Nous avons posé 10 questions à nos journalistes Mathias Brunet, Philippe Cantin, François Gagnon, Marc Antoine Godin et Richard Labbé au sujet de la nouvelle saison du Tricolore et de ses principaux enjeux. Ils vous livrent ici leurs réponses, leurs réflexions ainsi que leurs prédictions au sujet de la nouvelle campagne qui est sur le point de s'amorcer dans la LNH.

Le CH regrettera-t-il d'avoir accordé un contrat de trois ans à Andrei Markov?

Mathias Brunet

Je ne crois pas. Le retour de Markov est retardé, mais je suis convaincu que le CH et ses médecins ont fait leurs devoirs dans ce dossier. On ne donne pas autant d'argent sans s'assurer que le genou est stable et je crois qu'il l'est.

Philippe Cantin

Non. Andrei Markov est un athlète sérieux qui prend les moyens de se rétablir. Les chances qu'il retrouve son niveau d'antan sont excellentes. Markov est impatient d'endosser l'uniforme. Espérons néanmoins qu'il ne précipitera pas son retour au jeu. Cela ne servirait à rien. Le Canadien se qualifiera relativement aisément en vue des séries éliminatoires. L'important, c'est qu'il soit au sommet de sa forme en avril. En santé, Markov est l'âme du Canadien. Et c'est tellement beau de le voir jouer...

François Gagnon

J'aurais préféré que le Canadien se lance à la chasse de Christian Ehrhoff - 40 millions $ pour 10 ans à Buffalo - ou qu'il garde des munitions pour faire l'acquisition de Shea Weber, qui sera disponible l'an prochain. Le spectre de voir un Markov complètement rétabli faire des Capitals ou des Rangers de bien meilleures équipes a toutefois forcé la main de Pierre Gauthier. Par rapport à James Wisniewski, qui ne lui va pas à la cheville mais qui recevra néanmoins 5,5 millions par an des Blues Jackets, Markov, à 5,75 millions $ par année pour trois ans, sera une aubaine s'il joue et performe comme il en est capable. S'il ne joue que 30 ou 50 matchs? S'il ne joue pas du tout? Pierre Gauthier pourra dire qu'il a parié et que ce pari n'a rien rapporté...

Marc Antoine Godin

Il est possible qu'il le regrette ces jours-ci, certes, mais reportons-nous à la journée de la signature du contrat. Tout le monde avait dit que deux ans auraient fait l'affaire et qu'une troisième année représentait un risque inutile. Or, à mon sens, le risque avec Markov se situait d'abord et avant tout cette saison. L'incertitude de sa réadaptation et son rendement lorsqu'il reviendra nous forcent à calmer nos attentes pour cette année. Les choses prendront du temps avant de se stabiliser. Mais si Markov revient en santé en novembre, qu'il prend son rythme de croisière à l'aube des séries et qu'il donne ensuite deux bonnes saisons au Canadien, qui s'en plaindra ?

Richard Labbé

Oui. À 32 ans, avec des genoux aussi amochés, l'expression «un jour à la fois» prend tout son sens. Markov, c'est en plein ça: un jour à la fois. Comment compter sur un type aussi fragile pour plus d'une saison? Un pari très risqué, à n'en point douter. Si Markov peut donner quelque chose comme 60 matchs par saison au Canadien, ce sera déjà ça. Mais à 5,7 millions par année, c'est cher. Trop cher.

>>>>Consultez le tableau des prédictions de nos experts.

Que doit faire Pierre Gauthier avec Scott Gomez?

Mathias Brunet

Il n'y a pas grand-chose à faire avec Gomez pour l'instant. Dans un an ou deux, peut-être, lorsque son salaire aura diminué, il pourra intéresser une équipe pauvre qui veut d'un joueur à la moyenne salariale élevée (il faut faire la distinction entre salaire annuel et moyenne salariale) pour atteindre le plancher salarial. Donnons-lui d'abord la chance de se racheter.

Philippe Cantin

Lui donner une chance! En mai dernier, Gomez a reconnu la médiocrité de son rendement et promis une amélioration. Son orgueil a été touché. On saura bien assez vite s'il peut encore s'imposer.

