« Mitchell me crachait au visage et m’appelait par le mot en N. » Dans une déclaration rendue publique mercredi, Isaiah Meyer-Crothers, le jeune homme qui a été victime de racisme et intimidé par le hockeyeur Mitchell Miller, s’est livré pour la première fois.

Mardi, deux jours après que les Bruins de Boston eurent pris la décision de couper les ponts avec Mitchell Miller, Meyer-Crothers a envoyé une lettre au président de l’Alliance pour la diversité dans le hockey, Akim Aliu. Il y raconte en détail ce dont il a été victime pendant des années. Le texte a été publié sur les réseaux sociaux à la demande du jeune homme, mercredi matin.

« Mitchell me demandait de m’asseoir avec lui dans l’autobus, puis ses amis et lui me frappaient à la tête, écrit Meyer-Crothers. C’est arrivé tout au long de mon parcours scolaire. Quand j’allais à l’école secondaire, Mitchell me crachait au visage et m’appelait par le mot en N. »

J’ai arrêté d’en parler parce qu’ils disaient que j’étais un rapporteur et on riait de moi. Je devais dire que j’étais “son N*****” pour m’asseoir à sa table. Il me faisait laver toute la table. Il me lançait de la nourriture au visage. On m’appelait par le mot en N tous les jours.

Isaiah Meyer-Crothers

À l’école

Le jeune homme explique que la direction de l’école lui avait demandé de se tenir loin de Miller, lui expliquant qu’il n’était pas son ami. Quand le hockeyeur a été expulsé, ses amis l’ont intimidé à leur tour.

« [Mitchell Miller] prétendait être mon ami et me faisait faire des choses que je ne voulais pas faire, ajoute Meyer-Crothers. Au secondaire, je me suis fait battre par lui. Tout le monde pensait qu’il était cool, mais je ne comprends pas comment tu peux être cool quand tu choisis une personne et que tu l’intimides toute sa vie. »

Il raconte avoir reçu plusieurs messages de Miller sur les réseaux sociaux Snapchat et Instagram en octobre dernier. Le défenseur lui aurait demandé pourquoi ses parents faisaient les choses à sa place et pourquoi il ne s’exprimait pas par lui-même.

« Il m’a dit qu’il était désolé et que ça n’impliquait pas le hockey, écrit-il. Il m’a dit qu’il s’impliquait dans la communauté, qu’il aidait les jeunes et qu’il voulait être mon ami. Je lui ai répondu : “C’est cool, mais où est la preuve ?” Il ne m’a donné aucune preuve. »

« [Avec] tous les mensonges que Mitchell Miller m’a dits pendant tant d’années, je ne crois pas un mot de ce qu’il m’a dit. »

À la fin de sa déclaration, Isaiah Meyer-Crothers indique avoir reçu de nombreux messages de haine sur les réseaux sociaux au cours des derniers jours, depuis que l’histoire est revenue au cœur de l’actualité.

Mitchell n’est pas mon ami. Ce qu’il m’a fait, ça me blesse au cœur. Je voulais juste dire à tout le monde que, quand Mitchell dit qu’il est mon ami, ce n’est pas vrai. Je n’en peux plus de tout cela.

Isaiah Meyer-Crothers

Rappel des faits

Les Bruins se sont entendus avec Miller le 4 novembre dernier, un choix qui en a fait sourciller plusieurs. Il avait été repêché puis libéré par les Coyotes de l’Arizona en 2020 après que l’histoire d’intimidation envers Isaiah Meyer-Crothers, un jeune Noir vivant un retard de développement, avait fait surface.

Un article-choc de l’Arizona Republic avait révélé la teneur de l’intimidation qu’avait fait subir Miller à Isaiah Meyer-Crothers, quatre ans plus tôt. Le journal écrivait ceci : « Il y a quatre ans, Miller a reconnu devant une cour de la jeunesse de l’Ohio avoir intimidé Isaiah Meyer-Crothers, notamment en lui faisant lécher un bonbon qui avait été frotté à son insu dans un urinoir. Meyer-Crothers a aussi dit que Miller l’interpellait constamment en utilisant le mot qui commence par la lettre N et le frappait à répétition. D’autres élèves ont confirmé aux policiers les allégations que Miller utilisait des insultes à caractère raciste. »

Sous pression, les Coyotes avaient fini par libérer le joueur.

Samedi, le commissaire Gary Bettman s’est montré particulièrement virulent au sujet de cette mise sous contrat. Il a rappelé en premier lieu n’avoir jamais été consulté par les Bruins. « Il n’est pas admissible à jouer dans la LNH et je ne peux pas vous dire qu’il le sera un jour », a-t-il ajouté.

Selon lui, les actes commis par Miller dans le passé sont « répréhensibles » et « inacceptables ». Il a précisé que les Bruins étaient « libres de le mettre sous contrat, tant qu’il joue ailleurs ».

Les Bruins ont finalement annoncé dimanche en fin de soirée qu’ils se séparaient du défenseur.

« Sur la base de nouvelles informations, nous pensons que la meilleure décision à prendre pour le moment est de retirer à Mitchell Miller l’occasion de représenter les Bruins. Nous espérons qu’il continuera à travailler avec des professionnels et des programmes pour poursuivre son éducation et sa croissance personnelle », a notamment déclaré le président des Bruins, Cam Neely, par voie de communiqué.