Max Pacioretty est devenu l'une des étoiles du Canadien. Il préférerait d'ailleurs parler de son jeu plutôt que de ressasser sans cesse la tristement célèbre «affaire Chara», que la suspension qu'il purge actuellement pour un coup à la tête de Kris Letang a ramenée à l'avant-scène. Au Jeu l'a rencontré.

Il y a des joueurs qui aimeraient mieux subir un traitement de canal plutôt que d'avoir à supporter une séance de photos, mais Max Pacioretty, lui, n'a aucun problème avec ça. Il arrive au rendez-vous à l'heure prévue, joue le jeu des caméras, puis vient s'asseoir à sa case pour jaser, comme un gars qui a fait ça toute sa vie.

On a déjà entendu dire que la fameuse «pression» montréalaise étouffe certains hockeyeurs? Ce n'est pas le cas pour notre invité, manifestement.

Au fil de notre conversation, il dira au moins 40 fois qu'il souhaite jouer ici pendant toute sa carrière...

«Je suis à l'aise avec toute cette attention, c'est bien d'avoir ce genre de publicité, en particulier à Montréal. Que mon nom circule le plus possible, c'est bon à la longue», lance-t-il d'emblée.

À sa quatrième saison chez le Canadien, sa première à temps plein, Max Pacioretty a déjà pris sa place. Dans le vestiaire, bien sûr, mais aussi à l'extérieur. Son nom, les fans du Canadien le connaissent très bien. Comme son visage.

«Ça ne me dérange pas, explique-t-il calmement. J'ai mes étés pour relaxer; quand je retourne aux États-Unis, personne ne me connaît, et je peux juste vivre ma vie. Mais durant la saison, je trouve que c'est super. Si j'ai un bon match, les gens me le disent. Si j'ai un mauvais match, les gens me le disent aussi. On a besoin de ça. Au début, j'avais du mal à composer avec cette attention, mais cela a fait de moi une meilleure personne, un meilleur joueur.»

Il le dit souvent: c'est un peu l'amour des partisans qui le nourrit. C'est pour ça qu'il a décidé de créer sa fondation, au début du mois de novembre. «Parce que j'ai le goût de redonner à cette communauté qui m'a tant appuyé... Personne ne m'a jamais dit quelque chose de méchant depuis que je suis ici. Au pire, il y a des partisans qui essaient parfois d'être mon entraîneur, qui viennent me voir pour me faire remarquer que je devrais faire ceci ou cela pendant un match...

«Les joueurs qui disent du mal de Montréal n'ont jamais joué ici. Si j'étais échangé quelque part où le hockey est moins important, en Floride par exemple, je suis sûr que mon jeu en souffrirait. J'espère que ça n'arrivera jamais...»

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On peut dire que Max Pacioretty apprend vite. Le passé mythique de son club, il le connaît. Il connaît aussi les anciens qui sont passés ici avant lui, ceux qui ont réussi toutes ces conquêtes de la Coupe Stanley. Ce qui est assez étonnant pour un jeune qui est né au Connecticut et qui a chaussé ses premiers patins à l'âge de 5 ans sans même savoir que le Canadien de Montréal existait.

Une de ses grands-mères, Thérèse Savoie, était originaire de Montréal, mais ses parents à lui ont grandi en Californie. «Ils n'avaient jamais entendu parler de ce sport-là... Ils ne m'ont pas poussé à jouer au hockey, c'est moi qui les y ai poussés! Je suis tombé en amour avec le hockey dès l'instant où j'ai commencé à patiner avec mes deux soeurs... même si ma mère disait que j'étais le moins bon des trois sur la glace!»

Avec le temps, le jeune Pacioretty a fini par grandir en fan des Rangers de New York, il a joué un peu à la crosse avant de choisir la rondelle, et il ne connaissait pas grand-chose de l'histoire du CH à quelques jours du repêchage de 2007, quand son nom a été prononcé.

Le plus drôle, c'est qu'il aurait pu se retrouver ailleurs. En fait, c'est passé bien près. Un peu avant le repêchage, les patrons d'une autre équipe l'ont joint pour lui faire part de leur intérêt, en lui faisant croire qu'ils allaient sans doute le repêcher.

«Les Hurricanes de la Caroline avaient le 11e choix cette année-là, et ils m'ont dit de me tenir prêt, qu'ils allaient me choisir. Mais ils ont pris Brandon Sutter à la place...»

Le Canadien a opté pour le défenseur Ryan McDonagh avec le choix suivant, le 12e, puis s'est laissé tenter par Pacioretty avec son autre choix de première ronde, le 22e au total cette journée-là.

C'est là que l'histoire d'amour a commencé. Avec l'aide de papa.

