Comme leurs héros du Canadien et des autres équipes de la LNH, 110 000 jeunes garçons et filles amorceront leur saison de hockey aux quatre coins du Québec au cours des prochains jours.

Sur l'île de Montréal, ils seront 7000.

En fait non. Sous le coup de suspensions d'un an imposées par Hockey-Montréal, une trentaine de jeunes hockeyeurs des niveaux atome à midget du secteur Centre-Sud manqueront à l'appel.

Qu'ont fait ces jeunes âgés de 9 à 16 ans pour écoper pareilles suspensions? Ils n'ont pas distribué des commotions cérébrales en frappant leurs adversaires sournoisement à la tête. Ils n'ont pas consommé de stéroïdes, de stupéfiants ou d'autres substances illégales. Encore moins menacé de mort un entraineur ou un arbitre.

Alors quoi?

Ils ont tourné le dos au hockey élite.

Invité à prendre part un camp d'évaluation de niveaux BB et CC par le Comité des jeunes de Rosemont, le petit Arthur Marois, 11 ans, l'un des hockeyeurs punis, n'a pas donné suite à l'invitation.

«Un soir, sans qu'on m'ait avisé de quoi que ce soit, mon gars est sorti d'un entrainement en pleurs. On venait de lui annoncer qu'il était suspendu. Il était abattu. Il m'a même demandé ce que ça voulait dire être suspendu», raconte son père Jean.

Depuis que cette sanction lui est lourdement tombée dessus, Arthur Marois est confiné à la ruelle. À moins que l'association du hockey mineur de Rosemont accepte de le libérer et de lui donner la chance de rejoindre son équipe de quartier, il y sera confiné tout l'hiver.

«C'est un non-sens. Un manque de respect à l'endroit des jeunes et de leurs parents. Le hockey élite ne nous intéresse pas. Arthur et les autres devaient se soumettre à un barrage de cinq entrainements en cinq soirs en pleine rentrée scolaire. Ça n'a pas d'allure. J'aime le hockey. Mon gars en raffole. Mais on veut aussi avoir la chance d'aller aux pommes à l'automne, de s'offrir une fin de semaine de ski de temps en temps l'hiver. De vivre en famille. Il n'y a pas que le hockey dans la vie et ils n'ont pas le droit de l'imposer aux enfants et à leurs parents», ajoute Jean Marois qui aurait aussi dû débourser 40 $ pour couvrir les frais reliés à l'invitations lancée à son fils par les organisateurs des niveaux élites de Rosemont.

Une invitation ou un ordre?

Directeur du hockey mineur du quartier Centre-Sud, Michel Godin est pris dans un étau. D'un côté, il doit endosser la règle imposée par Hockey-Montréal. De l'autre il est bien obligé de donner raison aux parents qui sont loin de le ménager.

«C'est une simple question de bon sens. Si tu es invité à aller quelque part, ça ne veut pas dire que tu es obligé d'y aller. Les suspensions sont pourtant tombées. J'ai laissé des messages aux dirigeants de Rosemont afin de savoir si, une fois que leurs équipes seront complètes, mes joueurs pourront être réintégrés et ils ne m'ont pas encore répondu. Écoutez-moi bien: Je gère un organisme de sports. Mon but, c'est de faire bouger les jeunes en leur permettant de jouer au hockey. Si des associations brandissent des procédures pour les bloquer, eh bien là je ne comprends plus rien», a-t-il lâché au terme d'un entretien téléphonique lundi.

Sanctions inacceptables

Directeur général de Hockey-Québec, Sylvain Lalonde a dénoncé d'un trait les sanctions imposées au jeune Arthur Marois et aux autres hockeyeurs de Centre-Sud.

«C'est inacceptable est je peux vous assurer que nous allons nous impliquer dans le dossier pour rectifier le tir avant qu'il ne soit trop tard. Il n'est pas question que ces jeunes perdent une saison de hockey pour une raison pareille.»

M. Lalonde entend d'ailleurs profiter de cet incident, qui est loin d'être un cas isolé, pour établir des paramètres clairs qui élimineront des conflits dont les enfants sont les seuls à payer le prix.

«On veut que nos jeunes jouent au hockey et qu'ils s'amusent. On doit donc s'assurer qu'ils jouent dans un niveau conforme à leur talent. On ne veut pas qu'un joueur trop fort, domine outrageusement dans un niveau inférieur. L'inverse est aussi vrai. Mais il faut exercer du jugement. Si, une fois rendu au niveau bantam, un jeune ne veut pas évoluer dans une ligue où les mises en échec sont permises, c'est son choix et son droit. Cela dit, les parents doivent aussi comprendre qu'on ne peut pas leur permettre de se former des équipes d'avance simplement parce que des liens d'amitié se sont développés entre eux. Les jeunes et le plaisir qu'ils éprouvent en jouant au hockey sont nos premières préoccupations. Si des parents ou des associations ne les respectent pas, nous corrigerons le tir. Et c'est ce que je ferai dans ce dossier», a conclu le directeur général de Hockey-Québec.

Photo: André Pichette, La Presse

Arthur Marois, 11 ans, est confiné à la ruelle cette année parce qu'il a tourné le dos au hockey élite.