Gilles Meloche a découvert Kristopher Letang à Val-d'Or il y a quelques années en épiant Luc Bourdon.

L'entraîneur des gardiens des Penguins de Pittsburgh était alors dépisteur avec l'équipe lorsqu'elle a repêché Letang en troisième ronde en 2005.

«On savait qu'on repêcherait tôt cette année-là et que Bourdon allait être un choix de première ronde, alors on le suivait partout, a dit Meloche, hier, au bout du fil. Chaque fois qu'on allait à Val-d'Or, on faisait d'une pierre deux coups. Mais souvent, après les matchs des Foreurs, je relisais mes rapports et j'avais donné de meilleures notes à Letang.»

Il y a finalement eu loterie cette année-là, remportée par les Penguins. Sidney Crosby s'est retrouvé à Pittsburgh et Letang était encore disponible au premier rang de la troisième ronde. Ça tombait bien parce que Pittsburgh ne détenait pas de choix entre les premier et 61e rangs. Ils ont repêché un certain Michael Gergen avec le dernier choix de la deuxième ronde et Letang avec le premier choix de la troisième ronde. Ils auraient bien pu inverser leurs choix que ça n'aurait rien changé puisqu'ils possédaient deux choix consécutifs.

Letang, 22 ans, a signé, hier, une prolongation de contrat de quatre ans qui lui rapportera 3,5 millions par saison. Pour les curieux, Gergen s'est exilé en Autriche cet hiver après quatre ans dans la NCAA.

Bourdon aurait sans doute connu une belle carrière lui aussi, avec les Canucks de Vancouver, si la mort ne l'avait pas fauché à un si jeune âge.

Gilles Meloche se rappelle bien de la période qui a précédé ce repêchage. «On croyait bien qu'il (Letang) serait encore disponible au début de la troisième ronde parce qu'il figurait loin sur la liste de la Centrale de recrutement de la LNH, a expliqué Meloche. Il n'était pas très costaud et son jeu défensif était ordinaire. Mais je le trouvais tellement mobile. Il prenait des risques, mais il s'en tirait toujours à cause de son coup de patin. Ses sorties de zone étaient impressionnantes. Tout le monde pensait que c'était un petit joueur, mais il est rendu à 6 pieds, 208 livres. Je suis allé le taquiner ce matin quand on a annoncé la signature de son contrat. Je lui ai dit de ne jamais oublier qui l'avait repêché...»

André Savard a dirigé Letang pendant quelques saisons à titre d'entraîneur des défenseurs à Pittsburgh. Savard, qui est dépisteur chez les Penguins depuis le congédiement de Michel Therrien l'an dernier, travaillait pour le Canadien lorsque les Penguins ont repêché Letang. À huit mois du repêchage, il avait fortement suggéré au groupe de dépisteurs du CH de l'avoir à l'oeil.

«Il n'avait pas un physique imposant, mais c'était un grand talent, a rappelé Savard. Il avait seulement besoin d'acquérir de la maturité et améliorer certaines facettes de son jeu, comme la transition de la défense à l'attaque. À Val-d'Or, il partait de sa zone et il transportait la rondelle d'un bout à l'autre.»

Le Canadien le voyait dans sa soupe. Mais les circonstances ont fait en sorte que Letang lui a échappé. Le CH a repêché Carey Price au cinquième rang, puis Guillaume Latendresse, coté par plusieurs à titre de choix de première ronde, au second tour, 45e. L'équipe ne repêchait pas avant le 121e rang par la suite.

«On le connaissait tous à la fin et on l'aurait repêché si on avait eu un choix de troisième ronde et qu'il avait été disponible, a affirmé André Savard. On a préféré Latendresse, qui a marqué 27 buts cette année. On sortait du lock-out et les règlements allaient changer. Avec la nouvelle interprétation des règlements, il aurait sûrement été repêché plus tôt.»

Letang n'amasse peut-être pas autant de points que certains l'espéreraient. Il en a obtenu 27 en 67 matchs cette saison. Mais son jeu défensif est nettement sous-estimé.

«Il ne sera jamais un meneur en supériorité numérique, comme Mike Green par exemple, a analysé André Savard. Mais il est très bon pour appuyer l'attaque et il est meilleur que Green en défense. Il est solide dans les coins. Solide du bâton pour enlever la rondelle à l'adversaire. Il ne perd pas les batailles serrées. Quand un bon patineur a un bon équilibre, il va être fort.»

Gilles Meloche confirme. «En ce moment, il fait partie de notre premier duo défensif avec Brooks Orpik, a-t-il dit au sujet de Letang, qui joue en moyenne 24 minutes par match depuis un certain temps. On ne le reconnaît pas encore pour son jeu défensif à l'extérieur de Pittsburgh parce qu'il était notre quatrième ou cinquième défenseur l'an passé. C'est juste cette année qu'il est monté dans la hiérarchie.»

Le repêchage de 2005 a sauvé les Penguins. «Si on ne gagnait pas la loterie, l'équipe ne serait plus à Pittsburgh, a dit Meloche. On a pu mettre la main sur deux joueurs d'impact dans le même repêchage, c'est rare. L'année précédente, c'était Evgeny Malkin, Alex Goligoski et Tyler Kennedy. Cinq joueurs en deux ans qui sont des réguliers au sein de l'équipe, c'est satisfaisant.»