P.K. Subban pourrait suivre le match de ce soir en Caroline-du-Nord du haut de la galerie de presse. C'est possible.

Certains coéquipiers du jeune défenseur considèrent même que ce serait souhaitable bien que cette décision soulèverait un tollé au point de faire passer la visite du père Noël au deuxième rang des préoccupations dans le coeur et la tête des partisans du Canadien.

Non! Il n'y a pas de guerre ouverte entre P.K. Subban et les vétérans du Canadien. Il n'y a pas de jalousie non plus. Ou si peu...

Pourquoi alors souhaiter son retrait de la formation?

«Parce que vous êtes en train d'en faire un monstre, a lancé un autre membre de l'organisation lors d'un récent entretien avec La Presse. Oui, P.K. a un talent fou, mais il faut qu'il apprenne à bien l'utiliser. Et en ce moment, il gaspille ce talent en tentant de tout faire seul. Et le pire dans tout ça, c'est que vous l'encouragez dans cette démarche en l'adulant comme vous le faites. Il y a de quoi être mêlé.»

Le vous était rassembleur. Très! Il englobait les journalistes et observateurs qui font l'éloge quotidien de Subban. Sans oublier les partisans qui scandent son nom aux quatre coins du Centre Bell dès qu'ils en ont l'occasion. Des journalistes, observateurs et partisans qui s'enflamment au moindre coup d'éclat et qui ferment les yeux sur les erreurs et le non respect du jeu collectif.

Les coéquipiers de Subban, tout comme les entraîneurs et membres de l'état-major, sont bien prêts à composer avec les erreurs normales commises par un jeune qui donne ses premiers coups de patin et fait ses premières passes dans la LNH.

Mais quand ce jeune met de côté les directives imposées par la direction, respectées par le reste de l'équipe, et que l'individualisme qu'il affiche plonge son club dans le pétrin, là, ça ne va plus.

D'où les trois matchs loin des feux de la rampe qu'on a imposés à Subban il y a deux semaines. D'où celui qu'il pourrait suivre des gradins ce soir. D'où les autres qui viendront peut-être au cours de la saison. La première du jeune défenseur dans la LNH, est-il besoin de rappeler.

P.K. Subban n'était pas le responsable des victoires du Canadien en début de saison. Comme il n'est pas l'unique responsable de la glissade amorcée depuis son retour au jeu.

Ses meilleures parties, il les a disputées en passant une quinzaine de minutes sur la patinoire. En respectant le plan de match et ses coéquipiers. Mais à entendre les commentaires sur ses performances, il recréait, à lui seul, le Big Three. Serge Savard, Larry Robinson et Guy Lapointe étaient de retour dans un même corps, dans la même paire de patins.

Remarquez que cette démesure, qu'elle vienne de la galerie de presse ou des tribunes téléphoniques, est propre à la réalité du Canadien à qui journalistes et partisans peuvent promettre la Coupe Stanley une journée et l'exclusion des séries dès le lendemain.

Tout ça, bien sûr, avec sérieux et conviction!

Pourquoi se lancer dans autant d'adulation? L'absence d'une vedette, d'une vraie de vraie, depuis le départ de Patrick Roy justifie-t-elle autant de débordement?

Surtout que cette adulation a fait des victimes depuis 10 ans à Montréal: Mike Ribeiro qui fait les joies des Stars de Dallas, José Théodore et Guillaume Latendresse, pour ne nommer que ces trois joueurs, ont été adulés avant même d'avoir réalisé quoi que ce soit dans la LNH. Résultat: ils ont été mis à l'écart dans le vestiaire par des coéquipiers qui se rebiffaient face à leur notoriété aussi démesurée que prématurée. Ils ont ensuite été chassés de Montréal le corps recouvert de goudron et de plumes.

Exception faite de Théodore qui a connu la gloire à Montréal, les deux autres l'ont trouvée, ou la trouveront, ailleurs.

Pourquoi répéter la même erreur avec Subban?

Au fond, c'est sans doute le vénérable collègue Red Fisher, de The Gazette, qui a raison. Red couvre le Canadien depuis la grande émeute qui a suivi la suspension de Maurice Richard au printemps 1955. Depuis cette date, il n'a jamais parlé aux recrues. Il se donne du temps. Il leur donne du temps. Offrons donc ce cadeau à Subban...