Il n’était pas question pour Shane Wright de jouer son match sans savoir quelle équipe avait remporté la loterie de la LNH, mardi soir.

Après l’échauffement de son équipe, le jeune espoir de 18 ans des Frontenacs de Kingston s’est dirigé dans le bureau de son entraîneur-chef, Luca Caputi. C’est là, quelques minutes avant une rencontre éliminatoire, qu’il a appris que le Canadien avait obtenu le premier choix au total.

« J’étais un peu anxieux, je voulais connaître le résultat de la loterie et savoir qui repêcherait premier. […] Je voulais libérer mon esprit un peu, juste pour ne pas trop y penser », a-t-il expliqué à RDS, mercredi en fin de journée.

Ça voudrait tout dire pour moi [jouer pour le Canadien]. La franchise parle d’elle-même en termes d’histoire. Elle fait partie des six équipes originales. La ville a une belle histoire aussi. Et les partisans sont incroyables, probablement les meilleurs de toute la Ligue. Je serais vraiment chanceux de faire partie de cette organisation avec ce groupe de joueurs et ce personnel d’entraîneurs.

Shane Wright

Joint au téléphone par La Presse, le directeur général des Frontenacs, Kory Cooper, a décrit Wright comme un attaquant qui « joue bien sur 200 pieds », qui « retire de la fierté à bien jouer défensivement » et qui possède un « excellent QI hockey dans les trois zones ».

Cooper souligne aussi que Wright est un habitué de la pression. En 2019, il a été l’un des rares à recevoir le statut de joueur exceptionnel par la Ligue canadienne de hockey (LCH). Alors que tous les regards étaient tournés vers lui à sa première saison à Kingston, il a récolté 39 buts et 27 mentions d’aide pour 66 points en 58 matchs.

« [Shane] est préparé, mature, professionnel pour un joueur de 18 ans », indique le DG. La patience sera toutefois de mise, ajoute-t-il « La Ligue nationale est la meilleure ligue au monde et il a 18 ans. Il n’a pas joué [en 2020-2021] en raison de la COVID. Les gens doivent modérer leurs attentes. »

Il va y arriver, c’est certain. Il va être un joueur de premier plan, mais ça n’arrive pas du jour au lendemain. Il est un joueur élite en tous points, mais il faut être patient, lui laisser le temps de se développer.

Kory Cooper, directeur général des Frontenacs de Kingston

« Un individu hors pair »

La Presse a sondé des entraîneurs qui ont dirigé ou affronté Shane Wright. Tous ont fait l’éloge de celui qui est pressenti pour être sélectionné au premier rang en juillet prochain, au Centre Bell.

« C’est un individu hors pair », affirme Louis Robitaille, qui était entraîneur adjoint d’Équipe Canada Junior, dont faisait partie Wright, en décembre dernier.

« Sur la patinoire, je pense que c’est un gars qui peut exceller dans toutes les sphères de la game. C’est un gars qui a un excellent lancer, qui est fort sur les rondelles dans les batailles à un contre un. Il est extrêmement intelligent pour utiliser son corps. Il a un bon lancer, des habiletés incroyables, un bon coup de patin. C’est un joueur complet, plus qu’unidimensionnel offensif. »

Il y a trois ans, en 2019, l’Ontarien a été sélectionné afin de prendre part au Challenge de hockey mondial des moins de 17 ans. Même s’il n’avait que 15 ans, c’est à lui qu’on a confié le rôle de capitaine d’Équipe Canada noir. Celui qui était entraîneur-chef de l’équipe, Jody Hull, s’en souvient très bien.

« Honnêtement, il était le plus mature dans le vestiaire. Ça fait partie de sa personnalité comme joueur. Il avait une bonne idée du joueur qu’il était, et de ce qu’il voulait devenir. C’est pour ça qu’il est classé numéro 1 pour ce repêchage depuis tant d’années. »

Sylvain Favreau, lui, était l’entraîneur-chef d’Équipe Canada blanc pour ce tournoi. Sa troupe affrontait celle de Wright pour le premier match.

« On a pris l’avantage par surprise dans le match. On menait au score, mais on a finalement perdu 6-5 en prolongation. Shane Wright a compté trois buts », se souvient-il.

« C’est un joueur qui a toujours eu un impact direct sur le match. Je l’ai vu à distance un peu en regardant les Frontenacs : il s’est beaucoup amélioré du côté de sa vision du jeu. C’est un joueur qui est spécial. Ce n’est peut-être pas un joueur de génération comme [Connor] McDavid, mais je pense que ça va être un centre numéro 1 dans la Ligue nationale. »

Selon Louis Robitaille, Wright « possède un professionnalisme exemplaire » et il « a le bien de l’équipe à cœur ».

« Ce n’est pas un gars extrêmement vocal, volubile, qui va se lever dans la chambre pour faire des gros speechs de motivation, explique-t-il. C’est sûr que nous, on l’a eu à 17 ans dans un Championnat mondial junior où il y a des gars plus vieux, mais en même temps, son leadership, c’est la manière dont il se comporte tous les jours. […] Tout ce qu’il entreprend, il veut le faire de la bonne façon. C’est ce genre de joueur là. »

Le jeu des comparaisons

Au jeu des comparaisons, le nom le plus souvent évoqué pour Shane Wright est celui de Patrice Bergeron. Louis Robitaille préfère toutefois apporter quelques nuances.

« Plus je regarde Shane, plus je pense qu’il est plus engagé offensivement que Patrice. Patrice est vraiment un joueur exceptionnel sur 200 pieds. Il est prêt à faire plus que les petits détails et à être un excellent gars de désavantage numérique. Shane est plus offensif. Je pense que le temps va [décider à qui il se compare]. »

L’entraîneur-chef des Olympiques de Gatineau rappelle d’ailleurs que le jeune homme est encore « à la recherche de son identité ».

« Oui, il y a des similitudes avec la personnalité de Patrice, la manière dont il se comporte, mais en même temps, [Shane] évolue depuis deux ans et il va continuer à le faire. Il va trouver sa niche », soutient-il.

« Quand McDavid et Crosby ont été repêchés, on n’essayait pas de les comparer à quelqu’un d’autre. Shane Wright va être Shane Wright, avec ses forces et ses faiblesses. »