(St. Paul, Minnesota) Dans le vestiaire du Wild du Minnesota, la scène est fascinante. Autour de Marco Rossi, future vedette de l’organisation, un attroupement de journalistes et de caméramans se forme spontanément. À ses côtés, Mason Shaw délace ses patins en silence. Seul.

L’homme de l’heure, dans la belle ville de St. Paul, c’est pourtant Shaw. L’attaquant canadien, qui fêtera ses 24 ans ces jours-ci, a marqué dimanche dernier le premier but de sa carrière dans la LNH. À voir sa réaction et celle de ses coéquipiers, on a vite compris que ce n’était pas un premier but comme les autres.

Sur la séquence, on voit Connor Dewar se ruer sur lui. Les deux se connaissent bien, ayant évolué ensemble dans la Ligue américaine au cours des deux dernières saisons. La caméra se tourne alors vers le banc, où c’est visiblement la frénésie.

Voyez le but de Mason Shaw, dimanche dernier

Cet emportement n’était pas qu’alimenté par l’émotion du moment. Car Shaw, peu connu hors du Minnesota, fait partie de ces personnes à qui on ne peut que souhaiter du succès.

Il travaille tellement fort depuis tellement longtemps. Le voir marquer ce but, et ensuite obtenir une mention d’aide sur le but égalisateur, c’était magnifique.

Jared Spurgeon, capitaine du Wild

La carrière professionnelle de Mason Shaw, jusqu’à récemment, n’avait pas grand-chose qui corresponde au rêve des petits hockeyeurs. Quelques semaines après avoir été repêché au quatrième tour par le Wild en 2017, il a subi une grave blessure à un genou au tournoi des recrues de la LNH à Traverse City. Une opération majeure lui a coûté toute la saison.

Deux ans plus tard, alors qu’il s’alignait avec le Wild de l’Iowa, dans la Ligue américaine, rebelote : nouvelle blessure, nouvelle convalescence qui l’a contraint à rater la majorité de la campagne 2019-2020.

Est ensuite venu le test de la patience. Deux saisons entières dans la Ligue américaine l’attendaient encore. Séries éliminatoires incluses, il a à ce jour disputé presque 200 matchs avec le club-école du Wild. Il a enfin obtenu trois premiers matchs dans la LNH l’an dernier. En octobre dernier, nouvelle déception : victime de l’ultime vague de coupes du camp d’entraînement, il n’a pu se tailler un poste dans la LNH.

Il n’est toutefois pas parti vers l’Iowa sans avoir fait bonne impression. « Je lui ai dit à quel point j’aimerais ça l’avoir tout le temps dans mon équipe, témoigne Frédérick Gaudreau. Il amène une belle énergie chaque jour, il est toujours positif et très drôle. Il travaille fort, il n’a peur de rien, il rentre dans le tas. Je trouve que c’est un joueur complet. C’est vraiment le fun de le voir arriver là. »

La tête froide

Le principal concerné, ça tombe sous le sens, flotte sur un nuage. Depuis son fameux but, il a été « assez occupé », lance-t-il dans un grand éclat de rire.

« J’ai reçu pas mal plus de textos que d’habitude, mais ce n’était que du bon, dit-il. Ce sont des moments emballants pour moi, mais aussi pour tout le monde qui a suivi mon parcours : ma famille, mes amis. Ils savent à quel point ça n’a pas été facile, et c’est cool de pouvoir le partager avec eux aujourd’hui. »

PHOTO TIRÉE DU COMPTE TWITTER DU WILD DU MINNESOTA (@MNWILD)

Mason Shaw avec la rondelle de son premier but en carrière dans la LNH, dimanche dernier

Il est néanmoins le mieux placé pour savoir que ce bouillonnement peut être bien éphémère. « Le hockey est un sport où les choses changent vite », rappelle-t-il.

C’est vrai, pour le meilleur comme pour le pire. De récentes blessures subies par Ryan Hartman et Marcus Foligno viennent de lui acheter quelques matchs supplémentaires avec le grand club. À leur retour, rien ne lui garantit toutefois qu’il ne reprendra pas le chemin de la Ligue américaine.

Il se méfie donc des hauts comme des bas, et tente de garder la tête froide.

J’ai ma chance, je veux en tirer le maximum.

Mason Shaw

Il en aura l’occasion ce mardi soir contre le Canadien, alors qu’il évoluera sur le deuxième trio du Wild en compagnie de Joel Eriksson Ek et de Matt Boldy, deux attaquants qui poursuivent leur ascension au sein de l’organisation.

Cette marque de confiance n’est pas attribuable qu’au manque de personnel, assure l’entraîneur-chef Dean Evason, qui lui a donné une présence en prolongation dimanche dernier. Une récompense méritée après 60 minutes de travail acharné.

Lui non plus n’a rien raté de l’effet qu’a eu le but de Shaw sur ses troupes.

« Quand des joueurs sont rappelés ou rejoignent notre formation, le groupe sait par où ils sont passés, explique-t-il. Ils connaissent son historique de blessures, ils savent ce qu’il a surmonté pour arriver ici. Ils savent s’il s’est développé dans les mineures. Ç’a un impact énorme quand ces gars-là marquent un but ou réalisent une grosse mise en échec. Ça galvanise le groupe. C’est ce qui est arrivé l’autre soir. »