La victoire, présumément, n’a pas de prix. Mais s’il en avait le choix, le Lightning de Tampa Bay échangerait-il quelques-uns de ses buts, voire le match en entier, si on l’assurait du retour rapide en santé de Victor Hedman et d’Erik Cernak ?

Ce gain de 7-3, acquis au premier duel de cette série de premier tour contre les Maple Leafs de Toronto, a en effet coûté cher au Lightning. Très, très cher. Sans deux de leurs trois meilleurs défenseurs, comment les hommes de Jon Cooper arracheront-ils trois victoires additionnelles ? Malgré l’apparente aura d’invincibilité en séries éliminatoires de cette équipe, la question mérite d’être posée.

Le match d’Hedman n’a pas même duré sept minutes : neuf présences en première période ont été l’histoire de sa soirée. Aucune information n’a filtré sur son état de santé, mais quand un joueur de sa trempe, réputé pour son endurance et son engagement, fait l’impasse sur les deux dernières périodes d’un match inaugural, il est difficile d’être optimiste.

Cernak, lui, n’a jamais vu arriver Michael Bunting, qui lui a asséné un vicieux coup de coude à la tête en fin de deuxième période. Ébranlé, il a passé de longs instants au sol avant de rentrer au vestiaire, aidé par des coéquipiers. Une scène, hélas, bien connue, qui se conclut rarement par un pronostic encourageant.

PHOTO NATHAN DENETTE, LA PRESSE CANADIENNE

Le défenseur du Lightning de Tampa Bay Erik Cernak (81) est soigné par le personnel médical.

Le Lightning a profité de la pénalité majeure à Bunting pour inscrire deux buts et placer le match hors de portée pour les Leafs. Or, lors du prochain duel, jeudi, lorsque les compteurs auront été replacés à zéro, c’est une défense décimée qui risque d’être en place dans le camp floridien.

À 34 ans, Ian Cole est certes un soldat fiable, mais la dernière fois qu’il avait joué autant que mardi (24 min 15 s) dans un match de séries sans prolongation, c’était en 2015. Il a hérité d’importantes responsabilités à Tampa au cours de la saison qui vient de se terminer, mais jusqu’à quel point peut-on presser le citron ? Avec Cernak, il était déjà sur la ligne de front en infériorité numérique, et le duo était le plus sollicité dans les mises au jeu en territoire défensif à cinq contre cinq. Il sera dur de lui en demander davantage.

Les plans B sont potables, mais ils impliquent un sérieux manque à gagner sur le plan qualitatif. Nick Perbix, 24 ans, vient de connaître une belle première campagne dans la LNH, mais est-il prêt à changer radicalement de charge de travail ? Darren Raddysh a été dominant dans la Ligue américaine – 51 points en 50 matchs –, mais comme on a pu le constater contre les Leafs, son adaptation à la LNH n’est pas encore complète.

Laissés de côté mardi, Zach Bogosian et Haydn Fleury sont théoriquement les prochains à entrer dans la formation. Ni l’un ni l’autre ne sort d’une saison particulièrement emballante.

Les perspectives pour la suite ne le sont pas davantage pour la défense du Lightning. Sauf que…

Choc

Sauf que cette équipe n’est pas la seule à avoir accusé un choc.

Les Maple Leafs, qui sont capables, on le sait, d’être leur pire ennemi, ont vu se concrétiser leurs pires cauchemars en début de rencontre.

Les trois buts qu’ils ont encaissés en première période ont exposé autant de failles dans leur armure. Dès les premières secondes, Corey Perry a profité d’un revirement : le temps de prononcer Zach Aston-Reese, c’était 1-0. Quelques instants plus tard, Ilya Samsonov donnait un long retour alors que le duo enflammé d’Anthony Cirelli et Brandon Hagel prenait le filet d’assaut : 2-0. En fin d’engagement, Nikita Kucherov portait l’avance des siens à trois buts en avantage numérique.

PHOTO FRANK GUNN, LA PRESSE CANADIENNE

L’ailier droit du Lightning de Tampa Bay Corey Perry (10) marque contre le gardien de but des Maple Leafs de Toronto Ilya Samsonov (35).

En 20 minutes de jeu, la preuve était faite de leur retard au chapitre de la profondeur (en attaque, à tout le moins), des gardiens de but et des unités spéciales. Incrédules, les locaux ont quitté la glace sous les huées.

Ils ont certes repris vie au deuxième vingt, avant de voir le Lightning enchaîner avec trois autres buts, tous inscrits en avantage numérique.

Aussi éclopé que puisse être le Lightning – Michael Eyssimont, sonné par une mise en échec légale de Jake McCabe, n’a pas fini le match lui non plus –, les Leafs ne sont pas sortis du bois.

Ilya Samsonov a été atroce, au point où l’entraîneur-chef Sheldon Keefe n’a pas dévoilé qui, du Russe ou de la recrue Joseph Woll, amorcerait le match suivant.

Keefe, surtout, est le premier à savoir à qui il a affaire. Après une déchirante défaite au septième match entre les deux mêmes clubs l’an dernier, il avait offert cette observation : « Ce que je retiens de cette série, c’est à quel point le Lightning défend bien en équipe. Il joue pour gagner des championnats. »

Les joueurs du Lightning regorgent d’expérience, ils ont goûté à la victoire et savent ce qu’il faut pour y accéder. Leur entraîneur Jon Cooper y a d’ailleurs fait écho, en fin de soirée mardi, en s’adressant aux journalistes couvrant le match sur place. « Il y a encore beaucoup d’inconnu, mais ce que j’ai appris au fil des ans, c’est que je ne parierais certainement pas contre nos gars », a-t-il lancé.

Il est facile de partager son avis. Plus facile, à tout le moins, que de donner raison à Ilya Samsonov, qui a affirmé il y a quelques jours que les Maple Leafs de Toronto constituaient la meilleure équipe de la LNH. Mardi, ils n’étaient même pas la meilleure équipe dans l’aréna.

Le Lightning mène la série 1-0. Le deuxième match aura lieu jeudi à Toronto.