Il en faut, du cran, pour remporter l’Omnium des États-Unis. Il en faut d’autant plus pour résister à Rory McIlroy et Scottie Scheffler. Pourtant, Wyndham Clark n’a jamais semblé inquiété ou même intimidé. C’est la marque des grands champions, et Clark en est devenu un dimanche soir.

Les conditions étaient parfaites au Los Angeles Country Club pour la tenue de la 123édition de l’Omnium des États-Unis.

Au pays des Lakers et des Dodgers, il y avait celui qu’on n’attendait plus, celui qu’on attendait et celui qu’on aurait dû attendre parmi les prétendants au titre en ouverture de la ronde finale.

L’ancienne étoile montante Rickie Fowler n’avait gagné aucun tournoi depuis 2019. Rory McIlroy avait terminé parmi les huit premiers à cinq de ses six derniers tournois majeurs. Puis, dernièrement, Clark avait remporté les grands honneurs au Championnat Wells Fargo disputé sur les allées du Quail Hollow Club, l’un des parcours les plus relevés en Amérique du Nord.

Sans compter Scottie Scheffler, Dustin Johnson et Xander Schauffele, également dans les parages, Clark devait surmonter trois défis relativement imposants pour espérer terminer la journée avec le trophée au bout des bras.

D’abord, dompter le parcours, de moins en moins permissif plus le tournoi progressait. Ensuite, jouer sans commettre d’erreurs. La marge était fine, voire minime, entre lui et ses poursuivants. Avec ces champions dans le rétroviseur, il fallait être parfait. Puis, justement, faire fi de tous ces bonzes du golf moderne, tous capable de jouer mieux que lui dans un contexte aussi tendu. Il a finalement rendu un pointage cumulatif de - 10.

Le tournoi s’est terminé, et à bout de souffle, Clark a franchi la ligne d’arrivée le premier en calant le dernier roulé du tournoi. Au-delà de son jeu inspirant et de sa tenue exceptionnelle, l’Américain de 29 ans ne jouait pas seul.

Sa mère, morte d’un cancer du sein en 2013, était avec lui, quelque part. Même s’il a remporté son premier tournoi majeur en carrière le jour de la fête des Pères, c’est à sa mère qu’il a dédié ses premiers mots en tant que champion.

« Ma mère me regardait aujourd’hui. J’aurais aimé qu’elle soit ici. Tu me manques, maman », a-t-il dit le trophée en main et les larmes sur les joues.

PHOTO MATT YORK, ASSOCIATED PRESS

Wyndham Clark

Ces larmes, elles ont coulé à flots lorsqu’il a poussé la balle pour la dernière fois au fond de la coupe au 18trou. Son frère, sa sœur et sa conjointe sont venus le rejoindre. Les accolades ont suivi et un immense soupir de soulagement a été émis. « J’ai rêvé à ce moment si longtemps. Je l’ai si souvent visualisé. De me tenir ici, devant vous. Je pense que c’était mon tour. »

Constance et nerfs d’acier

Clark a été en mesure d’acquérir sa victoire grâce à sa précision, sa constance et sa puissance. Trois éléments nécessaires pour réussir dans le golf d’aujourd’hui, certes. Mais le plus impressionnant est de le faire à son septième départ en tournoi majeur. Si Clark n’est pas un jeune prodige comme ses homologues du haut de tableau, il a été brillant aux moments opportuns. Comme si chaque fois qu’un rival voulait s’échapper, il l’en empêchait. Comme au jeu des marmottes dans une fête foraine.

Si son jeu court et ses coups d’approche ont fait une immense différence dans le résultat final, ses coups sur longue distance lui ont aussi permis de se distinguer. Il a été épatant au quatrième trou en faisant atterrir son coup de départ à quelques pieds de la coupe sur cette normale 3 de 233 verges.

Puis, c’est véritablement au 14trou qu’il a envoyé un message clair à tout le monde, signifiant que personne ne parviendrait à le déloger. Son deuxième coup sur cette longue normale 5 de 612 verges est arrivé sur le vert, se donnant un roulé pour l’aigle. Il a finalement réussi un oiselet. Lui-même a qualifié cette séquence de « meilleur coup de la semaine ».

L’ultime deuxième

Ce n’est pas faute d’avoir essayé, mais McIlroy devra à nouveau se contenter du deuxième rang. De loin le joueur le plus constant en tournoi majeur depuis sa renaissance en 2019, le troisième golfeur au classement mondial est encore arrivé à court, en terminant deuxième, à un coup de Clark et d’un cinquième sacre majeur.

PHOTO MICHAEL MADRID, USA TODAY SPORTS

Rory McIlroy

Depuis 2019, McIlroy a pris part à 18 tournois majeurs ; 11 fois il a terminé dans le top 10, et à cinq reprises parmi les cinq premiers.

C’est également la troisième fois de sa carrière qu’il finit bon deuxième.

Habituellement, c’est soit la ronde du jeudi, soit celle du vendredi qui ruine ses chances. La plupart du temps, McIlroy démarre lentement, mais termine fort. Cette semaine en Californie, l’inverse s’est produit. Des rondes de 65, 67, 69 et 70 n’auront pas été suffisantes pour renouer avec un titre majeur pour la première fois depuis 2014.

Le Nord-Irlandais n’a pas à se gratter la tête bien longtemps pour mettre le doigt sur ce qui est allé de travers. La réponse réside dans une pièce de son équipement. Et c’est la plus importante d’entre tous. Le fer droit.

La distance entre sa balle et le trou lors des roulés importants est la même qui le sépare du titre. À moult reprises, il a effleuré la coupe. Si ce n’était de son manque d’opportunisme sur les verts, le sort de ce tournoi aurait été scellé dès la moitié du neuf de retour. Il a terminé la ronde avec une moyenne de deux roulés par trou, au 50rang parmi les participants. Arrivé au 13trou, il avait atteint 12 verts en régulation, mais seulement une fois il avait eu besoin d’un seul roulé.

« J’ai raté mes chances avec mes roulés. C’était déjà assez compliqué d’envoyer la balle proche du trou », a-t-il dit au terme de sa ronde.

Entre le deuxième et le 13trou, McIlroy a fait uniquement des normales. Cependant, pour gagner des tournois majeurs, il faut être anormalement opportuniste. Et l’homme de 34 ans le sait mieux que personne.

« Je me suis battu jusqu’à la fin, mais je n’ai pas terminé le travail. […] Je sais que je suis là. J’y suis presque. La marge est si fine à ce niveau. Je dois continuer de me mettre dans ce genre de situation et les bonnes choses arriveront. »

Après une séquence catastrophique au 14e, McIlroy a mis la pression sur Clark lors des quatre derniers trous pendant que le futur champion s’emmêlait les pinceaux avec des bogueys.

Clark a toutefois résisté et grâce à ce triomphe, il rejoint sa mère parmi les éternels.

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Une victoire pour Étienne Papineau

Simultanément à l’Omnium des États-Unis se déroulait l’Omnium Royal Beach Victoria, en Colombie-Britannique, la première épreuve de la saison du circuit PGA Tour Canada. Pour la première fois depuis 10 ans, un Québécois a obtenu les grands honneurs. Étienne Papineau, de Saint-Jean-sur-Richelieu, a été épatant avec une ronde finale de 64. Il a terminé le tournoi avec un cumulatif de - 18, cinq coups devant les Américains Chris Korte et George Kneiser. L’année dernière, Papineau avait pris part à l’Omnium Waste Management de Phoenix. Il y a quelques jours, il a également foulé les allées de l’Omnium canadien, où il avait remis des cartes de 73 et 72.

Nicholas Richard, La Presse