Après une saison en dents de scie avec son club en Suède, Emil Heineman n’est pas arrivé avec le Rocket de Laval comme s’il était l’enfant prodige. Pourtant, il a immédiatement pourvu le rôle de héros inattendu.

Tout vient à point à qui sait attendre, dit le vieil adage.

Et même s’il aurait préféré ne pas attendre, l’entraîneur-chef du Rocket de Laval, Jean-François Houle, savait ce qui l’attendait quand le Suédois a rejoint sa formation.

« Dès le début du camp des recrues du Canadien, j’ai senti que c’était un de nos meilleurs joueurs. […] On l’aurait pris toute l’année. Il aurait joué toute l’année sur le top 6, mais c’était déjà décidé qu’on le renverrait en Europe. Au camp des recrues, on a vu de très belles choses de lui et on savait qu’on allait recevoir de très belles choses s’il revenait », a affirmé Houle.

Et son jugement ne lui a pas menti. Depuis son arrivée à Laval, tout ce que touche Heineman se transforme en but. En fait, à ses six premiers matchs, il a fait scintiller la lumière rouge à six reprises en plus d’obtenir une mention d’aide.

Le pilote du club lavallois n’a pas manqué de louanges pour l’ailier de 21 ans.

Il n’a eu besoin d’aucune période de transition. Son jeu est fait pour les patinoires nord-américaines. C’est dur de comprendre pourquoi il n’a pas eu plus de points en Europe, mais ici, avec son coup de patin et la façon dont il lit le jeu, il peut se rendre au filet plus rapidement. Il lance plus proche du filet. Son jeu est plus nord-américain.

Jean-François Houle, entraîneur-chef du Rocket de Laval

Et c’est ce qui peut en surprendre plusieurs. En 35 rencontres dans la SHL avec Leksands IF, il avait été limité à 15 points. Pratiquement personne n’avait sur sa carte de bingo une explosion offensive pour Heineman. Le principal intéressé a également été surpris.

« Je ne m’attendais pas à ça. C’est dur d’expliquer pourquoi. Je tire pas mal plus depuis que je suis ici et j’évolue sur l’avantage numérique. J’aime la plus petite patinoire et j’ai fait le plein de confiance depuis mon arrivée ici. C’est vraiment plaisant », a analysé Heineman.

Houle a donné quelques pistes de réponses pour expliquer les prouesses de son nouveau poulain : « Il a un bon gabarit, il lance bien la rondelle et la protège bien. Il est intelligent sur la glace, il se place toujours au bon endroit. »

Si Houle ne tarit pas d’éloges pour Heineman, c’est parce qu’il « pourrait être un sérieux espoir pour le Canadien. […] Son tour viendra ».

Entre-temps, l’entraîneur est plus que ravi de pouvoir compter sur lui.

Le catalyseur

L’arrivée de Heineman avec le Rocket a coïncidé avec une séquence gagnante pour le club. Les Lavallois ont remporté leurs quatre derniers duels – tous sur la route – et le trio formé par Heineman, Pierrick Dubé et Mitchell Stephens est au cœur des succès.

« Il apporte beaucoup offensivement, a noté Dubé au sujet de son compagnon de trio. Il a un flair pour les buts, ce qui nous manquait depuis un moment. C’est un gars très intelligent avec la rondelle. »

Houle a également tenu le même discours : « Son arrivée était à point. Il y a eu plusieurs blessés chez le Canadien, donc on a manqué de punch offensif. »

Avec cinq matchs à faire au calendrier du Rocket, le trio devra poursuivre sur sa lancée s’il veut aider le club à participer aux séries éliminatoires.

Les troupiers de Jean-François Houle occupent le cinquième et dernier rang donnant accès aux séries éliminatoires dans la division Nord. C’est avec leur destinée entre leurs mains que vendredi soir, ils tenteront de défaire l’une des formations qui les pourchassent, les Monsters de Cleveland.

Déjà échangé à deux reprises

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Emil Heineman

Emil Heineman a été acquis par le Canadien le printemps dernier lorsque le Tricolore a envoyé Tyler Toffoli aux Flames de Calgary en retour du Suédois, d’un choix de premier tour en 2022 (Filip Mesar) et d’un choix de cinquième tour en 2023. Pour la seconde fois avant d’atteindre le niveau professionnel nord-américain, Heineman s’est fait échanger. D’abord repêché au deuxième tour par les Panthers de la Floride en 2020, les Flames ont mis le grappin sur Heineman lorsqu’ils ont envoyé Sam Bennett au sud de la frontière. S’il a assuré ne pas trop s’en faire, il y a quand même eu un moment de doute chez lui. « Puisque je m’étais fait échanger deux fois, j’ai demandé à mon agent si je devais m’en faire. Qu’est-ce que ça veut dire ? Je crois que les équipes croient en ma valeur si elles vont me chercher. Et ça ne me dérangeait pas vraiment puisque j’étais encore en Europe », a-t-il admis.

Justin Vézina, La Presse