Je m'étais promis, bien naïvement sans doute, de ne plus toucher au sujet des gardiens pour au moins deux semaines. Eh bien, je vais vous le dire tout de suite, c'est raté. Parce que dans cette ville, on ne passe pas une journée sans revenir sur le sujet des gardiens. C'est plus fort que nous, un peu comme jaser du déneigement ou de Guillaume Latendresse.

Vous le savez sûrement, la machine à rumeurs est repartie. Le sujet du moment? Notre Slovaque favori à tous, j'ai nommé Jaroslav Halak.

Il y a un mois environ, on chuchotait que les Red Wings de Detroit l'avaient à l'oeil. Hier, sur les ondes de CKAC, c'est Jacques Demers qui laissait entendre que «trois ou quatre équipes» ont le gardien de 24 ans dans leur ligne de mire. Les Blues de St. Louis seraient du groupe, selon une autre rumeur qui circule.

J'espère seulement que si un DG ennemi appelle au Centre Bell pour jaser de Halak, Bob Gainey va raccrocher aussi vite que s'il y avait un journaliste à l'autre bout du fil.

Soyons sérieux. À moins de recevoir une offre qu'il ne peut refuser (le genre d'offre qui comprend Crosby ou Ovechkin, mettons) le DG du Canadien ne va pas échanger son gardien numéro deux. Surtout pas maintenant, avec ce calendrier olympique surchargé, propice aux blessures dans le bas du corps, dans le haut aussi. Imaginez un peu s'il fallait que Carey Price se blesse... Qui viendrait sauver le CH?

Je parlais, hier, avec un dépisteur de l'Ouest qui m'a confirmé une chose: oui, Halak intéresse certains clubs. Parce qu'il est jeune. Parce qu'il ne coûte pas cher (800 000$ cette saison), et parce qu'il ne coûtera pas trop cher non plus à son prochain contrat, au terme de la présente saison. Assurément moins de 2 millions par année.

En plus, le jeune homme a bonne réputation. Bon garçon. Réservé. Pas le genre à faire des vagues. Bref, Halak a pas mal de «upside», comme on le dit dans le milieu. D'où ces yeux ennemis qui l'épient depuis les hauteurs du Centre Bell.

Sauf qu'on n'échange pas un joueur comme ça avant de savoir si le Sauveur est vraiment un sauveur. Oui, je sais, Carey Price joue enfin comme le choix de première ronde qu'il est depuis quelques semaines. Mais est-ce que ça va durer?

Souvenez-vous de la saison dernière, quand Price en arrachait lors de l'hiver... Qui avait sauvé la saison du Canadien en gardant les buts comme si c'était lui, le sauveur? Halak.

Bien sûr, rien de cela ne va empêcher la machine à rumeurs de s'emballer encore et encore. Le raisonnement est facile: le Canadien a deux bons gardiens, il n'y a qu'un seul poste de numéro un, alors évidemment, il faut en échanger un des deux. Et ce n'est pas Price qui va partir.

Mais un tel raisonnement vient masquer la réalité, qui est autrement plus complexe. Et la réalité, c'est que Gainey a tout à perdre en échangeant Halak. Parce que Halak est un gardien fiable, mais aussi parce que monsieur Bob n'obtiendrait probablement pas grand-chose en retour. Je le répète, les bonnes années des tours de magie signés Sam Pollock sont bel et bien révolues...

Le seul qui pourrait changer la donne, c'est Halak lui-même. Comment? En grimpant vers le bureau de Bob Gainey, et en exigeant un échange sur-le-champ. Mais il faut avoir parlé à Halak cinq minutes dans sa vie pour comprendre que ça, ce n'est pas son genre. Mais pas du tout.

Allan Walsh, le célèbre agent du gardien slovaque, m'a déjà dit que son client était du type patient, et qu'il allait attendre son tour. En tout cas, s'il continue à jouer comme ça, Halak pourrait mériter une spectaculaire augmentation de salaire au moment de son autonomie complète.

En attendant, je présume qu'il va continuer à faire ce qu'il fait depuis deux ans: être un coéquipier modèle, et sauver les fesses de ses collègues quand il le faut.