Même si Gomez devait décevoir de nouveau, je serais étonné que Gauthier prenne une décision significative à son endroit durant la saison. Ce sera alors à Jacques Martin de le convaincre d'accepter un rôle mineur, sans nuire au moral de l'équipe. Gros défi.

François Gagnon

Pierre Gauthier est prisonnier du contrat de Gomez. À moins que ce soit lui qui ait poussé Bob Gainey à compléter la transaction qui l'a amené à Montréal, on ne peut donc rien lui reprocher... dans ce dossier. Larguer Gomez et son salaire dans le vestiaire d'un club qui peine à atteindre le plancher salarial? Plus facile à dire qu'à faire. Gomez recevra 7,5, 5,5 et 4,5 millions au cours des trois prochaines années. Pour au moins un an encore, peut-être deux avant qu'il ne l'échange ou rachète son contrat, le Canadien doit espérer que Gomez redevienne un acteur de soutien à défaut d'être un acteur principal. Ce serait déjà mieux que l'an dernier...

Marc Antoine Godin

Le CH doit d'abord faire comme Gomez lui-même et faire table rase des deux dernières saisons. Lui laisser la chance de retrouver la forme. Le camp d'entraînement suggère que Gomez fait l'effort d'être moins prévisible et plus intense. S'il joue assez bien pour garder son poste au sein du top 6, Gomez passera l'année à Montréal, et les performances de Desharnais et Eller détermineront si le Canadien peut monnayer Gomez l'été prochain. Car s'il ne se replace pas, l'équipe sera prise avec Gomez pour la durée restante de son contrat. Soyons honnête: salaire décroissant ou non, qui voudrait vraiment d'une ex-vedette surpayée en déclin constant depuis trois ans ?

Richard Labbé

Se croiser les doigts. Honnêtement, le DG ne peut pas faire grand-chose d'autre. Voici un joueur surpayé, vieillissant, et acquis par l'administration précédente. L'échanger? Impossible. Racheter son contrat? Trop cher pour l'instant. Hamilton? Disons qu'un gars de 7,5 millions dans la Ligue américaine, c'est un peu ridicule... Reste donc la seule option possible: espérer. Et tenter de trouver les compagnons de trio qui vont permettre de revoir le Gomez d'autrefois. Si c'est encore possible.

Le CH doit-il conclure une entente à long terme en cours de saison avec P.K. Subban - et si oui à quel prix ?

Mathias Brunet

On doit mettre Subban sous contrat le plus rapidement possible. À l'heure actuelle, sa valeur pourrait avoisiner les 5 millions annuellement mais ça pourrait grimper vite.

Philippe Cantin

Non. Et ce n'est pas une mauvaise nouvelle pour P.K., car sa valeur augmentera sans cesse. Le nouveau contrat de Drew Doughty, des Kings de Los Angeles, fournit le cadre dans lequel les négociations s'amorceront: 7 millions par saison pendant 8 ans. Cela dit, les paramètres de la prochaine convention collective pourraient modifier le marché à la hausse ou à la baisse. Mais Subban - et Carey Price - toucheront tout de même le gros lot avant la saison 2012-13.

François Gagnon

P.K. Subban et Carey Price sont, et seront pour longtemps, l'image et l'âme du Canadien. Peu importe qu'il négocie ou non en cours de saison, le Canadien doit s'assurer que les deux sachent rapidement que l'équipe tient à eux. Cela évitera que leurs performances ne soient affectées par les questions contractuelles et empêchera qu'ils soient distraits par les rumeurs - qui seront bien réelles - que d'autres équipes soient prêtes à offrir un pont d'or pour les attirer... Subban peut convoiter le même genre de contrat (38,5 millions pour 7 ans) qu'a signé Tyler Myers avec les Sabres.

Marc Antoine Godin

Le dossier Subban ne presse pas davantage que celui de Carey Price. D'ailleurs, le Canadien serait mal avisé, politiquement, d'engager des discussions avec Subban avant son gardien. Le mieux serait que les deux dossiers soient menés de front au début de l'année 2012 et qu'une portion d'environ 12 millions soit répartie entre les deux joueurs. S'entendre en cours de saison enverrait le bon message. Toutefois, je soupçonne le CH de vouloir attendre de connaître les règles du jeu de la prochaine convention collective avant de s'engager à très long terme avec ses deux jeunes vedettes.

