(Buffalo, État de New York) Il s’est dit et écrit beaucoup de mots au sujet d’un certain Juraj Slafkovsky depuis que le Canadien en a fait le premier choix au dernier repêchage. Ça fait jaser à Montréal, bien entendu, mais également en Slovaquie, pays qui a été moins gâté par les grands talents depuis les belles années de Zdeno Chara, Marian Gaborik et des frères Hossa.

« Chez nous, il est reconnu partout, racontait l’espoir du Canadien Filip Mesar, vendredi. J’ouvre Twitter, Instagram, et il y a des articles sur lui. C’est beaucoup, mais ça lui va. Il est fort mentalement. »

Cela dit, l’« autre » choix de premier tour du CH l’été dernier – réclamé au 26rang – y trouve son compte. « Je pense qu’il y a trop de pression sur lui, mais c’est plus facile pour moi et j’aime mieux ne pas recevoir trop d’attention », a expliqué Mesar.

L’attaquant vit en effet dans l’ombre de son bon ami. Mais Mesar échappe ainsi à l’attention qui entoure tout choix de premier tour du CH, peu importe son rang dans ce premier tour.

Et c’est pourquoi le débat « Montréal ou Laval ? » au sujet de Slafkovsky occulte une autre question qui aurait fait jaser en septembre, dans un contexte normal. Pour Filip Mesar : Laval ou Kitchener ? C’est la question à laquelle devra répondre l’état-major du CH d’ici un mois.

Une situation rarissime

Parce qu’il évoluait en Europe lorsqu’il a été repêché, Mesar aurait effectivement le droit de jouer dans la Ligue américaine dès l’âge de 18 ans, ce que les joueurs des circuits juniors canadiens ne peuvent faire.

Ils sont plutôt rares à le faire pendant une saison complète, cela dit. Selon les données de Quant-Hockey, un seul joueur de 18 ans a évolué à temps plein dans la Ligue américaine la saison dernière. C’était Danila Klimovich, choix de cinquième tour des Canucks, qui a amassé 18 points en 62 matchs.

En 2019-2020, ils étaient trois, tous des choix de premier tour : Simon Holmström, Tobias Björnfot et Moritz Seider. L’expérience de ce dernier n’a visiblement pas été nuisible, si on se fie au trophée Calder qui traîne quelque part chez lui.

Par contre, les quatre joueurs susmentionnés sont relativement costauds, tandis que Mesar, à 5 pi 9 et 176 lb, n’a pas atteint sa maturité physique.

Pour un Européen, venir dans la Ligue américaine à un jeune âge, ce n’est pas évident, des fois. S’il se fait une place, on ne voit pas pourquoi on ne le gardera pas. Mais sinon, ce sera dans le junior.

Jean-François Houle, entraîneur-chef du Rocket de Laval

Du point de vue du Tricolore, un séjour dans les rangs juniors tomberait sous le sens. Le club-école devrait, en toute logique, compter les jeunes Jan Mysak, Rafaël Harvey-Pinard et Jesse Ylönen dans ses rangs, des joueurs qui doivent jouer, au minimum, dans les trois premiers trios pour poursuivre leur développement. Slafkovsky lui-même pourrait aussi être cédé au Rocket si l’équipe le juge nécessaire.

Le Canadien a aussi embauché des joueurs tels Anthony Richard et Michell Stephens, qui s’ajoutent notamment à Danick Martel et Alex Belzile parmi ceux qui formeront le noyau offensif du Rocket.

Bref, c’est bien beau de vouloir garder Mesar à Laval, encore faut-il qu’il ne soit pas confiné au quatrième trio en raison d’un trop-plein d’avants. Ce qui peut expliquer la mise en garde de Houle.

La préférence de Mesar

Les Rangers de Kitchener, dans la Ligue de l’Ontario (OHL), détiennent les droits sur Mesar s’il devait jouer au hockey junior canadien. Alors, que préférerait-il entre Laval et la ville que les gens cool appellent « K-Dub » ?

« On verra après le tournoi », a-t-il d’abord répondu. Relancé sur la question, il a admis que « la Ligue américaine serait la meilleure option, mais l’OHL serait bien aussi ».

Un facteur non négligeable : Mesar joue dans les rangs professionnels depuis deux ans en Slovaquie. Il touche donc un vrai salaire, ce à quoi il aurait droit à Laval, où son contrat prévoit un revenu de 82 500 $ par saison. Dans le junior, les joueurs n’ont droit qu’à une modeste allocation hebdomadaire.

Financièrement, à très court terme, Mesar gagnerait donc à jouer à Laval. Mais Kent Hughes prendra évidemment sa décision en fonction de ce qui servira le mieux les intérêts de l’organisation et le développement du jeune homme.