Le Canadien entame sa saison ce soir à Buffalo, laissant à Montréal des attentes et des rêves gonflés à l'hélium.

Mais Guy Carbonneau compte demeurer vigilant afin que ses joueurs, justement, ne s'enflent pas la tête. 

«Mon travail est de garder les joueurs sur terre, qu'ils ne se mettent pas à penser au match des Étoiles ou à quoi que ce soit d'autre», a expliqué Carbo, hier après-midi.

«Je veux qu'on se concentre sur le prochain match et pas plus loin.»

On a abondamment parlé de la conjoncture dans laquelle se trouve le Tricolore - celle d'une équipe qui, au milieu d'un anniversaire historique, termine sa traversée du désert pour enfin aspirer aux grands honneurs.

«J'ai participé à des rencontres avec l'état-major cet été, a dit Carbo. On savait que ce serait difficile avec le Centenaire. Mais je voulais assainir l'atmosphère, en ce sens qu'il ne fallait pas qu'il y ait une célébration à chaque semaine.

«On veut donner aux fans ce qu'ils méritent, mais il faut s'assurer que les joueurs puissent livrer ce qu'ils ont à livrer. Il faut jouer les 82 matchs...»

Qui sait si le docteur Mulder n'a pas trouvé un vaccin pour immuniser les joueurs contre les sparages auxquels on risque d'assister!

Bonne bouche

Mais il y a plus.

Il y a le fait que la Flanelle est tricotée serré et que les analystes lui prédisent de grandes choses.

Au réseau TSN, mercredi soir, une majorité de directeurs généraux disaient s'attendre à retrouver le Canadien en finale de la Coupe Stanley face aux Red Wings de Detroit.

Que de chemin parcouru depuis l'an dernier, alors que les «experts» voyaient dans leurs feuilles de thé une longue et triste saison!

«Ces dernières années, on avait l'habitude d'entendre "est-ce que le Canadien va faire les séries " ou encore: "s'il les fait, ce sera de peu"», a rappelé l'attaquant Steve Bégin.

«Mais l'an dernier, on était insatisfaits des attentes placées en nous et on s'est regroupés pour faire mentir les pronostics.

«Maintenant, pas mal tout le monde nous voit aller loin en séries, et il faut répondre à cela.»

D'ailleurs, l'entraîneur se dit fier de l'état d'esprit qui anime ses joueurs depuis le début du camp.

«Ils sont arrivés en étant à l'aise avec ce qu'ils avaient accompli l'an dernier, a relevé Carbo. Sauf que la défaite en séries leur a apporté une motivation supplémentaire.»

Les joueurs ont eu bonne bouche et ils en veulent plus. Comme leurs fans.

Le vertige d'être au sommet

Même s'il aborde cette saison de la même façon que la précédente, Guy Carbonneau dit préférer la position dans laquelle il se retrouve aujourd'hui.

«Le travail des joueurs et des entraîneurs est de s'améliorer pour atteindre le sommet. C'est sûr que ça crée de la pression, mais comme on dit toujours, c'est plus facile de se rendre au sommet que d'y rester.»

«Tout le monde nous voit au top et c'est vrai que c'est un peu énervant, concède Steve Bégin. Mais il faut composer avec ça.»

En fait, les attentes sont si hautes que Bégin s'attend même à ce que les adversaires du Tricolore tentent de lui chanter la pomme et de l'amadouer.

«Quand on parle de toi en bien, il faut en prendre et en laisser, a-t-il rappelé. Tout le monde va nous flatter dans le sens du poil, mais il ne faut pas se mettre dans le champ pour autant.

«Car nos succès ne viendront pas d'eux-mêmes...»

Un autre départ à l'étranger

Avec la névrose qui guette déjà la moitié des amateurs, ce n'est peut-être pas une mauvaise chose que le Canadien entreprenne son calendrier avec trois matchs à l'étranger.

En fait, c'est ce que le CH fait à chaque saison depuis la fin du lock-out et les succès ne mentent pas : lors des trois dernières saisons, il n'a jamais récolté moins de cinq points sur une possibilité de six.

«Ce n'est pas nous qui demandons de commencer la saison à l'étranger, a précisé Carbonneau. C'est sûr qu'on aimerait amorcer notre calendrier à la maison de temps en temps, mais c'est difficile de garder les pieds sur terre avec tout ce qui se dit dans les médias et dans la rue.

«En commençant à l'étranger, on reste loin des distractions et ça va nous donner une chance de nous préparer.»

«C'est bon de pouvoir avoir quelques matchs derrière la cravate avant de se présenter devant nos partisans, a enchaîné le défenseur Mike Komisarek. C'est agréable de bénéficier de l'intensité du Centre Bell dès le départ, mais si l'on peut revenir à la maison avec déjà un bon élan, ce serait encore mieux.»