Richard Labbé

Ce n'est certes pas le style de la maison. Mais l'agent de Subban n'a sans doute pas oublié le contrat offert par les Sabres à Tyler Myers (7 ans, 38,5 millions) en septembre. Nul doute que le spectaculaire P.K. représente l'avenir de la défense montréalaise. À ce chapitre, Pierre Gauthier doit oublier les habitudes de la maison, et s'arranger pour que le jeune homme soit ici pendant longtemps. Même si ça risque de coûter cher.

Erik Cole est-il l'ingrédient qui manquait au Canadien?

Mathias Brunet

Le Canadien avait besoin d'un costaud à l'attaque. Il y en a désormais au moins un au sein de chacun des trios offensifs mais j'ai l'impression que l'impact de Max Pacioretty sera plus grand que celui de Cole...

Philippe Cantin

Non. Deux ingrédients ont manqué au Canadien en fin de dernière saison: Andrei Markov et Max Pacioretty. Leur retour en santé est plus déterminant que l'arrivée d'Erik Cole.

Cela dit, la présence du gros ailier renforce l'équipe, pas de doute là-dessus. Il s'agit d'une belle acquisition. Meneur dans l'âme, Cole connaîtra du succès. L'ennui, c'est de lui avoir consenti un contrat de quatre saisons pour qu'il déménage à Montréal. C'est une de trop.

François Gagnon

Jacques Martin avait besoin d'un attaquant de premier plan pour créer un peu de compétition pour une place au sein des deux premiers trios et en avantage numérique. Cole répond à la description de tâche. Il ne lui reste qu'à la remplir. S'il n'y arrive pas, Andrei Kostitsyn pourra venir en relève. L'âge de Cole - bientôt 33 ans - sa fragilité relative et la somme folle qui lui a été consentie - 19 millions$ pour 4 ans - obligent toutefois à se garder une petite gêne...

Marc Antoine Godin

Je ne suis pas de ceux qui pensent que l'équipe était à un ingrédient près de devenir une puissance de la ligue. Par contre, Cole améliore le visage de l'équipe à plus d'un titre : il ajoute enfin un bon gabarit au top 6, il n'hésite pas à aller au filet (Jacques Martin va aimer ça), il ajoute de la profondeur en reléguant Kostitsyn au troisième trio, ce qui favorise du même coup une meilleure production de l'équipe à forces égales. Une très bonne acquisition qui coûte cher - surtout pour un peu trop longtemps - mais dont on ne tardera pas à récolter les fruits.

Richard Labbé

On nous a présenté ce Cole comme un «attaquant de puissance», capable de marquer des buts à profusion. La réalité: Cole a atteint le plateau des 30 buts une seule fois en 9 saisons dans la Ligue nationale. Il revient de sa deuxième meilleure saison en carrière (52 points), mais pourra-t-il éviter les blessures? Alors, la réponse est non. Le Canadien a besoin d'un attaquant capable d'enfiler les points soir après soir. Le Canadien a besoin d'un joueur offensif et constant. Cet attaquant n'est pas Erik Cole.

Qui sera la surprise de l'année?

Mathias Brunet

Andrei Kostitsyn. À la recherche d'un nouveau contrat, je ne serais pas surpris que Kostitsyn en marque tout près d'une trentaine cette année... à Montréal ou ailleurs!

Philippe Cantin

Lars Eller deviendra un favori de la foule.

François Gagnon

Avec ce qu'il a accompli au camp d'entraînement, Brendan Gallagher est déjà la surprise du Tricolore cette saison...

Marc Antoine Godin

David Desharnais. Il étonnera toujours par son extraordinaire faculté d'adaptation et d'ajustement. Impossible encore d'évaluer toute l'étendue de ce qu'il pourra accomplir dans la LNH.

Richard Labbé

Andrei Kostitsyn

Qui sera la déception de l'année?

Mathias Brunet

Si les fans s'attendent à 30 buts de la part d'Erik Cole, ils pourraient être déçus.

