On dit souvent de la défense qu’elle fait gagner des championnats. Il serait évidemment fantaisiste de prédire les grands honneurs aux Alouettes, mais leur défense leur aura au moins fait gagner un match.

Celui de dimanche soir, en l’occurrence, alors que les Oiseaux ont défait les Stampeders de Calgary par la marque de 25 à 18.

En fait, heureusement que les joueurs défensifs étaient là, car ce n’est pas l’unité pilotée par le quart-arrière Cody Fajardo qui a pris les choses en main. Mais nous y reviendrons.

Un seul touché a été inscrit dans cette rencontre, et il est allé à la fiche du demi de coin Kabion Ento, à la suite d’une interception. Cet ancien receveur ne s’est pas fait prier pour galoper sur 53 verges jusqu’à la zone des buts, sans savoir que c’est la seule fois de la soirée qu’une équipe inscrirait six points d’un coup.

Se souvenait-il d’avoir déjà marqué le seul touché de son équipe dans une victoire ? « Peut-être, en fait je ne sais pas trop, peut-être au secondaire ! », a-t-il lancé après la rencontre.

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Kabion Ento (48) célèbre son touché.

Ce succès arrivait à point pour celui qui avait connu une sortie difficile contre les Argonauts de Toronto il y a deux semaines. Dimanche, il avait par ailleurs été inséré du côté court, lui qui avait jusque-là évolué sur l’autre flanc.

« Je suis très fier de lui, a dit l’entraîneur-chef Jason Maas après la rencontre. Je lui avais dit : tu as beaucoup de chances de faire des jeux clés, mais tu n’en as pas encore réalisé. Voilà qu’il a fait le plus gros jeu du match. »

L’autre « plus gros jeu » est sans doute celui de Kordell Rodgers, avec moins de deux minutes à écouler. Le demi défensif a lui aussi réussi une interception à quelques verges de sa zone des buts.

Le pire, c’est que, malgré cette action, il a fallu attendre la toute dernière action de la rencontre, au fond du territoire des Oiseaux, pour que l’issue du match soit scellée. La Ligue canadienne aura ligue « canadienné » jusqu’au bout.

C’était une atmosphère de séries éliminatoires ! Je voulais me lever pour mon équipe. Notre unité défensive a joué avec beaucoup de fierté. On a plié, mais on n’a jamais cassé.

Kordell Rodgers

« On savait ce qu’il fallait faire », a renchéri le vétéran Shawn Lemon, dont c’était le premier match dans l’uniforme montréalais.

La défense locale a, du reste, réalisé trois sacs du quart, soit presque la moitié de sa chasse (7) des cinq matchs précédents. Aussi bien dire que c’était sa soirée. Heureusement…

Attaque confuse

Car autrement, les deux botteurs se sont échangé pas moins de 12 placements, tout près du record de la Ligue canadienne (13). Et dire que David Côté, des Alouettes, a raté une tentative de placement au début du deuxième quart. L’histoire aurait pu s’écrire sous nos yeux. Il est presque difficile de l’écrire sans arrêter de trembler.

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David Côté (15)

Plus sérieusement, même si Jason Maas a salué le fait que ses hommes aient généré six possessions résultant en des points – même sept, en comptant le point hérité d’un simple –, l’attaque montréalaise cherche encore ses repères.

Cody Fajardo a réussi sa plus longue offrande de la soirée grâce à une remise de 31 verges à Kaion Julien-Grant. Il a distribué les cadeaux à ses receveurs, sans jamais accomplir le jeu payant. Il a été limité à seulement 158 verges. À sa première apparition de la saison, Tyler Philpot n’a été visé qu’une fois – sans succès.

Au sol, William Stanback a établi un sommet personnel cette saison en amassant 86 verges. Il en a même ajouté 18 par la voie des airs. Comme lors du dernier match, il a montré des signes du joueur dominant qu’il a jadis été, notamment en obtenant deux premiers jeux, coup sur coup, en fin de premier quart. Or, la dernière fois, ces flashs ont été isolés, sans réel impact sur le cours de la rencontre.

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William Stanback (31)

Fajardo a néanmoins distribué les compliments. À Stanback, « le Stan que j’aime voir ». À David Côté, « l’un des meilleurs botteurs de la ligue », qui ne s’est pas laissé abattre par deux erreurs successives tôt en soirée. Et à sa ligne offensive, qui l’a nettement mieux protégé que depuis le début de la campagne, n’allouant qu’un sac.

Ces gars ont joué un match incroyable. Je suis extrêmement fier d’eux. Ils ont été traînés dans la boue dans les médias, mais ils se sont présentés chaque jour au travail avec le sourire. Le système [offensif] est nouveau pour à peu près tout le monde. On va continuer d’apprendre ensemble.

Cody Fajardo

On pourrait lui souligner, plus ou moins méchamment, que les 26 sacs dont il avait été victime en seulement cinq joutes n’étaient pas une invention des médias, mais passons là-dessus.

Aux yeux de l’entraîneur Maas, la ligne a connu un match « très solide ». « C’est bien de voir s’améliorer des choses sur lesquelles on travaille », a-t-il ajouté, preuve que les carences à protéger le quart étaient peut-être bien réelles.

Sur l’absence de touché offensif, un cas de figure observé déjà deux fois en six rencontres, il note qu’il y aura « évidemment » des analyses à faire. Mais il a tenu à revenir aux nombreux placements : « Quand on se place dans cette position, à un moment donné, ça va aller de l’autre côté. » Lire ici : en six points au lieu de trois.

« On est tout près », a-t-il prédit. C’est déjà un début.