Le pauvre entraîneur des Maple Leafs de Toronto, non seulement ses relations semblent tendues avec ses stars, mais plusieurs réclament sa tête depuis les récentes défaites de son équipe.

Il y aurait pourtant d’autres hommes à blâmer à Toronto. Le DG Kyle Dubas est déjà assis sur un baril de nitroglycérine, puisqu’on a refusé de renouveler son contrat, mais le président Brendan Shanahan semble étonnamment à l’abri des critiques.

Shanahan a pourtant droit de veto sur les décisions en matière de hockey, et la somme des bévues commises par la direction ne se compte plus sur les doigts des deux mains.

Les succès des Leafs en saison régulière depuis cinq ans reposent essentiellement sur trois joueurs repêchés parmi les cinq premiers au total, Auston Matthews, Mitch Marner et Morgan Rielly. Le reste constitue un désastre à tous les niveaux.

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Auston Matthews, Mitchell Marner et Morgan Rielly

Contrat de Tavares

Le contrat de 77 millions pour sept ans offert à John Tavares, une décision prise de concert avec les propriétaires, nul n’en doute, constituait une mauvaise idée au départ et elle l’est toujours aujourd’hui. Elle a placé l’équipe en position de faiblesse à l’aube des négociations avec les jeunes vedettes Matthews et Marner et coincé la direction au plan salarial. Cette signature aura une incidence sur une majorité de mauvaises décisions par la suite. Tavares, pour sa part, a connu une splendide première saison à Toronto, avec 47 buts et 88 points, mais depuis, les blessures, entre autres, l’ont empêché d’atteindre le plateau des 30 buts et des 80 points. Il a offert seulement 14 points en 20 matchs de séries depuis son arrivée avec l’équipe.

Exode de talent

Il a fallu se débarrasser de plusieurs joueurs de talent pour se conformer au plafond salarial, mais on a aussi très mal évalué le talent de certains autres. On a voulu mieux répartir les forces en échangeant Nazem Kadri pour un défenseur, Tyson Barrie, et un attaquant, Alexander Kerfoot. Barrie a été chassé après seulement un an. Kerfoot est devenu un attaquant potable, mais Kadri a produit davantage que Tavares l’an dernier au Colorado.

De solides joueurs de soutien, Ilya Mikheyev, Kasperi Kapanen, Zach Hyman, Andreas Johnsson, entre autres, ont été sacrifiés au fil des ans pour se conformer au plafond. Seul Kapanen a rapporté quelque chose.

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Zach Hyman

Mason Marchment, 6 pieds 4 pouces et 210 livres, a été échangé pour Denis Malgin en février 2020, après avoir disputé seulement quatre matchs à Toronto. Il a amassé 47 points en 54 matchs l’an dernier en Floride, à seulement 26 ans. Connor Brown constitue un autre exemple de joueur échangé maladroitement.

Exode de choix au repêchage

Afin d’obtenir du renfort en prévision des séries, Brendan Shanahan et Kyle Dubas ont échangé ces dernières années quatre choix de première ronde, deux choix de deuxième ronde et six choix de troisième ronde. De tous les actifs obtenus en retour de ces choix, reste seulement aujourd’hui Jake Muzzin, trop souvent sur la liste des blessés, et Mark Giordano, un défenseur qui étonne en ce début de saison malgré ces 39 ans.

Le jeune défenseur Sean Durzi a aussi été échangé avec l’un de ces premiers choix pour obtenir Muzzin à l’époque. Durzi, 24 ans, est désormais indélogeable du top quatre défensif des Kings. Il joue en moyenne 21 minutes par match et a déjà amassé six points en dix matchs cette saison.

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Sean Durzi

On a aussi gaspillé un choix de première ronde en 2019 pour se débarrasser de Patrick Marleau. Les Hurricanes ont repêché Seth Jarvis avec ce choix. Jarvis, 20 ans, est déjà membre du premier trio en Caroline.

