le longiligne athlète de 1,89 m aura déjà l’avantage de s’exprimer en français, ce qui a paru surprendre son coéquipier Boivin : « Faudra faire attention, je ne savais pas qu’il parlait aussi bien que ça ! »

Pour Québec et Montréal, Gee a modestement annoncé qu’il était là pour acquérir de l’expérience avant tout.

PHOTO OLI SCARFF, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Derek Gee sur une route d’Écosse lors des Championnats du monde de cyclisme de Glasgow, le 11 août dernier

Après sa participation aux Mondiaux de Glasgow, où il a fini 17e du contre-la-montre sur route et contribué à la sixième place du Canada à la poursuite masculine sur piste, il a pris part au Renewi Tour en Belgique (72e) et pris le 40rang à la classique du Maryland, dimanche.

Gee n’était pas en mesure de se prononcer sur l’état actuel de ses jambes. Palpant la cuisse de son voisin, Houle, troisième au Maryland, a assuré que tout était en ordre… La recrue compte sur un coéquipier comme lui pour l’initier aux subtilités de ces épreuves en circuit.

« Ces courses représentent un énorme objectif d’ici la fin de ma carrière, a précisé Gee. Cette année, je crois qu’il y aura beaucoup d’apprentissages, en particulier des gars plus expérimentés. Mais je sens que je connais bien les parcours pour les avoir vus si souvent à la télé. Je pense que Montréal me convient mieux. C’est certain qu’un jour, je veux avoir le niveau pour décrocher un excellent résultat ici. »

Ce sera alors à son tour d’inspirer de jeunes coureurs et, qui sait, leur remettre ses gants feuille d’érable. Ceux de Voeckler, à qui il a raconté l’anecdote de 2010 en le croisant aux Championnats du monde l’an dernier, sont toujours dans sa chambre d’enfant à la résidence familiale d’Ottawa.