(Washington) Les responsables du Fonds public d’investissement (PIF) d’Arabie saoudite ont accepté d’investir plus de 1 milliard US dans une nouvelle entité commerciale contrôlée par le circuit de la PGA et Greg Norman serait chassé de la présidence du circuit LIV Golf si l’entente entre les Saoudiens et le circuit de golf américain est conclue, a déclaré un dirigeant de la PGA au Congrès américain, mardi.

Le pacte permettant au PIF d’investir dans le circuit de la PGA a secoué l’univers du golf et contraint le Congrès américain ainsi que le département de la Justice des États-Unis à se pencher sur celui-ci, afin de déterminer s’il respectait ou non le droit de la concurrence américain. Le Sous-comité permanent d’enquêtes (Permanent Subcommittee on Investigations) a publié des documents au sujet des discussions qui se sont déroulées avant l’audience de mardi — au cours de laquelle les architectes de la fusion et un dirigeant du circuit de la PGA devraient témoigner.

Parmi les découvertes du sous-comité, on retrouve des discussions concernant la possibilité d’offrir à Tiger Woods et Rory McIlroy leur propre équipe chez LIV Golf, une proposition qui ne se serait jamais rendue aux oreilles des joueurs.

Aucune indication durant l’audience, mardi, n’a laissé entendre que le Congrès allait empêcher la PGA de devenir partenaire avec les Saoudiens.

Le président du sous-comité, le sénateur Richard Blumenthal, s’est dit troublé par les implications géopolitiques d’une telle association. Il a rappelé la piètre feuille de route de l’Arabie saoudite en matière de droits de la personne. Cependant, les républicains faisant partie du comité se sont montrés plus cléments envers la PGA et la menace devant laquelle elle se retrouve quand on parle du PIF, lequel gère environ 600 milliards d’actifs — soit environ 500 fois la valeur de la PGA.

« Nous sommes ici parce que nous sommes préoccupés de l’achat, par une monarchie absolue qui utilise sa richesse, d’une institution américaine », a déclaré le sénateur Blumenthal.

Le 6 juin dernier, la PGA et le fonds saoudiens ont accepté d’abandonner toutes les poursuites lancées les uns contre les autres et plutôt d’unir leurs intérêts commerciaux dans une nouvelle entité commerciale, tout en maintenant le statut sans but lucratif du circuit. Quand Blumenthal a demandé quel montant les Saoudiens s’étaient engagés à contribuer à cette nouvelle aventure, le chef des opérations de la PGA, Ron Price, a répondu sous serment « plus de 1 milliard US ».

Blumenthal a questionné sans relâche Price et Jimmy Dunne, un membre du conseil d’administration de la PGA et acteur clé dans l’entente avec les Saoudiens, à savoir pourquoi le circuit n’avait pas tenté de trouver des sources de financement alternatives afin de rivaliser avec le circuit LIV et le PIF. En réponse, Price et Dunne ont indiqué que de nouvelles ententes commerciales avec d’autres entreprises n’auraient pas empêché le circuit LIV et le PIF de continuer leur campagne de charme auprès des principales têtes d’affiche de la PGA.

« Mon principal objectif ici est de rapidement tourner la page sur cette période tumultueuse, pour qu’il n’y ait qu’un seul circuit professionnel de golf, pour le bien des joueurs, des amateurs, des commanditaires et des bénévoles », a dit Dunne.

Ceux qui s’opposent à la fusion avec le PIF ont rappelé les enjeux du royaume en matière de droits de la personne et le meurtre du journaliste Jamal Khasshogi — une commande de Mohammed ben Salmane, selon les services secrets américains, mais des allégations qu’a toujours niées le prince héritier d’Arabie saoudite. Le PIF a déjà investi dans plusieurs autres sports professionnels, dont le soccer (Newcastle United, en Premier League anglaise) et la Formule 1.

« Il y a quelque chose qui sent mauvais dans le sentier que vous avez emprunté et c’est parce que vous capitulez. Ce n’est qu’une question d’argent et c’est pour cette raison qu’il y a autant de critiques, M. Price, a affirmé Blumenthal. La part que les Saoudiens contrôleront lui donnera une domination financière. Ils vont contrôler les ficelles de la bourse. »

Cependant, le sénateur républicain Rand Paul, qui est un critique sévère du régime saoudien, a soutenu que le Congrès n’avait pas à se mêler des affaires d’une entreprise privée qui souhaite collaborer avec les Saoudiens. Il a suggéré que les États-Unis réduisent la vente d’armes à l’Arabie saoudite. De son côté, le sénateur républicain Ron Johnson a laissé entendre que l’implication de l’Arabie saoudite and le sport international pourrait mener à une amélioration de la situation des droits de la personne dans le royaume.

« Si le royaume s’implique dans le golf et d’autres sports, cela peut aider à le moderniser, à offrir des droits aux femmes. N’est-ce pas une bonne chose ? », a questionné Johnson.

Les documents diffusés mardi précisent également le rôle de chaque personne dans les négociations du côté saoudien. Parmi eux se trouvent Amanda Staveley, une investisseuse britannique qui a notamment facilité l’acquisition de Newcastle United et qui fait maintenant partie de son conseil d’administration, et Roger Devlin, un homme d’affaires britannique. Devlin a été le premier à entrer en contact avec Dunne afin de sonder l’intérêt pour une éventuelle fusion avec le circuit LIV, démontrent les documents.

Une note du bureau de Staveley intitulée « Le Meilleur des deux mondes » inclut la suggestion qu’on octroie une équipe chacun à Woods et McIlroy, et suggère que les légendaires golfeurs devraient participer à 10 tournois du circuit LIV chaque année. Rien dans les documents n’indique toutefois si Woods et McIlroy, qui sont toujours demeurés fidèles à la PGA, ont été informés à ce sujet.

Woods n’a disputé que deux tournois cette année et récupère présentement d’une intervention chirurgicale à une cheville. Cette blessure découle d’un accident de la route qui s’est produit à Los Angeles au début de 2021 et qui, selon l’Américain, le limite énormément dans sa capacité à participer à d’éventuels tournois de golf.