Mauvais développement

Depuis Auston Matthews en 2016, Rasmus Sandin et Timothy Liljegren sont les seuls produits du repêchage à s’être établis à Toronto. Mais encore, ces deux jeunes défenseurs ne jouaient même pas 17 minutes par rencontre l’an dernier. On vient de rappeler Nick Robertson, 21 ans. Il était temps. Robertson a quatre points en six matchs. Mais il serait encore dans les mineures, n’eût été la blessure au gardien Matt Murray, pour des raisons de contraintes salariales.

Les Maple Leafs ont repêché seulement trois fois en première ronde au cours des six dernières cuvées (et trois choix au total en 2021, en 2e, 5e et 6e ronde), ça n’aide pas à la régénération d’un club, mais deux défenseurs de troisième paire en six ans, c’est trop peu…

Pas de gardien établi

L’acquisition de Frederik Andersen pour des choix de fin de première ronde en 2016 et de deuxième ronde en 2017 fut un très bon coup… de Lou Lamoriello. Andersen a été solide pour les Leafs pendant quatre ans, avant de connaître une dernière saison difficile, marquée par les blessures. On l’a laissé profiter de son autonomie en 2021 et il a joint depuis les Hurricanes de la Caroline, où il a connu une saison magnifique l’an dernier.

Shanahan et Dubas l’ont remplacé par Jack Campbell, le numéro un pendant un an, la saison dernière, avant de joindre les Oilers d’Edmonton cet été à titre de joueur autonome. Petr Mrazek devait constituer un plan B de qualité. On lui a même offert 11,4 millions pour trois ans, mais il a fallu offrir un choix de première ronde (25e au total) aux Maple Leafs, contre un choix de deuxième ronde (38e au total) aux Blackhawks pour se débarrasser de son contrat l’été dernier…

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Matt Murray

Dubas a pris un risque avec un gardien qu’il connaissait de ses années comme gestionnaire dans les rangs juniors en cédant aux Sénateurs un choix de troisième ronde pour obtenir l’éternel blessé Matt Murray et son salaire annuel et 6,2 millions pour encore deux ans. Au moins, Ottawa retient 25 % de son salaire, ce qui atténue la somme sur le plafond salarial pour Toronto (de 6,2 millions à 4,6 millions, mais sans surprise, Murray a été placé sur la liste des blessés après le premier match. Voyons si Ilya Samsonov, acquis lui pour une bouchée de pain, pourra faire le travail. Son début de saison est prometteur.

En bref, en accumulant ces bourdes, et compte tenu des insuccès des Leafs en séries depuis l’arrivée de Brendan Shanahan en 2014, et du peu de relève, on se demande pourquoi l’entraîneur Keefe semble la brebis sacrifiée aujourd’hui…

Un échange profitable pour les deux équipes

Sans Ryan O’Reilly, les Blues de St. Louis n’auraient jamais remporté la Coupe Stanley en 2019. O’Reilly a amassé 23 points en 26 matchs et mérité le trophée Conn-Smythe remis au joueur par excellence en séries.

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Patrik Laine et Ryan O’Reilly

Mais pour l’obtenir, les Blues ont dû sacrifier un espoir prometteur, leur choix de première ronde en 2016 Tage Thompson, un choix de première ronde en 2019 et de deuxième ronde en 2021.

Thompson a obtenu seulement 28 points en 145 matchs à ses trois premières saisons à Buffalo, mais les Sabres pouvaient se permettre d’être patients puisqu’ils étaient en reconstruction. Ce jeune géant a finalement explosé à 24 ans l’an dernier avec 38 buts et 68 points en 78 matchs, au centre du premier trio. Il a amassé six points lundi dans une victoire de 8-3 des Sabres contre Detroit, pour porter son total à 12 points en 9 matchs. Un échange profitable pour les deux clubs dans le contexte de chacune des organisations.

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