«En grandissant, je n'étais pas au courant de la grande tradition du Canadien, relate-t-il. Alors mon père s'est mis à acheter tous ces livres, et c'est lui qui m'a tout appris. L'histoire de cette équipe est incroyable! C'est unique au monde, je n'ai jamais rien vu de tel. Le hockey fait partie de la culture ici. Dans la région de New York, les gens adorent les Yankees, mais ils ne connaissent pas leur sport comme les gens d'ici connaissent le hockey.»

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Photo: Marco Campanozzi, La Presse

C'est difficile de ne pas lui parler du coup. LE coup. Celui qui a tant fait jaser, qui a mené à une enquête policière, qui a provoqué des réactions et des critiques sévères à l'endroit de la Ligue nationale de hockey.

Au cours des dernières semaines, Pacioretty a fait savoir qu'il était fatigué de parler de Zdeno Chara et du violent coup que l'on connaît. L'image a marqué un peu tout le monde et elle l'a marqué, lui aussi. Physiquement, bien sûr, mais aussi mentalement, parce que Pacioretty a dû en discuter des centaines de fois par la suite.

Pour toutes ces raisons, le match du 27 octobre à Boston était très important pour lui. Parce qu'il s'agissait du premier match contre les Bruins et Chara depuis l'incident.

À un certain moment, lors de ce soir d'octobre, on a vu le gros défenseur lui adresser la parole avant une mise en jeu dans le territoire des Bruins.

«Il m'a juste dit qu'il était content que je sois rétabli... Ce match-là, c'était important pour moi, parce que j'avais hâte de passer à autre chose. Quand un événement comme ça arrive, tout le monde veut savoir comment on va, mais souvent, il n'y a rien de neuf à ajouter. Andrei Markov a vécu la même chose au cours des dernières semaines.

«J'avais juste hâte que ce soit terminé. Je trouve qu'on a fait tout un plat avec ça, surtout avec l'enquête policière et tout. Je voulais seulement tourner la page.»

Le hockey fait drôlement les choses; aujourd'hui, c'est notre invité qui se retrouve sous les réflecteurs de la honte en raison d'un coup à la tête à l'endroit du défenseur Kris Letang, des Penguins de Pittsburgh. Un coup que Pacioretty regrette... même s'il demeure en désaccord avec la suspension de trois matchs qui a suivi. «On m'a toujours enseigné à frapper comme ça... mais c'est ma faute quand même», dira-t-il en Californie, au moment de la décision de la LNH et de Brendan Shanahan.

Comme pour le coup de Chara, Pacioretty n'aime pas non plus parler de son propre coup sur Letang. Il a hâte de tourner la page, comme il l'a fait dans le cas de Chara. Aujourd'hui, l'attaquant ne pense plus à l'incident, mais plutôt au prochain match, à la prochaine victoire. Il songe à son avenir, qu'il souhaite vivre en bleu, blanc et rouge pour encore très longtemps. «J'aimerais pouvoir jouer jusqu'à 40 ans, et j'aimerais le faire avec cette équipe», dit-il d'un ton franc.

En attendant, il continue d'en apprendre un peu plus chaque jour sur l'histoire du Canadien. En espérant qu'un jour, son nom à lui fera aussi partie de ce glorieux récit.

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3 CHIFFRES À RETENIR DANS SA CARRIÈRE



22: Pacioretty a été choisi par le Canadien au 22e rang du repêchage amateur de 2007, peu après Angelo Esposito (Pittsburgh, 20e) et avant David Perron (St. Louis, 26e).

67: Aucune raison sentimentale ne se cache derrière le choix du numéro 67 qu'aucun joueur du Canadien n'avait porté avant Pacioretty: c'est celui qu'on lui a donné à son premier camp d'entraînement.

82: La saison actuelle est déjà la quatrième de Pacioretty dans la LNH, mais il a quand même beaucoup fait la navette entre Montréal et Hamilton, dans la Ligue américaine. Il a disputé l'équivalent d'une saison complète de 82 matchs avec les Bulldogs, compilant une fiche de 72 points (25 buts et 47 passes).

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Son film favori: Dumb and Dumber

Son souhait le plus cher: «Je veux tellement gagner une Coupe ici! Quand tous nos joueurs sont en santé, je crois qu'on est capables de rivaliser avec n'importe qui.»

Son jeu vidéo favori: Call of Duty: Modern Warfare 3. «Ma femme n'aime pas ça, mais c'est plaisant! Je joue un peu à NHL 2012, mais [Aaron] Palushaj me bat chaque fois. J'essaie de jouer à ce jeu-là comme si c'était du vrai hockey, et je me fais rincer.»

Sa musique favorite: «Tout sauf le country... J'aime bien la musique techno, comme LMFAO.»

Les idoles de son enfance: «J'étais fan des Rangers, donc Mark Messier, Eric Lindros, Theoren Fleury... Mais celui que j'essaie d'imiter, c'est Keith Tkachuk.»

Photo: André Pichette, La Presse