Philippe Cantin

Jaroslav Spacek trouvera que ça patine trop vite autour de lui.

François Gagnon

Andrei Markov peinera à redevenir le défenseur qu'il était avant que les blessures ne s'acharnent sur lui...

Marc Antoine Godin

Les «surprises» et les «déceptions» sont toujours question d'attentes. Erik Cole sera une déception pour ceux qui placent des attentes trop élevées en lui. Je ne le vois pas marquer 30 buts et obtenir 70 points.

Richard Labbé

Erik Cole

Combien de matchs Carey Price disputera-t-il ?

Mathias Brunet

65 au maximum.

Philippe Cantin

65

François Gagnon

65

Marc Antoine Godin

64

Richard Labbé

60

Combien de points Scott Gomez récoltera-t-il?

Mathias Brunet

59

Philippe Cantin

60

François Gagnon

56

Marc Antoine Godin

53

Richard Labbé

55

Qui sera le meilleur pointeur de l'équipe?

Mathias Brunet

Mike Cammalleri

Philippe Cantin

Tomas Plekanec

François Gagnon

Tomas Plekanec

Marc Antoine Godin

Tomas Plekanec

Richard Labbé

Tomas Plekanec

Jusqu'où se rendra le Canadien cette saison?

Mathias Brunet

Pas loin d'une centaine de points en saison régulière, une ou deux rondes en séries. Ce qui est très bien.

Philippe Cantin

Jusqu'au bout! Bon, bon, je vous entends déjà vous moquer. Alors pourquoi choisir le Canadien? Surtout parce que j'en ai assez des attentes ridiculement basses placées en l'équipe chaque automne. Une participation aux séries éliminatoires semble désormais suffisante pour dire mission accomplie. Le Canadien verse le maximum autorisé en salaires. Il aligne deux jeunes joueurs exceptionnels (Price et Subban) et compte plusieurs vétérans payés 5 millions ou plus par saison. Il est temps que cette organisation s'extirpe des résultats en demi-teinte. Sur papier, le Canadien n'est pas inférieur aux Bruins de l'an dernier. Si les joueurs de Jacques Martin développent le même goût de la victoire, le même plaisir à s'appuyer les uns les autres, rien n'est impossible. Suffit qu'ils y croient.

François Gagnon

Le Canadien doit aborder la saison comme un long camp d'entraînement, car bien des joueurs ont gaspillé les deux dernières semaines en y allant mollo sur la glace ou en étant confinés à l'infirmerie. Entre blessures et contre-performances, le Canadien devrait finir 6e ou 7e dans l'Association Est et tout miser sur les séries. Finaliste dans l'Est il y a deux ans, éliminé en première ronde l'an dernier par les éventuels champions de la coupe Stanley, le Canadien doit viser une place au sein du carré d'as. En fait non! Il doit viser la coupe. Mais comme toujours depuis la dernière conquête, en 1993, il devra se contenter d'en rêver!

Marc Antoine Godin

Le Tricolore va devoir se battre au sein d'une Association Est plus compétitive qu'avant. On peut avancer, pour la première fois depuis longtemps, que l'Est sera plus forte que l'Ouest cette année. Dans sa propre section, le CH devra en découdre avec des Sabres ragaillardis. Je vois Montréal terminer 3e, 6e ou 7e dans l'Est. Quant aux séries, comme pour toutes les équipes, le nombre de blessés et la tenue du gardien feront la différence. Mais en raison de cette nouvelle profondeur à l'attaque - qui a tant fait défaut le printemps dernier face aux Bruins -, l'équipe pourrait surprendre. Je ne serais pas surpris qu'elle retourne en finale d'Association.

Richard Labbé

Fidèle à son habitude, le CH sera encore le club des si. Si Markov reste en santé. Si Cole joue à la hauteur de son talent. Si Gomez se réveille. Si Price fait des miracles. Si, si, si. On n'en sort pas. Ça me laisse croire que le CH de 2011-12 bataillera sûrement pour la huitième place, et qu'il fera peut-être mieux avec un peu de chance. Les séries? J'y crois. Je crois même à une victoire au premier tour. Mais sans plus.