Les parents de Blake Geoffrion ont mordu la première fois qu'il leur a fait croire qu'il était échangé au Canadien. Comment aurait-il pu en être autrement?

Son père Danny a porté les couleurs du CH en 1979-80 et le chandail de son grand-père Bernard - le grand «Boum Boum», l'inventeur du lancer frappé - flotte dans les hauteurs du Centre Bell. À côté de celui de son arrière-grand-père, Howie Morenz.

Blake a souvent fait le coup à ses parents. Mais à force de crier au loup, son père a fini par le voir venir de loin... même d'Oklahoma City, d'où son fils l'a appelé vendredi dernier.

Danny Geoffrion rendait visite à sa mère Marlène à Atlanta, où la veuve de «Boum Boum» vit depuis des années. Ils allaient entrer au cinéma lorsque le cellulaire de Danny a sonné.

«Papa, je suis échangé au Canadien de Montréal!», lui a lancé son fils.

«Ben oui, elle est bonne, a répondu le père, reconnaissant le gag. Laisse-moi te rappeler après le film.

- Tu ne comprends pas: j'ai été é-chan-gé.»

Danny Geoffrion a regardé sa mère, lui a souri. La joie, comme la nouvelle, allait se répandre comme une traînée de poudre dans la famille.

Dur à croire

Choix de deuxième ronde des Predators de Nashville en 2006, Geoffrion croyait qu'il était rappelé lorsque l'entraîneur des Admirals de Milwaukee lui a demandé de quitter la patinoire pendant un exercice matinal, à Oklahoma City.

«Il m'a dit que le directeur général voulait me parler. J'ai compris alors que j'étais échangé. Quand le DG m'a dit que c'était à Montréal, j'ai répondu: No way!

«Vraiment, je ne pouvais pas le croire.»

Il y a bien des choses que le patineur de 24 ans n'arrive pas à s'expliquer, comme le fait qu'il ait été échangé contre Hal Gill, le numéro 75 du Canadien.

«Soixante-quinze», répète Geoffrion, un peu perplexe.

«Howie Morenz portait le 7 et mon grand-père le 5.»

Il n'y avait jamais pensé

À n'en pas douter, l'Américain de 24 ans est excité à l'idée de se joindre à l'organisation du Tricolore. Mais vous ne l'entendrez pas dire que c'est un rêve devenu réalité.

Car il jure qu'à aucun moment - pas même ce soir de 2006, au Centre Bell, où l'on retirait le numéro de Boum Boum en même temps qu'on pleurait son décès -, il ne s'est dit qu'il jouerait un jour à Montréal.

«J'avais été repêché par Nashville, ma ville natale, et dans ma tête, je ne me voyais jouer pour aucune autre formation», admet le premier joueur originaire du Tennessee à avoir été repêché.

«Mais ça n'empêche pas que je sois très excité à l'idée de faire partie du Canadien.»

Il lui reste toutefois une étape cruciale à franchir, celle de faire assez bonne figure pour mériter un rappel.

Les débuts sont encourageants: un but et trois mentions d'aide à ses deux premiers matchs avec les Bulldogs, le week-end dernier.

L'audition se poursuivra cette semaine, entre autres lors d'un match que les Bulldogs disputeront vendredi à Montréal.

Mais Geoffrion a des choses à prouver, surtout que cette saison, les blessures n'ont cessé de briser son rythme.

«Ça a été une chose après l'autre», lâche Geoffrion, qui ne s'exprime qu'en anglais.

«Cela a contribué au fait que je n'aie pas répondu aux attentes de la direction. En ce sens, un changement de décor est bienvenu pour moi. Et il n'y a pas de meilleur endroit où aller que Montréal.»

Capable de marquer, mais...

Geoffrion qualifie Montréal de «deuxième chez-moi du point de vue du hockey». Compte tenu de l'extraordinaire filière dont il est issu, c'est difficile de le contredire.

Lorsqu'il a participé à son premier match dans la LNH avec les Predators, Geoffrion est devenu le premier joueur à représenter la quatrième génération d'une même famille dans la ligue. Ce record deviendra carrément inatteignable lorsqu'il s'agira de quatre générations ayant joué pour la même équipe.

Geoffrion ne demande pas mieux, mais il prévient qu'il n'est pas fait dans le même moule que les trois autres.

«C'était des joueurs similaires, des compteurs naturels, dit-il. Ce n'est pas que je sois incapable de marquer un but, mais disons que je suis un attaquant qui joue dans toutes les situations, qui prend des mises en jeu et qui a du caractère...

«J'espère seulement que personne ne s'attend à ce que je marque 50 ou 60 buts!»