Sont-ce les Panthers qui ont gagné ? Ou les Bruins qui ont perdu ? Ou les Panthers qui ont, de peine et de misère, réussi à ne pas perdre ? Ou alors les Bruins qui ont échappé le ballon ?

On se gratte encore la tête en cherchant la réponse. Le résultat, toutefois, est non équivoque. En l’emportant 7-5, vendredi, les Panthers de la Floride ont évité l’élimination pour un deuxième match de suite et forcé la tenue d’un septième et ultime duel contre les Bruins de Boston. Soudain, le statut de favoris des hommes en jaune et noir ne tient plus qu’à un fil.

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Le spectateur en a certainement eu pour son argent. Des buts à la tonne, un score serré jusqu’à la toute fin, de la controverse – une passe avec la main sur le but refusé à Patrice Bergeron, vraiment ? Bref, de la sacrée bonne télévision.

Maintenant, que retenir de cette rencontre ? Tout simplement que plus aucune forme de logique ne tient désormais la route.

Les Bruins, d’abord. Personne ne s’attendait à ce que leurs adversaires leur donnent un billet pour le deuxième tour en cadeau. Mais ce n’est plus drôle.

En 102 minutes disputées à 5 contre 5 lors des deux derniers matchs, ils ont inscrit seulement deux buts. C’est à peine plus du tiers de leur rythme de croisière de la saison. Ce n’est pas de la malchance : le site spécialisé Natural Stat Trick a estimé que les oursons avaient généré seulement quatre chances de marquer de grande qualité au cours de la rencontre de vendredi, contre 15 pour les Panthers. Ceci en dépit du retour de David Krejci dans la formation.

PHOTO WILFREDO LEE, ASSOCIATED PRESS

L’entraîneur-chef des Bruins Jim Montgomery se désole de l’état des lieux en troisième période.

À l’exception de l’avantage numérique, qui affiche désormais un taux de succès délirant de 39 %, rien ne semble véritablement fonctionner. La fameuse « profondeur », censée être une force, est bien timide. En défense, Connor Clifton a connu une soirée misérable. Garnet Hathaway n’a pas fait peur à grand-monde.

Or, le plus grave problème de l’heure est peut-être devant le filet. Linus Ullmark avait déjà été l’un des responsables de la défaite du match numéro 5. Il est certainement à l’avant-plan du bilan de ce match numéro 6. À l’exception d’un arrêt spectaculaire contre Carter Verhaeghe en tout début de rencontre, il n’a jamais été en mesure de faire la différence.

Les deux avances que son club lui a enfin données en troisième période ont duré 208 et 28 secondes, respectivement. Le Suédois est ébranlé, ce n’est même pas subtil.

Après la rencontre, l’entraîneur-chef Jim Montgomery a déploré, devant les journalistes sur place, que ses hommes aient donné beaucoup d’espace aux Panthers dans l’enclave. Il a aussi dit avoir jonglé avec l’idée de retirer Ullmark au profit de Jeremy Swayman. Or, ses adjoints et lui ont convenu de garder le cap, se rappelant qu’à moult reprises, les Bruins étaient sortis gagnants de duels du genre pendant la saison.

À l’évidence, le modèle n’est pas infaillible.

Sans relâche

Il serait évidemment injuste de ne pas rendre hommage aux Panthers, qui ont travaillé sans relâche pour atteindre ce septième match.

Leur effectif, à toutes les positions, est inférieur à celui des Bruins. Leur gardien n’appartient plus à l’élite de la LNH depuis un bon moment déjà. Mais ils s’en balancent assez royalement. Ils ont livré un fort match, surtout à forces égales, et méritent ce qui leur arrive.

Néanmoins, l’une des raisons qui expliquent leur positionnement du moment, la plus grande raison peut-être, s’appelle Matthew Tkachuk.

Avec 109 points pendant la saison, le frère de Brady a été le cœur et l’âme des Panthers. On ne se surprendra pas une seconde s’il est nommé pour le trophée Hart.

Dans cette série, il est tout simplement sublime. Il est de toutes les batailles, de tous les faits saillants.

L’épithète « gamer » se traduit très mal en français. On désignera ainsi un joueur qui s’élève au-dessus de la mêlée dans les moments les plus cruciaux. Un battant, disons.

« N’est-il pas un (langage explicite) de gamer ? », s’est exclamé l’entraîneur-chef Paul Maurice, après le match précédent. La remarque, que nous rapportons telle quelle, résume tout de Tkachuk.

Les Panthers ne sont quand même pas manchots. Le défenseur Brandon Montour, à la fin de la vingtaine, connaît une explosion qu’on n’attendait plus. Carter Verhaeghe continue sur sa lancée amorcée en séries éliminatoires l’an dernier. Aleksander Barkov, plus effacé offensivement, a enfin marqué vendredi.

Or, si cette équipe réussit à causer la surprise de l’année en éliminant les méchants Bruins au premier tour, ce sera grâce à Tkachuk. Tous les yeux sont tournés vers lui, et il ne demande certainement pas mieux.

L’une de ces deux équipes a connu la meilleure saison de l’histoire de la LNH. L’autre est entrée en séries de justesse. Plus rien de cela ne comptera, dimanche, au moment d’en finir une fois pour toutes.

Au diable la logique, finalement. Et c’est parfait ainsi.