Samedi, 13 h 45. Les avions passent au-dessus de nos têtes toutes les deux minutes. Signe incontestable que nous sommes bel et bien à Saint-Laurent. Raymond Bourque est suivi et entouré par une foule de jeunes et de moins jeunes. L’ancien des Bruins et de l’Avalanche s’assoit devant le représentant de La Presse. Sous un chapiteau, à l’ombre, pour lui donner un peu de répit.

On entame la discussion sur la raison de sa visite à Montréal en ce premier week-end de septembre, alors qu’il réside à Boston avec sa famille.

C’est que l’aréna qui porte son nom aux abords du parc Marcel-Laurin annonçait sa réouverture. Deux ans et demi après le début du chantier. L’endroit est complètement rénové, écoénergétique et prêt à accueillir sa collectivité pour la faire bouger.

« Ça ramène des souvenirs, lance Raymond Bourque d’emblée. Toute mon enfance s’est passée ici. C’est le fun. »

L’homme de 61 ans, aux cheveux et à la barbe grisonnants, nous parle tout en apposant son autographe sur les chandails que lui tendent des gens massés tout autour. Puis il leur fait signe d’attendre quelques minutes, le temps d’offrir à ce journaliste toute son attention. Pour répondre à sa question sur l’endroit où son parcours de joueur de hockey s’est entamé, notamment.

« Mon père demeurait de l’autre bord de la rue pendant plusieurs années, souligne Bourque en pointant le boulevard Thimens. Saint-Laurent. C’est ici que c’est arrivé. C’est ici que l’on m’a aidé à vivre la carrière que j’ai vécue. »

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, LA PRESSE

Raymond Bourque a pris le temps de signer de nombreux autographes lors de la réouverture de l’aréna portant son nom.

« Se retrouver »

Quelques minutes plus tôt, le légendaire défenseur québécois avait prononcé un discours à l’intérieur de l’aréna, sur la glace. Il était notamment accompagné de Danièle Sauvageau et de Kim St-Pierre, les deux ambassadrices du projet, du maire de l’arrondissement, Alan DeSousa, ainsi que de la députée libérale Marwah Rizqy. Tous avaient mentionné l’importance de l’établissement pour la collectivité, pour les jeunes, pour garder sa population active.

Sauvageau ne réside pas à Saint-Laurent. Mais elle a travaillé au Service de police de la Ville de Montréal pendant 33 ans. Notamment dans l’arrondissement où se situe l’aréna Raymond-Bourque.

Le rappel de sa carrière de policière n’est pas fortuit. Un établissement comme celui-là est « un endroit où les jeunes peuvent se retrouver ».

Je le disais à la blague tantôt : si on n’occupe pas nos jeunes, ils vont occuper les services de police.

Danièle Sauvageau

Elle est interrompue par un jeune garçon, qui lui demande qui est le grand monsieur entouré de gens là-bas. Elle lui explique qu’il s’agit d’un défenseur légendaire de la LNH. Puis l’encourage à aller lui demander un autographe. Avant de nous raconter une anecdote.

« Lors de l’un de mes premiers appels sur la patrouille dans un autre arrondissement, on me dit : “Il y a des jeunes qui flânent dans l’aréna” », raconte celle qui a notamment mené le Canada à la médaille d’or olympique aux Jeux de Salt Lake City, en 2002.

« Je dis : “Ils font quoi ?” Il dit : “Ils n’ont pas d’affaire là.” Je dis : “J’aime autant les avoir là que de les avoir dans la rue. Je ne peux même pas croire que vous appelez la police pour ça.” »

PHOTO PHILIPPE BOIVIN, LA PRESSE

Alan DeSousa, Danièle Sauvageau, Raymond Bourque et Kim St-Pierre

C’est que Sauvageau a « grandi dans les arénas ».

« C’est un environnement qui fait en sorte que la communauté peut se rencontrer. Les jeunes, c’est par le sport, l’activité physique, par le fait qu’ils développent toutes les habiletés dont ils auront besoin une fois rendus dans le milieu du travail. »

« Ce n’est plus pareil »

Raymond Bourque a joué 23 ans dans la LNH. Dont 21 saisons avec les Bruins. Avant de finalement décider d’aller tenter une dernière fois d’aller gagner la Coupe Stanley. Ce qu’il a fait, avec l’Avalanche du Colorado, en 2001. Il a soulevé le précieux trophée au moment de son dernier coup de patin professionnel.

Cette loyauté joueur-équipe se fait rare de nos jours. L’été des Flames de Calgary, qui ont dû échanger coup sur coup Johnny Gaudreau et Matthew Tkachuk, en témoigne.

« Ce n’est plus pareil, convient Bourque. Ils permettent aux joueurs de faire ça. On devient agent libre après six ans. Nous, dans le temps, on signait un contrat et on ne pouvait aller nulle part. On n’avait pas de droits. Ils en ont tellement aujourd’hui. »

Mais il assure qu’il n’a « rien contre ça ».

Il y en a cependant un qui a décidé, lui, d’honorer la confiance de son équipe en poursuivant – et probablement pour y conclure – sa carrière : Patrice Bergeron, qui a signé cet été un pacte d’un an avec les Bruins. Le club qui l’a repêché en 2003.

« Patrice l’a dit : s’il devait jouer une autre année, ça allait être à Boston. C’est un grand joueur de hockey. Mais c’est surtout un grand homme. »

« La seconde qu’il accroche ses patins, son chandail va être à côté du mien dans les gradins du Garden. »