Pour la première fois, le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, Hockey Québec et d'autres organismes  ont uni leurs efforts pour lancer une vaste campagne de sensibilisation  visant à améliorer le comportement des parents dans les gradins. Sur la glace, la saison qui s'achève marquait  par ailleurs le retour de l'enseignement des contacts physiques - et non de la mise en échec - au niveau pee-wee, un sujet chaud et à l'index depuis des années  au Québec.

«Avertissement: ce match de hockey met en scène des enfants âgés de 5 et 6 ans... le jugement des parents est conseillé!»

Inspiré du classement des films au cinéma, ce message audio, adapté pour chaque catégorie de jeu, devrait bientôt être diffusé avant les matchs dans tous les arénas de la province.

Il s'agit d'une des mesures adoptées en marge d'un programme de sensibilisation intitulé «Engagement et attitude responsable», qui s'échelonnera sur trois ans. Le gouvernement a investi 250 000 $ pour sa mise en oeuvre.

«L'objectif est d'amener la minorité responsable des dérapages à se sentir mal à l'aise, submergée par la majorité silencieuse», explique Michel Fafard, responsable de la santé et de la sécurité dans les sports pour le compte du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport.

La première étape a été la distribution d'une vidéo intitulée Jouer au hockey dans un monde de fous dans les 100 000 foyers québécois associés au hockey mineur. Le film s'adresse surtout aux parents, indique le directeur général de Hockey Québec, Sylvain Lalonde. «L'idée est de sensibiliser les parents qui adoptent de mauvais comportements et les amener à se reconnaître», explique-t-il.

Le programme prévoit aussi la distribution aux quatre coins de la province d'affiches inspirées du classement des films. Ces mêmes mises en garde seront diffusées avant les tournois et les séries notamment, où l'intensité monte d'un cran.

Enfin, des cartons seront distribués aux parents à l'entrée des arénas. «À titre de parent d'un enfant qui aime le hockey, je m'engage à adopter une attitude et un comportement responsables», pourra-t-on lire.

Confronter les parents

Pour Sylvain Lalonde, cette campagne ne répond pas à une augmentation des cas de dérapages, mais plutôt à une volonté de confronter les parents à problèmes. «Avec les années, il y a toujours eu des situations malheureuses qui font les manchettes. L'idée est de les prévenir», explique-t-il.

Selon lui, trois moments sont propices aux débordements: la sélection des joueurs au début de la saison, les tournois et les séries éliminatoires. «Lors de la sélection des joueurs, il y a même des entraîneurs qui reçoivent des appels anonymes de parents», déplore M. Lalonde.

À l'ère des téléphones intelligents, une agression sur la glace, une violente prise de bec entre un arbitre et un entraîneur ou une empoignade dans les gradins peut rapidement se retrouver sur la place publique.

La diffusion en boucle de telles images entache la réputation du hockey et envoie un message disproportionné de dangerosité, déplore M. Fafard.

La victoire à tout prix

Selon le psychologue sportif Bruno Ouellette, la pression est plus forte que jamais sur les épaules des jeunes hockeyeurs. «Dès que nos enfants commencent à faire du sport, on met l'accent sur la victoire», constate le psychologue. Une telle approche s'avère néfaste chez l'enfant, notamment au niveau de l'estime de soi, croit-il.

Rapidement, le nombre de buts est valorisé et l'enfant entre dans le jeu des comparaisons avec ses camarades, enchaîne le psychologue spécialisé qui a travaillé avec une trentaine de médaillés olympiques. «Les enfants devraient faire du sport pour apprendre à se développer, s'améliorer, mais on leur demande de se dépasser», observe M. Ouellette. Selon lui, il ne faut pas se surprendre d'observer un taux de décrochage important chez les jeunes hockeyeurs au niveau bantam. «Il faut leur apprendre autant à gagner qu'à perdre.»

Le hockey prend-il trop de place dans le coeur des Québécois? Oui et non, soutient M. Ouellette, pour qui le problème survient lorsque la passion vire à l'obsession. Et la responsabilité ne revient pas seulement aux parents et aux entraîneurs, mais un peu à tout le monde, résume le psychologue. «Le problème est bien ancré dans la société, dans les médias: on valorise les gagnants.»

Le programme «Engagement et attitude responsable» prévoit entre autres la distribution d'affiches inspirées du classement des films.