Il y avait une expression en vogue il y a quelques années: «Le changement dans la continuité». C'est quétaine, c'est cliché, mais c'est en plein ce qu'a tenté Pierre Gauthier depuis qu'il est devenu DG du Canadien à pareille date l'an dernier.

Malgré la passation de pouvoirs, la philosophie de gestion est demeurée la même chez le Canadien. En premier lieu: faire confiance à Carey Price.

En ce sens, la décision la plus importante de Gauthier en tant que directeur général du CH aura été de jouer d'audace en échangeant le populaire Jaroslav Halak en retour des jeunes Lars Eller et Ian Schultz.

Si les six derniers mois sont révélateurs, on ne pourra pas accuser Gauthier de s'être trompé de gardien.

Quant à ce qu'il a obtenu en retour de Halak, mettons les choses dans leur contexte.

Gainey et Gauthier avaient cimenté leur noyau d'attaquants, l'été précédent, avec plusieurs embauches à long terme. Ils doivent regretter certaines d'entre elles. Chose certaine, Gauthier savait que sa marge de manoeuvre financière était désormais mince. En manque de recrues prêtes à aider l'équipe à l'attaque, il a cherché un jeune que le CH pourrait développer à prix modique. Parmi ceux disponibles, Eller lui est apparu le plus intéressant.

«On doit regarder quels joueurs peuvent nous aider maintenant, mais surtout à quel point ils deviendront bons dans le futur», avait plaidé Gauthier le jour de la transaction.

Il est évident qu'Eller n'a pas cette année un impact équivalent à celui d'un gardien numéro un. Mais le pari de Gauthier est de voir le Danois produire éventuellement au sein d'un des deux premiers trios.

En attendant, l'argent économisé avec le départ de Halak a été réinvesti dans le nouveau contrat à Tomas Plekanec, un autre bon coup de Gauthier.

Plus d'espoirs, moins de choix

Au terme de toutes les transactions effectuées par Gauthier en un an, seulement deux joueurs acquis par le CH aident actuellement l'équipe, soit Eller et James Wisniewski.

En revanche, cinq joueurs échangés jouent ailleurs dans la LNH à l'heure actuelle.

Faut-il déduire que Gauthier a préféré consolider ses actifs pour l'avenir? Oui et non. Il a mis la main sur quelques espoirs, à commencer par Michaël Bournival, en cédant en retour des joueurs qui n'avaient plus de réel impact au sein de la formation.

En contrepartie, il s'est départi de trois choix de deuxième ronde est l'espace d'un an. C'est beaucoup.

Dès ses premiers jours en poste, Gauthier a cédé l'un de ces choix pour mettre la main sur Dominic Moore. L'équipe manquait de profondeur au centre et le troisième trio en pâtissait. Le temps des roses, Moore a rendu de bons services.

Et plus tôt cet hiver, Gauthier a mis la main sur James Wisniewski dès qu'il a su qu'il perdrait les services de Josh Gorges pour le reste de la saison.

«Pierre réagit bien aux situations, a noté Jacques Martin. Nous avions un besoin après la perte de Gorges.»

Le bénéfice du doute

Parmi les autres gestes posés par Gauthier, on retiendra l'embauche de quatre joueurs autonomes (quoique Boyd était déjà sous l'égide de l'équipe).

Alex Auld, Jeff Halpern et Alexandre Picard sont des joueurs de soutien qui ont fait le travail que l'on attendait d'eux, ni plus ni moins.

Tout cela donne un bilan peu spectaculaire.

On pourra dire que Gauthier, en dépit de l'acquisition des Moore et Wisniewski, n'a pas posé beaucoup de gestes qui amélioraient l'équipe à court terme. Or, la fiche du Canadien depuis qu'il en tient les rênes est de 41-26-9 en saison régulière, doublée d'une présence en finale d'Association.

Cela nous force à lui donner le bénéfice du doute.

«Pierre avait été très impliqué dans les changements de personnels, l'été précédent (en 2009), de même que dans mon embauche», a confié Jacques Martin.

Et c'est là où l'évaluation du travail de Gauthier pose problème. Car de deux choses l'une: ou bien l'influence auprès de Gainey était suffisante pour qu'on lui attribue une part des torts chez le Canadien depuis six ou sept ans; ou bien on ne peut évaluer son travail qu'une fois qu'il a été muni des pleins pouvoirs.

Et dans ce dernier cas, plusieurs gestes qu'il a posés prendront encore quelques années avant de donner leurs fruits.