On a souvent reproché au Québec de retarder la progression de ses jeunes hockeyeurs en ne tolérant pas la mise en échec au niveau pee-wee. On a également affirmé que nos enfants perdaient en robustesse et en virilité parce qu'on leur permettrait de frapper l'adversaire deux ans plus tard que le reste du monde.

Or, voilà que Hockey Québec pourrait au contraire faire figure de chef de file dans le domaine. USA Hockey, qui compte près de 472 000 membres, songe en effet à abolir la mise en échec avant l'âge de 13 ans, à la suite d'une discussion lors de son assemblée annuelle à Colorado Springs.

«C'est d'abord afin d'améliorer l'épanouissement des habiletés, a dit le directeur du développement hockey de l'association américaine, Kevin McLaughlin, au quotidien Globe and Mail. Les recherches montrent en effet que les mises en échec à cet âge nuisent au développement des habiletés techniques car les jeunes sont ou bien trop intéressés à frapper les adversaires ou bien trop dérangés par la peur d'être frappés.»

McLaughlin ajoute que chaque sport a sa fenêtre idéale d'essor du potentiel athlétique. «Pour le hockey, c'est 12 ans et moins, dit-il. Il faut se demander si on ne gaspille pas des années critiques de développement.»

L'aspect de la sécurité est également au coeur des préoccupations de USA Hockey. Et l'une des conclusions du séminaire sur les commotions cérébrales tenu à la célèbre clinique Mayo, à Rochester, au Minnesota, il y a quelques mois confirmait qu'à cet âge, chez les pee-wee, soit à 11-12 ans, le cerveau n'était pas bien préparé à anticiper les mises en échec et que les jeunes étaient donc plus en danger.

La tournure des événements n'est pas sans déplaire à Sylvain Lalonde, directeur général de Hockey Québec. «Ça nous réconforte de savoir que notre position est citée en exemple, a-t-il dit hier après-midi au bout du fil. Mais nous ne sommes pas surpris, c'est un mouvement amorcé à travers le monde. Les États-Unis suivent cette tendance. Nous, on garde le cap. Il y a de la pression externe, et on ne veut certainement pas négliger le développement des joueurs, mais tant que les études prouveront que les mises en échec en bas âge ont des effets néfastes sur le cerveau, nous ne plierons pas. Et à l'heure actuelle, 19 études sur 20 abondent en ce sens.»

Sylvain Lalonde s'est toujours défendu de nuire à l'essor des jeunes en maintenant sa position sur les mises en échec au niveau pee-wee.

«J'entame ma neuvième année, je suis dans le domaine depuis 20 ans et c'est un débat qui a toujours existé. Il y a toujours eu deux écoles de pensée. Sauf que la mise en échec est interdite au Québec depuis maintenant 24 ans et ça n'a pas empêché les hockeyeurs québécois de percer dans la Ligue nationale de hockey.»

Et le directeur général de Hockey Québec affirme mettre les choses en oeuvre pour faciliter l'adaptation des jeunes hockeyeurs québécois qui passent du niveau pee-wee à bantam.

«On a entamé en mai des discussions sur les actions à prendre pour aider les joueurs pee-wee à mieux assimiler le jeu avec mises en échec. Il existe déjà une réglementation qui tolère le contact physique au niveau pee-weequi permet aux joueurs qui patinent dans la même direction d'amener l'adversaire sur la bande sans faire de projection et de lui enlever la rondelle.»

Le reste du Canada pourrait-il imiter les États-Unis?

«Je ne crois pas, a répondu Lalonde. Ç'a toujours suscité des débats, mais ce n'est plus à l'ordre du jour au niveau canadien. Il y a deux ans, trois provinces voulaient même permettre la mise en échec au niveau atome! À moins qu'ils ne soient influencés par les récentes études, je n'ai pas l'impression que le reste du Canada va y porter attention.»

À l'heure actuelle, la France, l'Allemagne, l'Autriche, l'Italie et la Biélorussie, entre autres, ont une réglementation semblable à celle du Québec. La Finlande l'avait aussi jusqu'à l'an dernier, mais elle tente présentement l'expérience avec les mises en échec chez les pee-wee.