Il y a deux ans, Francis Gariépy jouait au hockey au niveau secondaire. Au cours d'un match sans importance, il a reçu un double-échec au dos au moment où il approchait de la rampe.

«Je ne m'y attendais pas et j'ai perdu l'équilibre», s'est rappelé Francis, jeudi en entrevue. «Ma tête a heurté la bande et j'ai vite réalisé que je ne pouvais plus bouger.»

«Francis a subi une fracture avec compression et sa paralysie est permanente», a expliqué le physiatre André Roy, qui l'a traité à l'Institut de réadaptation Gingras-Lindsay. «C'est un jeune homme très courageux, très déterminé, qui ne s'est jamais plaint de quoi que ce soit pendant les longs mois de réadaptation.»

Gariépy, qui a 19 ans aujourd'hui, a retrouvé la mobilité de ses bras, mais pas de ses mains. Il a repris ses études, cette année, au cégep. Il s'intéresse toujours au hockey et il a découvert récemment le rugby en fauteuil roulant, un sport qui lui permet de rester actif.

Francis n'a vu l'accident de Pacioretty qu'en reprise, mercredi matin. «Il a vraiment eu beaucoup de chance, souligne-t-il. Quand j'ai vu les images, j'ai été très inquiet pour lui. J'ai voulu en savoir davantage et j'ai lu toutes les informations que je pouvais trouver sur l'internet.

«Ce genre de blessure est malheureusement habituellement très grave, j'en suis la preuve, a insisté Francis. Il n'y a aucune protection contre un tel choc et je doute que des règlements plus sévères ou l'intervention de la justice puissent y changer quelque chose.»

Comme Pacioretty, Gariépy refuse d'accuser le joueur qui l'a frappé. «Personne ne cherche à causer une blessure aussi grave à un adversaire, a-t-il souligné. Par contre, c'est vrai que certains joueurs n'hésitent pas à faire mal à leurs rivaux pour les sortir du jeu.»

Un long cheminement

Malgré sa «chance», Pacioretty n'est de toute évidence qu'au début d'un long processus de réadaptation. «Ma blessure était plus grave et j'ai été pendant presque deux ans en réadaptation, rappelle Francis Gariépy. Je commence à retrouver une vie normale, mais rien ne sera plus comme avant.»

Le Dr Roy, également directeur de la clinique de médecine du sport du CHUM, estime lui aussi que le joueur du Canadien devra faire preuve de courage - et s'armer de patience - au cours des prochains mois.

«Francis peut témoigner des difficultés de la réadaptation après une blessure à la colonne vertébrale, explique le spécialiste. Pacioretty a eu une chance extraordinaire, mais sa blessure est néanmoins très grave.

«La fracture de sa quatrième vertèbre l'obligera à rester immobilisé, au moins au niveau du cou, pendant plusieurs semaines. Il devra ensuite retrouver sa mobilité, retrouver sa force, et cela devrait prendre encore plusieurs semaines, sans qu'on soit parfaitement certain des résultats.

«Et n'oublions pas qu'il a subi une grave commotion cérébrale. Il suffit d'observer la situation de Sidney Crosby - inactif depuis plusieurs mois à la suite d'un coup moins sévère - pour évaluer la complexité de ces blessures.»

Francis Gariépy insiste d'ailleurs sur «les symptômes invisibles» des blessures à la tête et à la colonne vertébrale. «Les conséquences psychologiques sont terribles, avoue-t-il. Les gens autour de moi soulignent mon courage et ma bonne humeur, mais ce n'est pas toujours comme ça dans ma tête...»